Le MEDEF propose de rendre "très incitatif, voire obligatoire" une part de capitalisation dans la retraite des salariés français. Ecrit La Tribune
Ce n'est pas vraiment une surprise, puisqu'hier, nous vous faisions part de l'opportun sondage commandé par par le "Cercle des épargnants" qui affirmait que les français étaient "majoritairement d'accord" pour introduire un pilier de capitalisation individuelle pour sauver leur système de retraite.
Extrait : "... / ... Concernant le financement, les deux tiers (66 %) estiment que "le risque de faillite du système est réel dans les années à venir" et surtout : " ... / ... 53 % des Français déclarent épargner pour financer leur retraite. ... / ... Parmi les Français qui n’épargnent pas en vue de la retraite, 56 % souhaiteraient le faire contre 60 % en 2009 " .../ ... "
Alors, après avoir semé la "panique" chez les salariés, il est maintenant nécessaire de leur vanter la formidable opportunité de ces futurs fonds de pension à la Française !
En mai 2008 nous écrivions, dans un article publié sur Bellaciao : "... / ... La programmation de l’allongement de la durée de cotisation va pousser un certain nombre de cotisants à se poser des questions … que les assureurs souhaitent les voir se poser.
... / ... Que va t-il alors se passer pour un salarié sans emploi de 57 ou 58 ans qui devrait attendre d’avoir 65, 66 ou 67 ans pour faire valoir ses droits ?
Et bien, s’il a eu les moyens ou l’opportunité de constituer une épargne retraite personnelle ou par son entreprise, il pourrait décider de faire l’impasse sur les dernières années de cotisation et compléter sa minoration de pension par l’épargne retraite capitalisée ... / ... "
Ce qui dans ce cas, arrangerait le gouvernement qui pourrait s'en emparer pour justifier un gel des pensions et ... permettrait aux établissements financiers de récupérer, une partie de l'épargne de précaution des français, qui refusent de placer leur argent en bourse !
C'est justement cette épargne que ciblait le sondage du "Cercle des Epargnants" Plus vive que l'éclair, Laurence Parisot s'est ruée sur les micros pour "hurler sa douleur" rien qu'à l'idée que le gouvernement puisse : "toucher à l'épargne longue" affirmant que ce : " sera désastreux pour l'économie" et de proposer : " l'émergence d'un « mix » entre retraite par répartition et retraite par capitalisation"
En clair, Laurence Parisot si bouleversée par l'idée d'une "attaque" sur l'épargne longue, suggère d'y a jouter une nouvelle forme d'épargne beaucoup plus longue : La capitalisation retraite
" Nous devons aujourd'hui nous demander comment mettre en place, en plus de ce que nous pourrions garder du système par répartition, un nouveau dispositif très incitatif, voire obligatoire, de système par capitalisation », a défendu Laurence Parisot hier. Lundi, en conseil exécutif du Medef, « beaucoup estimaient que c'était probablement la seule voie, pas simplement raisonnable, mais réaliste », a-t-elle poursuivi, allant ainsi un cran plus loin que lors de ses précédentes déclarations "
Et d'ajouter : "De nombreuses pistes sont sur la table : produits nouveaux, durée de détention de l'intéressement et de la participation, abondement supplémentaire des employeurs, simplification des dispositifs pour les PME, sortie en rente ou en capital, sécurisation fiscale des dispositifs… Citant les exemples du Chili, de la Suède ou de l'Allemagne, Laurence Parisot a vanté les « vertus » de la capitalisation, qui « crée des richesses et n'en ponctionne pas », estimant que, « sur le long terme, l'évolution des marchés est toujours gagnante "
Et bien parlons en du Chili où ce système à été mis en place par le "sémillant" Augusto Pinochet !
Le Monde Diplomatique nous expliquait la situation des retraités en décembre 2008
" ... / ... En apparence, le Chili réunissait les conditions optimales pour faire la preuve de la supériorité de la capitalisation. Pourtant, les Chiliens réalisent aujourd’hui que les AFP ne sont pas en mesure de tenir leurs promesses.
Des millions d’entre eux percevront au moment de leur départ en retraite des sommes infimes (de 8 à 16 euros par mois), quand le salaire minimum est de 135 000 pesos (156 euros).
Que s’est-il donc passé ?
Depuis 1981, à l’exception des 3,8 % de Chiliens qui parvinrent à conserver leur ancien régime par répartition (parmi eux, les militaires et les policiers) et des 3,5 % cotisant à la caisse des indépendants, l’ensemble de la population active est obligatoirement affiliée à un régime par capitalisation. Cependant, le marché de l’emploi est devenu si précaire que seuls 11 % des salariés parviennent à effectuer des versements sur une base mensuelle.
Les statistiques communiquées par les AFP elles-mêmes démontrent qu’en moyenne les deux tiers des assurés ont cotisé moins d’un mois sur deux ; la moitié, moins d’un mois sur trois ; et un tiers, moins d’un mois sur cinq.
Dans les mégapoles des pays émergents, la frontière entre secteurs d’activité formels et informels est de plus en plus floue. Des millions de travailleurs alternent contrats de courte durée et périodes de chômage ou de travail indépendant, en attendant un emploi plus stable. ... / ... Dans un tel contexte économique et social, un système prévisionnel reposant sur l’hypothèse d’une manne générée par les intérêts capitalisés de l’épargne salariale ne pouvait se maintenir.
Après avoir entendu les critiques et recueilli les propositions émanant entre autres de l’opposition de gauche, la présidente Michelle Bachelet décidait, au début de 2008, d’instaurer un « filet de sécurité » garanti par l’Etat : une allocation publique de solidarité d’un montant de 120 euros par mois, équivalant à 60 % des revenus salariaux les plus modestes, et un complément alloué aux bénéficiaires des AFP recevant des prestations inférieures à 315 euros ... / ... "
Conséquence, au Chili, l'application de la capitalisation " laisse sans revenu les deux tiers des retraités ... / ... "
L’économiste Philippe CREVEL que nous citions hier, nous rappelait que la France a connu la capitalisation retraite. Il en parlait en ces termes : " La faillite de rentiers durant la crise des années trente et la suspicion à l’encontre du capitalisme à la fin de la seconde guerre mondiale créaient un climat favorable à la répartition … / … " tiens donc !
Les fonds de capitalisation retraite nous expliquent leurs thuriféraires seront stables et participerons à l’activité économique du pays.
Comment peut on affirmer ceci, alors que les pays de la zone Euro, n'arrivent pas à lutter contre la spéculation et prouvent leur incapacité à "réformer" le capitalisme !
Qui nous prouve que la situation décrite récemment par l'OCDE ne se reproduira pas ? : "... / ... En raison de la forte baisse des Bourses en 2008, "les fonds de pension ont vu la valeur de leurs investissements reculer de 23% en 2008, soit de quelque 5.400 milliards USD au total dans les pays de l’OCDE" - Source CGT Cognac
De quelle façon seront gérés ces fonds ?
En effet, il est assez illusoire de penser que l'attitude de leurs gestionnaires sera orientée vers l'éthique ou le bon fonctionnement de l'économie de proximité. Car, ne l'oublions pas, lorsqu'il faut servir des pensions sur une longue durée, les rendements doivent être élevés ! Et croyez bien que ce n'est pas avec des placements dans les PME ou le micro crédit qu'on va chercher des rendements à 2 chiffres !
Certains rappelleront à Madame Parisot que l'épargne retraite par capitalisation existe déjà en France (voir ci-dessous) !
Oui, mais elle est exclusivement basée sur le volontariat et se situe bien loin de ce représenterait le pactole d'une obligation de cotisation privé ... que les banquiers et les assureurs se feraient un plaisir de gérer !
Il va s'en dire que ceux qui feraient remarquer que Laurence Parisot est administratrice de la BNP, qu' Ariane Obolenski, membre du bureau du conseil exécutif du MEDEF est également directrice générale de la Fédération Bancaire Française, elle même adhérente au MEDEF et que le "gentil" Xavier Bertrand qui déclarait il y a quelques heures :
" Le mot «capitalisation» fait sursauter, mais chez nous, il n'y a pas un système de fonds de pensions à l'anglo-saxonne. L'épargne-retraite existe en France depuis longtemps. Elle s'appelle l'assurance-vie. Le problème, c'est qu'elle n'est pas forcément affectée à la retraite.... / ... On ne doit pas avoir peur d'aborder la question de l'épargne-retraite à l'occasion de cette réforme" ... est assureur de métier, font fausse route !
Car, comme l'affirme Laurence Parisot qu'on peut lire dans La Tribune : " c'est quelque chose d'extraordinairement efficace et rassurant " ...