Absolument, et un livre d’économie pop est trop rare pour être renié !
La pop est un language qui doit nous transmettre des vérités, ce à quoi s’attèle Steven D. Levitt, accompagné de Stephen J. Dubner, dans leur livre. Et pas n’importe quelles vérités ! Oubliez les taux d’intérêt, la croissance, l’inflation et tout cela, monsieur n’est pas expert financier. Et puis d’ailleurs il s’en méfie des financiers. Les sumos, les agents immobiliers, le KKK, ou encore Superman demeurent bien plus intéressants à ses yeux. Mais avant de dévoiler ses résultats, analysons quels sont les univers joints dans son ouvrage.
Tout d’abord, la méthodologie économétrique basée sur la statistique constitue son outil de fonctionnement. Bien que notre économiste se défende de toute connaissance poussée dans le domaine mathématique, ce dernier sait interpréter les chiffres, en dégager un sens, de la même façon qu’un astrologue avec les phénomènes célestes. En général cette science s’applique aux objets d’études traditionnels de l’économie (emploi, croissance, comportement des consommateurs…) afin de valider leurs liens de causalité établis par des modèles théoriques macros et micro économétriques (par exemple le lien entre la croissance et l’emploi). Bref sa méthodologie se révèle aussi technique et rude que son objet d’étude. Amateurs s’abstenir…
Mais comme nous l’avons signalé, les objets d’étude de cette méthodologie ne l’intéressent guère. Pour cette raison notre économiste va détourner le viseur de cette technique qu’il maîtrise parfaitement, pour le placer dans des directions bien plus improbables. Les agents immobiliers, les sumos, les piscines, les armes à feu, les prénoms deviennent alors ses cibles. Ou encore la comptabilité d’un gang de dealers. En détournant son champs d’étude notre bonhomme vient de créer la pop-économie. Mais revenons au gang. Notre pop économiste parvint un jour à se procurer les livre de comptes d’un gang de Chicago (où se situe la fameuse école de sociologie) où, après analyse détaillée, il parvint à la conclusion suivante : « le fonctionnement d’une organisation de trafic de crack est assez similaire à celui d’une entreprise capitalistique ordinaire (comme McDo par exemple) : il faut être proche du sommet pour bien gagner sa vie. Pour cette raison, les dealers se trouvant à la base sont forcés de vivre chez leur mère. » De même, Levitt nous montre la valeur d’une information en économie en prenant l’exemple du déclin du Ku Klux Klan grâce à un journaliste infiltré qui réussit à diffuser leur mot de passe au travers d’un épisode de `Superman. Lorsque le grand public en prit connaissance, l’organisation perdit son aura de société secrète en voyant son petit secret dévoilé. Une puissante organisation déboulonnée par la divulgation d’une information la concernant. Le tout appuyé de chiffres venant appuyer ses liens de causalité.
Grâce à cette nouvelle conception de l’économie, issue d’un habile détournement de son objet d’étude traditionnel, vous apprendrez que votre agent immobilier vous escroque, que la légalisation de l’avortement fit baisser les taux de délinquance aux Etats-Unis et que les sumos trichent. Mais vous découvrirez également les variables concomitantes, la théorie des jeux et l’importance de l’information dans son fonctionnement (cela ressemble au système boursier n’est-ce pas ?).
En interrogeant nos symboles, en les triturant avec ses outils statistiques, Levitt parvient à nous enseigner quelques principes de base de la théorie économique. Mais surtout, sa pop économie, fruit d’un habile piratage de la doctrine orthodoxe, dissipe quelques certitudes profondément ancrées dans la croyance populaire pour éclairer nos représentations de quelques vérités. S’en est fini, plus jamais je ne croirai un sumo.