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Deux thés nouveaux de Shizuoka, parfumés et champêtres

Par Florentw
Shizuoka, de plaine ou de montagne, Yame et Ureshino à Kyûshû, et même les premiers Sayama, le front du thé japonais nouveau a enfin fini par avancer activement dans tous le pays, avec retard et souffrances. Évidemment, cette saison 2010, marquée par des dégâts et surtout un retard historiques pour cause de froid et de givre sur les plantations de thé, n'a pas encore fini de faire souffrir les professionnels qui luttent sur les marchés au thé pour s'approvisionner pour l'année. Il y a moins de thé. et ce thé est plus cher. Par exemple, le Asatsuyu "permanent" chez Maruyama-en, c'est à dire celui qui est vendu toute l'année, chaque année. L'un de nos produits les plus populaires. Depuis toujours, il s'agit d'un blend d'un cultivar Asatusyu de Minami-kyûshû (Kagoshima) et d'un cultivar Asatsuyu de Kakegawa (Shizuoka). Nombreux sont nos clients qui ne boivent et ne veulent boire que ce produit depuis des années. Mais 2010 est loin d'être une année ordinaire. La production de Asatsuyu de qualité adéquat à Kakegawa cette année équivaut à 30% de celle de l'an dernier. Résultat, impossible de s'en procurer la quantité nécessaire pour tenir un an. Au final, cette année, notre Asatsuyu sera 100% Kagoshima, un single-tea. De quoi je me plains ? Moi ? je ne me plains de rien..... en revanche, je sens que les clients, eux, ne vont pas manquer de se plaindre. Que leur Asatsuyu soit meilleur ou moins bon, là n'est pas le souci pour la plupart.... le souci c'est qu'il ne soit pas pareil que depuis toujours ! Certain vont probablement se fâcher tout rouge, dire "ça fait 20 ans que j'achète ce thé ici, je veux le même !!!!!! je viendrai plus !!!!!". Bon, je touche du bois.
Après avoir beaucoup parlé de thés de Kagoshima, département méridional épargné par les caprices de la météo, comme promis, voilà un peu de Shizuoka. Voici deux sencha de Shizuoka, d'autant plus proche géographiquement qu'ils proviennent tous deux de la région de Iwata 磐田, partagé entre plaine et douces montagnes, au sud-ouest du département.On trouve dans ce district nombre d'appellations célèbres correspondantes à diverses villes, communes ou anciennes communes. Parmi elles, les thés de Kakegawa 掛川, Kikugawa 菊川, bien sûr Iwata, ou encore Tenryû 天竜 et Fukuroi 袋井.
Ce sont ces deux dernières régions qui nous concernent aujourd'hui avec deux shincha (thés nouveaux).
Tenryû, avec Kawane et Honyama, et l'une des plus célèbres région productrice montagneuse de thé de Shizuoka, et donc du Japon. Ce sencha, comme c'est le cas de la plupart des thés de montagne, est un futsumushi-sencha, un thé vert étuvé pendant une période courte, 30-40 secondes. Il a poussé à une altitude de 600 mètres. Deux thés nouveaux de Shizuoka, parfumés et champêtresUne particularité des sencha de montagne, des feuilles épaisses. Ainsi, on a un thé malaxé avec force. Les feuilles sont roulées bien rectilignes, plutôt uniformes dans leur taille, mais pas trop dans leur couleur. Néanmoins, l'ensemble reste très joli, certaines feuilles montrant un lustre particulièrement alléchant. En vrai futsumushi-sencha, pas la moindre trace de poudre. Mais surtout, en tant que particularité remarquable des thés de montagnes, un parfum bien plus prononcé que chez les thés de plaines, surtout lorsqu'il s'agit de fukamushi-sencha (étuvage long). Ce Tenryû ne manque pas à cette réputation. A l'ouverture du sachet, le parfum subtil et complexe est remarquable. A un bouquet floral et fruité vient se superposé très légèrement une petite fragrance tourbé, marque d'un hi-ire (phase finale de séchage) sinon fort, tout du moins pas léger. Un hi-ire pas trop faible montre la volonté de faire ressortir la puissance et la personnalité de la saveur et du parfum d'un thé, au détriment du côté "vert" qui colle à l'image du thé nouveau, shincha (voir précèdent billet).
Après une infusion, 65-70°C, pendant 1min20s, la liqueur dégage un riche parfum qui comble mes espérance. Comme écris plus haut, c'est un brin floral, un brin fruité. Mais surtout, la petite touche tourbé (qui n'est pas un défaut en soit, juste que personnellement je ne suis pas fan) des feuilles sèches de transparaît pas dans le thé infusé. Par ailleurs, cette liqueur est d'un beau jaune doré aux reflets vert, d'une parfaite limpidité. Deux thés nouveaux de Shizuoka, parfumés et champêtresEn bon thé de montagne, la saveur de ce Tenryû est fondamentalement astringente. Il s'agit là d'une astringence ronde et velouté qui laisse place de suite à une douceur que l'on ne peut que raccroché à l'aspect fruité du parfum. En fin de compte, reste en bouche pour longtemps une fraicheur que seule peut apporté un sencha de montagne. C'est un grand sencha, qui ne se présente pas comme un thé primeur tout bête avec la touche végétal que le consommateur moyen attend d'un shincha. Non, le choix est fait de le travailler comme un grand sencha, qui pourra être vendu tout au long de l'année (même si c'est un thé en quantité très limité, disponible uniquement au moment du thé nouveau), avec  suffisemment de hi-ire pour en faire resortit tout le punch.
Quelques dizaines de kilomètres au sud-est de Tenryû, en plaine vallonnée, plus proche de l'océan, se trouve Fukuroi. Voici un autre shincha, lui aussi sur réservation, en quantité encore plus limitée que le Tenryû. Nous avons là à faire avec un thé étuvé légèrement, mais tout de même trop pour pouvoir être appelé futsumushi-sencha, disons qu'il s'agit d'un petit chûmushi-sencha (temps d'étuvage moyen). Malgré la pésence de petites feuilles et d'un peu de poudre, on a quand même un ensemble de feuilles bien longue, très finement roulées. En plaine, avec des feuilles moins épaisses que sur mon Tenryû plus haut, on obtient plus facilement de très fines "aiguilles". Un vert profond magnifique, brillant, d'une grande uniformité. Deux thés nouveaux de Shizuoka, parfumés et champêtresCe thé de Fukuroi montre également un parfum bien distinct. Seulement, ici, ce qui s'en dégage ne premier lieu, c'est le "vert", la fraicheur "végétale" habituellement attendue d'un thé japonais sencha nouveau. On a cette fois ci un hi-ire très faible. Si le Tenryû nous transportait tantôt dans un verger tantôt dans une serre pleine de fleurs tropicales, ce sencha nous amène dans une verte prairie parsemée de petites fleurs des champs.  Après une cueillette délicate (qui nous donne le bel aspect des feuilles), le producteur de ce thé lui fait subir un très léger flétrissement, ce qui confère une petite touche florale. (on reste bien loin du flétrissement pratiqué par M. Hiruma, qui tend à se rapprocher de certain wulong)70°C, 50s, suffisent à faire ressortir la saveur de ce shinchaDeux thés nouveaux de Shizuoka, parfumés et champêtresLa liqueur est verte, classique, c'est du Yabukita (cultivar). Par contre, vu l'étuvage relativement court, on pourrait attendre un peu plus de limpidité. Il est cependant possible que le flétrissement, aussi léger soit-il, n'est pas une inlfuence aussi bénéfique sur la couleur que sur le parfum...La saveur de ce thé est ici aussi avant astringente, même étonnement bien plus astringente que celle du Tenryû. C'est une saveur très verte, fraiche, une astringence des plus agréables, mais attention au temps d'infusion ! Faute de hi-ire important, on ne retrouve pas ici la rondeur qui apparaît derrière l'astringence du Tenryû. Ici, on reste tout au long de la dégustation dans le domaine de la fraicheur. On fini néanmoins avec en bouche un doux arrière goût, qui apparaît à retardement, subtilement, mais très rafraichissant. 
Deux thés géographiquement très proche, deux sencha à l'étuvage court, futsumushi (ou presque). Tout deux fortement parfumé, astringent au premier abord. Néanmoins, dans le détails, ils sont radicalement différents. Bien plus que la différence thé de plaine / thé de montagne, il me semble que c'est bien la différence entre un hi-ire marqué et un hi-ire quasi inexistant qui fait toute la différence entre ces deux crus 2010.

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