Lui
Laissant filer des doigts une vie trop parfaite,
J'ai maquillé mes sens abreuvés de raison,
Cherché à être aimé, perçant d'oeuvres imparfaites
Un coeur aux cils d'hiver qui soupire en prison.
Une griffure admise en mon âme légère,
Enfouie sous le tumulte de vifs compromis,
Comme du vin nouveau a couru étrangère,
Blessant mon coeur profond, fleuve encore insoumis ;
S'accumule en la chair au fil du temps passé
Sous la douce écorchure un miel trop vinaigré,
Qui se nourrit d'errances aux allures insensées
Bousculant mes idées, poussant à émigrer.
Que faire pour supporter et supporter encore
Cette vie que j'abhorre alors qu'une autre bêle ?
Comment dire à ceux là que j'ai aimé d'abord
Qu'ils sortent du chemin, consentants ou rebelles ?
Je reconnais mes torts, ils doivent s'y plier.
La simple estafilade en béances s'étire,
Le manque s'agrandit, je dois me déplier
Et trouver d'autres cieux pour ainsi repartir.
J'abandonne les miens plutôt que de choisir
Une solution aigre et ses demi-victoires
Refusant de chercher, de me battre et saisir
Le désir est vainqueur, ils vont sans trajectoires.
Elle
L'abîme se renverse et ouvre ses bas-fonds
Où s'engouffrent dans l'ombre les pleurs océans
Je chancelle immobile accrochée par le fond
Evidée de bonheur, je viderai mon sang.
La chair de mes petits nés d'un amour unique
Endormie, innocente entre deux défaillances,
Se lèvera fauchée, pataude et laconique
Aux portes de mon mal, hurlant l'amère offense.
Devenant une tour au mille marches grasses
J'entends porter les maux de ceux qui sont restés
Epongeant les sanglots venant mouiller ses traces
Mes larmes s'évaporent, mon coeur est infesté.
Du haut du minaret se brassent à pas comptés
Les cris de mes enfants conspuant son absence ;
La tristesse émondée, le courroux vient hanter
Mes infimes pensées tachetées de violence.
Les douleurs répétées de ma progéniture
Endurcissent mon coeur des hommes qui approchent
Les larmes ont disparu devant la forfaiture,
Et coulent dans les mains tendues de l'amie proche.
Ma peine s'épaissit, l'esprit devient robuste
S'il devait revenir, il faudrait pardonner
Un chemin impossible, long et trop injuste
Entière à ma blessure je suis bien enchaînée.
Cependant pardonner est vraiment nécessaire
Pour tenter de refaire avec ou sans l'odieux
Une nouvelle vie détachée des faussaires
Redécouvrir la paix et l'amour du bon Dieu.
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