Europe : une heure de vérité

Publié le 17 mai 2010 par Egea

Souvent, l'expression croisée des chemins ou heure de vérité est utilisée par les auteurs d'articles qui ne savent pas intituler leurs textes; Et souvent, c'est inadapté, car s'il y a toujours des décisions à prendre, on est rarement placé à des carrefours stratégiques qui décident réellement de l'histoire.

(image trouvée sur médiapart)

C'est donc conscient de l'abus de l'expression que je l'emploie. L'Europe paraît à l'heure de vérité.

1/ on connait l'équation : la crise économique a nécessité des interventions massives des Etats, qui affectent leurs dépenses publiques, y compris les Européens qui se sont mis à imiter les politiques keynésiennes pratiquées par les Etats-Unis depuis quinze à vingt ans... Se pose la question que je posais déjà il y a un an : la formation d'une bulle de l'endettement qui pose la question de la faillite possible des Etats. Blâmer les marchés, c'est ne pas voir l'incroyable tolérance qu'ils ont eue pendant un ou deux ans.... Les marchés, pour une fois, sont rationnels.... (lol)

2/ Mais avant de s'attaquer aux Etats, attaquons d'abord leurs succédanés : l'Europe et son euro. Car chacun a bien compris que l'attaque contre la Grèce ne visait que l'euro....

3/ La question posée par les marchés (qui ont raison) est limpide : solidarité, ou non ? si oui, comment? sinon, éclatement de l'euro.

4/ Certains nous chantent "gouvernement économique". D'autres disent "vérification préalable des budgets par Bruxelles". Les derniers entonnent la "constitutionnalisation du non-déficit"... Beaucoup de faux-culs, entre nous. Gouvernement économique quand on s'étrangle des pouvoirs supranationaux que ça implique ? vérification alors qu'on n'a cessé, depuis trente ans, de favoriser la concurrence fiscale porteuse de baisse d'impôts et d'amoindrissement des moyens de l'Etat? constitutionnalisation alors qu'on a mené une sorte de désinflation compétitive, qui vous rend premier exportateur grâce aux marges faites en zone euro ?

5/ Revenons aux fondamentaux : l'Etat moderne est fondé sur la démocratie, qui vient du consentement du peuple à l'impôt. Bref, le "politique" et le "fisc" sont intimement lés, même si on l'oublie trop souvent. La conclusion est simple : vous souhaitez plus de "politique" européen ? acceptez plus d'impôts européens Conséquence : augmenter, d'une façon générale, le niveau des impôts, et surtout, cesser la concurrence fiscale. Cela passe par une harmonisation fiscale (garantie et contrôlée par Bruxelles) et un tarif extérieur commun (et donc une certaine forme de protectionnisme qui est dans l'air du temps). Cela entraîne une méta conséquence : le renforcement d'une solidarité politique européenne, et donc des transferts de souveraineté à la mesure....

6/ A défaut : l'éclatement inéluctable, avec tous les coûts induits. Mais la reprise d'une certaine souplesse "nationale" même si elle entraîne une moindre influence "internationale". On revient à mon dilemme entre la taille et la solidarité, que j'évoquais hier. Avec un nouveau dilemme : autonomie contre influence..... Plus moyen d'une politique de grandeur, quand on est petit....

Bref, que de mauvaises solutions, hein ? Mais ne pas poser le débat en ces termes, c'est de l'agit prop...

O. Kempf