L’assemblée nationale vient d’adopter, ce vendredi 14 mai, la loi sur la parité proposée par le chef de l'État Me Abdoulaye Wade. Cette loi qui est passée comme lettre à la poste ouvre une nouvelle ère dans l’histoire politique post-alternance du Sénégal.
Une fois adoptée par le parlement bicaméral sénégalais et promulgué par le Président de la République, cette loi s’imposera à tous. Ainsi, les partis politiques se verront obligés d’en tenir compte dans la confection de leurs listes de candidatures aux différentes joutes électorales. Il s’agira, en effet, de listes alternativement composées des deux sexes.
Que de chemins parcourus !
Si au Sénégal les femmes ont toujours accédé à des niveaux de responsabilité très élevés, il faut tout de même convenir que le phénomène s’est accru sous le régime de l’alternance. En nommant pour la première fois une dame, Mame Madior Boye, Premier ministre du Sénégal de 2001-2004, Me Wade a sans doute voulu prendre date avec l’histoire de son pays ? Assurément ! Car son combat pour l’égalité des sexes dépassant les frontières a été porté, au-delà des frontières nationales, à l’Union africaine. Une volonté de donner à cette question une dimension continentale.Réfléchissant au Pacte républicain, les femmes de la société civile et du monde de la politique avaient toujours estimé que l’heure était venue d’inscrire la parité dans les lois sénégalaises. Elles ont ainsi accompagné et soutenu ce projet avec détermination comme s’il portait leur renaissance.
Ce succès autour de la parité vient couronner maints efforts faits par l'État du Sénégal pour faire évoluer le statut des femmes.
Plusieurs conventions internationales furent ainsi ratifiées dont celle des Nations Unies contre toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes datant de 1979. C’est dans le même esprit qu’a été ratifié le protocole additionnel à la charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux femmes.
La plateforme d’actions africaines sur l’égalité entre l’homme et la femme de 1994 et celle de Beijing de 1995 ont également contribué à asseoir dans les politiques publiques la nécessité de prendre en compte la donne Genre. Aussi, se souvient-on du plan d’Action africaine pour l’accélération de la mise en œuvre des plateformes de Beijing et Dakar en 2005, et ce, pour la promotion des femmes.
Par ailleurs, conscientes de l’irréversibilité de la marche des femmes, les Nations Unies ont adopté en 2000 la résolution 1325 portant sur les femmes et leurs droits.
En 2002, à Durban, les chefs d'États africains avaient souligné le rôle-clé que les femmes doivent et peuvent jouer pour l’émergence d’une Afrique de démocratie, de bonne gouvernance et d’essor économique.
Tout dernièrement, le vote, à l’unanimité le 1er décembre 2006, d’une résolution en faveur de la parité a été décisif en ce qu’il avait immédiatement déterminé de chef de l'État à demander aux partis d’accorder plus de places aux femmes dans leurs listes de candidatures aux élections.
Pour l’heure, face au vote du Sénat aucune crainte ne pourrait être nourrie. Et pour cause ! Cette chambre est majoritairement acquise au parti au pouvoir.
A quoi devrait-on s’attendre ?
La question est d’intérêt. Qu’est ce que les femmes feront de cet instrument d’autonomisation et de responsabilisation accrues ? L’avenir nous le dira sans doute !En tout état de cause, un risque d’implosion semble se profiler à l’horizon, des partis politiques à forte tradition de leadership masculin. En vérité, cette loi qui apparaît comme une camisole de force pourrait faire courir à leur perte les partis qui n’y sont pas préparés.
Dès lors, se pose la nécessité d’un débat urgent au sein des formations politiques pour définir une vision et une forme d’organisation qui épousent les contours de la parité. Certes, il peut paraître prématuré d’en parler mais des implications multiples et complexes se feront jour. Hélas, au grand dam des partis dont les responsables n’avaient pas assez tôt perçu les vrais enjeux !