Dog Pound est le deuxième essai destiné au grand écran de la part de Kim Chapiron. Après avoir servi dans l’angoisse et l’horreur avec Sheïtan, il change cette fois-ci de registre avec ce film carcéral axé sur la vie d’ados dans une prison juvénile du Midwest américain. Avec ce titre qui veut dire « la fourrière » en anglais, le réalisateur de l’équipe Kourtrajmé pose ici l’œil de sa caméra sur des ados en difficulté qui sont loin de téter leurs mères ou qui ont mordu la main du maître assez tôt dans leur vie.
Dans un souci d’être au plus proche de la réalité, Kim Chapiron est parti pendant presque un an visiter des centres de détention juvéniles du Midwest pour rencontrer ses jeunes dont il dépeint les vies dans Dog Pound. Il ainsi pu recueillir un grand nombre de témoignages qui lui ont permis, ainsi qu’à ses co-scénaristes, de pouvoir plancher sur une histoire tangible. Plus que cela, il a aussi rencontré plusieurs jeunes dans ses centres à qui il a pu donner des cours de théâtre et certains sont donc aujourd’hui à l’affiche de ce film. Des acteurs amateurs sont aussi recensés parmi les petits rôles toujours dans cette volonté de donner un caractère brut au film un peu à l’image de la réalité qui a cours dans ces centres.
Pourtant Dog Pound, n’est pas seulement qu’une question de survie dans l’univers carcéral. Le film se penche aussi sur ces ados et la manière dont cet univers hiérarchisé et violent peut influer irrémédiablement sur leur comportement. A travers les différentes situations qu’ils traversent on voit qu’ils perdent le peu d’innocence et de naïveté qu’il leur reste. En même temps à travers certaines scènes d’amitié, on ressent aussi l’espoir pour eux de pouvoir se refaire une fois en dehors. Une sorte d’ambivalence régulière dans ce film qui sert à nous interroger sur la nécessité de l’existence de ce type de centre pour les jeunes.
Autre tendance lourde du film qui défait un peu tous les films carcéraux et reportages sur le sujet, c’est la volonté de montrer les gardiens d’Enola Vale plus comme des garants de la sécurité physique et mentale des jeunes, que comme des tortionnaires venus se défouler sur les détenus pour oublier leurs vies ratées à la ville. On voit malgré tout que lorsque leurs quotidiens les rattrapent les gardiens ont tout de suite un comportement plus brutal envers les jeunes du centre. Un parti pris par Kim Chapiron qui se serait rendu compte en visitant différents centres que l’image des matons bourreaux qui existe dans le cinéma est erronée.
C'est donc en dépassant les simples codes du film carcéral que Dog Pound prend son ampleur. En ciblant l'impact de l'environnement pénitentiaire sur les ados et en remettant en cause leur utilité Kim Chapiron entreprend une démarche intéressante qui lui a permis d’être consacré « meilleur nouveau réalisateur » du festival new-yorkains de Tribeca. Un autre gage de la qualité de ce film. Pour les fans du collectif Kourtrajmé sachez que c’est Nikkfurie de La Caution qui s’est chargé de la musique du film avec K’Naan (toujours plus intéressant que quand il fait de la pub pour Coca) mais aussi un groupe de country du Midwest. Le film sortira le 23 juin en salles.