Il y a quelques jours, le gouvernement publiait la situation budgétaire du
pays au premier trimestre. Il n'y a pas de quoi être fier. Les prévisions françaises sont loin d'être les meilleures. Et la récente polémique sur une éventuelle réduction des salaires de
ministres fait sourire.
Un déficit budgétaire qui dérape
Les dépenses sont faussement stables, et déjà aussi élevées qu'au premier trimestre 2009, au plus fort de la crise: 86,2 Md€ contre 86,8 Md€. L'explication avancée est troublante
: il y a un an, le plan de relance pesait pour 4,2 Md€, contre 600 millions d'euros cette année. Mais le ministère du budget avance aussi qu'«une partie des dépenses autres que de personnel
n’ont pu être retracées dans les systèmes d’information à fin mars pour des motifs techniques.» En d'autres termes, les dépenses sont sous-évaluées à fin mars 2010 d'environ 4 milliards
d'euros ! En matière de surcoûts, le ministère prévient que ces comptes intègrent 8 milliards d'euros de compensation de la suppression de la taxe professionnelle aux collectivités locales.
Les recettes ont largement progressé (+10 milliards d'euros par rapport au premier trimestre 2009), pour atteindre 61 milliards d'euros à fin mars. Le gouvernement attribue cette hausse des
recettes fiscales au plan de relance. Sur un trimestre, le déficit budgétaire s'affiche ainsi à 25 milliards.
Des prévisions économiques fragiles
Le 11 mai dernier, François Fillon se justifiait à l'Assemblée Nationale : «Nous allons continuer et amplifier une politique économique qui
nous donne aujourd'hui les meilleures prévisions de l'ensemble de la zone euro. »
Début mai, la Commission
européenne a réévalué ses prévisions de croissance du PIB pour la zone euro : +0,9% en 2010, puis +1,5% en 2011. Elle situe la France à +1,3% en 2010, et +1,5% en 2011. Pour 2010, seule la
Finlande ferait mieux (+1,4%), mais la Belgique et les Pays-Bas sont crédités de la même prévision. Pour 2011, le score français est moins bon : l'Allemagne (+1,6%), l'Irlande (+3%), et la
Finlande (+2,1%) s'en sortiraient significativement mieux.
Fillon restreint sa bravade à la zone euro. Il a raison. Les prévisions de la Commission sont meilleures pour les Etats-membres qui ne sont pas passés à l'euro : +1,75% de croissance en 2011.
Fillon omet également les autres fondamentaux économiques: le chômage français est prévu à plus de 10% cette année comme l'an prochain. A comparer avec les 7,8% prévus pour l'Allemagne, les 9,2%
pour l'Espagne, les 8,8% pour l'Italie, ou les 5% de l'Autriche et des Pays-Bas.
Des ministres qui s'interrogent sur leur salaire
La dernière polémique intra-gouvernementale du moment peut prêter à sourire.
Le camp présidentiel est à la recherche de preuves de l'équité fiscale de sa politique. Quand François Fillon a annoncé son faux plan de rigueur, Christine Lagarde s'était empressée de promettre
un effort particulier sur les niches fiscales. Elle veut trouver 5 milliards d'euros d'économie. Sur 140 milliards... quel effort ! La semaine dernière, elle a lancé une nouvelle idée : les
ministres aussi devraient baisser leur salaire. Le propos est évidemment démagogique. La réaction, négative, de certains de ses collègues le fut tout autant. François
Baroin : «la rémunération des ministres est moins élevée en France qu’à l’étranger. Elle est indexée sur les traitements de la Fonction publique, qui ne baissent pas chez nous, alors que
d’autres pays les réduisent. Je me méfie des décisions démagogiques.» Eric Woerth a osé déclarer: « en France, les ministres ont une rémunération d’agents publics. Si je devais baisser
mon salaire cela voudrait dire que les salaires des agents publics baissent aussi, ce dont il n’est pas question.» D'autres ont au contraire affiché leur solidarité : NKM,
Bruno Le Maire ou Rama Yade ne sentent pas gênés. Personne, évidemment, n'a osé suggéré que Nicolas Sarkozy pourrait renoncer à son augmentation de rémunération en janvier 2008 (rappelez vous les
172%...).
Jeudi prochain, Nicolas Sarkozy organise sa seconde conférence sur les déficits. On connaît la musique. 25 pays sur 27 Etats membres de l'Union européenne font l'objet d'une procédure d'avertissement de la part
de la Commission.
Ami sarkozyste, où es-tu ? Vraiment ?
Sarkofrance