Après l’embellie du début de semaine, les bourses, comme l’Euro, ont repris leurs descentes. Pourtant l’annonce conjointe du plan européen de 750 milliards d’€ et des plans d’austérité des principaux gouvernements européens avaient un (très court) moment, 2 jours, stoppé cette baisse.
Comme le dit J. Sapir (Marianne): “La crise de l’Euro qui s’est déclenchée dans les derniers jours d’Avril 2010 combine une dimension conjoncturelle (la crise de l’endettement de la Grèce, du Portugal, de l’Espagne et de l’Italie) et une crise bien plus structurelle. Cette dernière est caractérisée par la divergence des logiques entre les principaux pays de la zone Euro, ce que l’on a appelé le phénomène d’Eurodivergence. Elle se manifeste par un accroissement depuis 2000 des différences dans le domaine de l’emploi, de l’épargne et de l’investissement entre les pays de la zone Euro. Alimenté par les différences de dynamiques économiques et accentué par la politique allemande qui a cherché à profiter de sa position dans la zone Euro en transférant une partie des charges de ses entreprises vers les ménages, ce phénomène a induit des distorsions de productivité importantes”.
C’est dire tout l’enfumage nocif du Traité simplifié qui fait de l’Europe le point avancé de la dérèglementation financière…
Car les “marchés” (vous savez, ceux qui ont toujours raison, qui s’autorégulent spontanément…) ont compris que, sur les 750 milliards d’€ du plan européen, 440 étaient apportés par les pays européens, déjà lourdement endettés, c’est dire que ce plan n’était qu’un effet d’annonce, et était fait pour ne pas être appliqué.
Ce qui semble inquiéter les “marchés”, actuellement, c’est que l’effet conjugué de l’endettement, de la solidarité affichée de 440 milliards d’€ avec les maillons européens les plus faibles et des plans de rigueur, c’est à dire, dans les faits, une désinflation des pouvoirs d’achat de la grande masse des populations européennes mène à une recession, aggravant les finances des états européens et donc leur endettement. En fait, cela ne les inquiète pas vraiment: ils cherchent simplement à faire le plus d’argent au plus court terme.
Comme le dit MediaPart : “Tout acquise à la déréglementation financière, l’Union n’a rien fait qui aurait pu gêner la libre marche des capitaux, encadrer le pouvoir des institutions financières. De même qu’après la crise financière de 2008, elle avait raté un moment historique et refusé la moindre mesure d’encadrement des banques, la moindre contrepartie aux plans de sauvetage bancaires, partiellement à l’origine des déboires actuels, de même, elle a accepté un deuxième plan de sauvetage bancaire — car c’est bien de cela qu’il s’agit avec le plan d’aide à la Grèce — sans exiger un quelconque sacrifice de la part des banques engagées jusqu’au cou à Athènes et ailleurs. Au risque de laisser la Grèce s’écrouler sous le poids de sa charge financière ”.
Mais, plus fondamentalement, ce qui est en cause, c’est une crise de la demande dûe à l’amputation des pouvoirs d’achats qui a accompagné la mondialisation. Comme le rappelait il y a déjà dix ans E. Todd (“L’illusion économique”, Galimard, 1999) quant à cette crise de la demande: “il n’est pas concevable qu’un problème qui a hanté et occupé la majorité des économistes entre 1930 et 1965 ait, comme par enchantement, perdu tout intérêt intellectuel et pratique. Tant de silence est assourdissant. Le monde semble revenu avant 1930. De Ricardo à la grande crise économique, la loi des débouchés avait été l’orthodoxie du monde capitaliste. Si la question de la demande n’est plus posée, nous pouvons considérer que Say a retrouvé, implicitement sa position hégémonique”.
Ces transferts massifs du pouvoir d’achat du plus grand nombre vers le capital n’ont hélas pas servi à investir, mais à vertigineusement accroître les inégalités dans les pays développés et dégager les ressources d’une économie de rentiers et de spéculateurs. La construction européenne étant en pointe sur ces domaines.
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