J’aurais bien voulu poser ma plume après le texte précédent, mais le hasard a voulu que je la reprenne pour écrire sur un de ces petits évènements heureux de la vie.
Un jour de bonheur, les larmes coulent. Des larmes de mamans dont les enfants se marient. Larmes d’émotion certainement, comme souvent quant votre enfant prend son envol.
Larmes d’appréhension, aussi, car chaque mère se demande où va son « enfant. »
Mais le bonheur des enfants sèche vite les larmes des mères.
Comme il chasse aussi les idées préconçues de deux communautés dont les coutumes veulent que les cousins soient faits pour les cousines, et vice versa.
Certaines tantes et des oncles des deux côtés auraient voulu que persistent cette coutume comme ce fut le cas de la plupart d’entre eux.
Des traditions que semblent porter seules les familles originaires, l’une du Mali, l’autre du. Maroc. Mais pour les deux jeunes mariés dont la culture est celle d’ici, pays où ils sont nés et ont grandi, ces coutumes étaient devenues moribondes.
Ce que confirma la musique du rap et du raï qui rythma les pas tout le temps. Sauf quand une peule du Macina entonna une chanson de son terroir dédiée aux mariés. Ce qui dégourdit les jambes de certaines Maliennes qui, à leur tour, chantèrent un chant bambara.
La musique eut moins de mal à imposer un langage que les parents du marié. Ceux-ci d’origine malienne, avaient grandi en Siéra Léone, et vivaient depuis de longues années en France. Pour se faire comprendre de leurs hôtes et de leurs invités, ils naviguaient avec aisance entre l’anglais, le bambara et le français.
(Cette image capturée par un photographe camerounais, et qui a dû le changer des postures officielles qu’il a l’habitude d’immortaliser par Jean Jacque Etotué)
J’étais dans un conte vrai d’une nuit des mille et une identités. Dans un rêve aux couleurs de henné.
La magie du bonheur nous transporta sur ses ailes, jusqu’à l’autre extrémité de la Méditerranée, à Istanbul, dans les jardins merveilleux du palais de Topkapi. --- Il faut noter qu’à l’intérieur de ce Palais, se trouvent deux vitrines où sont exposés des cheveux et un habit attribués au prophète Mohamed… Le coran y est récité vingt quatre heures sur vingt quatre.---
Le mari, voilé, était aux côtés de son épouse. Image singulière pour moi qui suis issue d’une culture où la coutume veut que le regard de la jeune mariée ne croise celui de son époux qu’après une longue période d’acclimatation.
Mon regard a quitté celui que l’on avait désigné toute la journée comme « le grand beau jeune homme », pour se porter sur la jeune mariée. Elle n’était plus la jeune fille décontractée de la veille - mini tailleur chic et bouquet de fleurs à la main- sur le chemin de la mairie où sa propre sœur, conseillère municipale avait célébré le mariage.
Elle n’était pas non plus la sage fille de cet après-midi dans sa djellaba traditionnelle.
Durant cette séance de henné, elle était devenue une princesse des Mille et une nuits.
Une splendeur dans le nid de blancheur d’une magnifique robe de dentelle et de velours fin, voilée de fumée d’encens et parfumée de senteurs orientales.
Ce mot est dédié aux mariés : D et I. et à leurs parents qui ont déployé des moyens et une énergie considérables pour réussir le mariage de leurs deux enfants.
Il est dédié aussi à Halima et son époux arrivés de Bamako. Cette femme d’affaire qui ne se départit jamais de son rire, garde en elle une admirable simplicité. De cette simplicité qui lui est propre et qui triomphe de tout l’or de Bouré* dont elle est couverte.
Si la sœur de la mariée, conseillère municipale dansa sans relâche et pour sa sœur et pour sa mère toujours très occupée, Halima, quand à elle rajouta à ses pas de danse, les pas de sa sœur aînée, Kadi, mère du marié. Kadi, qui elle, resta parée au-delà de tout par sa discrétion et sa gentillesse reconnues..
A monsieur Diakité, le père du marié, l’homme aux réparties épicées, qui a failli me faire rater la séance magique du henné par sa façon relevée de raconter l’Histoire.
A Aïssata, la tante venue de Londres et à tous les autres.
Safi
*Bouré (mine d’or de Bouré au Mali).