J'avais, pour ma part, découvert la plume drôle, piquante et parfois dérangeante de Rémi De Vos il y a trois ans au Rond-Point avec "Jusqu'à ce que la mort nous sépare". Mais ni une mise en scène ratée d'Eric Vigner, ni la piètre prestation de Catherine Jacob, n'avaient permis à l'auteur de révéler l'ampleur de son talent.
Oublions tout cela et savourons "Alpenstock", grâce au travail intelligent effectué avec des moyens beaucoup plus modestes par David Lejard-Ruffet (metteur en scène) aux côtés des comédiens, tous excellents, Charlotte Petitat, Antoine Rosenfeld et Pierre-Etienne Royer.
De quoi est-il question ici ? D'un couple, Grete et Fritz, qui vit dans des "montagnes imaginaires". Représentez-vous le tyrolien du Juste Prix (Fritz donc), fonctionnaire de son état, un brin facho, amateur de défilés folkloriques, marié à Heidi (Grete) devenue femme au foyer dévouée, écervelée, dont la seule préoccupation est d'astiquer toute la journée, et qui ne découvre l'orgasme qu'avec un inconnu qui l'a suivie depuis la rue jusque chez elle pour la violer... Bien-sûr, cela n'est pas sans énerver Fritz qui zigouille le malotru. Mais Fritz aurait presque été émoustillé par la situation...
Je m'arrête là pour le pitch.
De dialogues et de situations improbables mais hilarantes, qui n'ont d'autre but que de nous titiller, de nous mettre face à ce que l'être humain a de moins joli, de plus hypocrite ou de plus sombre, David Lejart-Ruffet ne cherche pas à faire du réalisme et nous entraîne dans une folie, un délire total qui tomberait presque parfois dans du Grand Guignol dont on se délecte pour mieux réfléchir.
"Alpenstock" dynamite le couple, le sexe, le racisme, ou encore la société bien pensante, stéréotypée, c'est jouissif ! L'écriture de Remi De Vos n'est pas sans rappeler celle d'Hanokh Levin, corrosive à souhait. Un régal.
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