Avec MotorStorm, Sony a tenu son pari, prouvé les capacités techniques de sa console. Le jeu est à la hauteur des ambitions du constructeur, il est même son illustration, son paradigme. Grande orgie de boue et de métal pixélisée, MotorStorm foudroie comme un tonnerre mécanique surgit depuis l’apocalypse. Avec ses accents de fin du monde, sa touche de Babylone du désert, son allure héritée de Mad Max, il nous entraîne sans ménagement au cœur d’une action sauvage et pleine de crasse dont l’excès et la meilleure promotion possible de son support. MotorStorm c’est l’affirmation sans concession d’un plaisir brut, presque primitif, dans lequel se synthétise la pulsion sommaire du jeu et le désir que la machine nous éblouissent. Ici que des courses, pas de carrières ni de customisations, tout doit être immédiat, sans entraves. La jouissance jusqu’à épuisement doit pouvoir trouver sa satisfaction instantanément. Oubliez compteur de vitesse et autres indications, MotorStorm est un jeu minimaliste, pur, total. Sa grandeur, celle d’être irascible, imprévisible, rend chaque course différente. Les impondérables peuvent être minimisés, rarement complètement calculés. Il y a là un plaisir masochiste, celui de se soumettre à un terrain hostile et saccadé, des adversaires agressifs, à voir la carlingue de son véhicule se désosser au fur à mesure pour finir la course squelettique. MotorStorm, jeu volontairement rock, électrique, parfaite illustration d’une machine à qui l’on demande sa dose d’excès, son shoot d’adrénaline en récompense d’un dollar qu’on glisse comme en arcade. Peu de jeux ont récemment su récompenser leur joueur en collant si près aux promesses d’une technologie dont on pouvait encore douter. MotorStorm concrétise notre imaginaire par sa puissance de calcul, il réalise ce moment du jeu vidéo où la technique doit être synchrone avec ce qu’on attend d’elle. Il prouve que cette quête n’est pas folle, en pure perte. En démontrant non pas ses possibles mais ce qu’il peut être vraiment -une véritable nouvelle expérience de jeu, où les détails comptent, où la physique est déterminante, où la dégradation du terrain fait diverger le gameplay jusqu’à devenir tactile-, MotorStorm prouve que si le jeu vidéo est intimement lié à son évolution technologique, ce n’est pas sans raison.
Jérôme Dittmar