Posté par lediazec le 15 mai 2010
J'en ai marre des banquiers, des traders, des politiciens corrompus, des tricheurs, des mal-comprenants, des aveugles, des sourds, des cons et des connes, des malins, des souffreteux, des cinéphiles cannois, j'en passe et des meilleures.
Marre de fulminer mon bonheur dans l'indifférence générale. Qui ça intéresse un bonheur plein, un bonheur total, un bonheur cosmique ? Personne. Ou alors si peu…
Je m'en fous, je le proclame, le vocifère, le murmure ou le crache : marre d'être heureux !
Passez votre chemin, cohorte de pisse-vinaigre et autres béni-oui-oui. Laissez-moi respirer mon bonheur à trois sous en paix. Je n'ose plus écrire « bonheur à un euro » puisque cela ne vaut plus un clou !
Je lis les journaux, les magazines… Le programme de la télé. Le temps étant ce qu'il est, je m'en contente. Un homme heureux n'a pas d'état d'âme. Il regarde passer le temps. Se mouche sans ennui quand le rhume le prend et s'évade à tout instant, car il n'est plus maître de son esprit. Fou, dites-vous ? Mais pas du tout ! « Si d'autres n'avaient pas été fous, nous devrions l'être », écrivait William Blake.
Je repose le paquet de revues et file dans mon jardin contempler la beauté de mes pavots qui éclosent avec la magnificence d'un désir puissant et incontournable.
L'année dernière, j'ai perdu un méconopsis bleu. J'ai eu mal à l'âme pendant un temps. Il ne reste de sa disparition que le bonheur de son éphémère présence. Il me faut le remplacer. Qui n'a pas vu ce pavot, originaire de l'Himalaya, d'un bleu pur, a manqué un rendez-vous important avec la beauté. Mais la plante est capricieuse, fuyante, à la santé chancelante sous nos latitudes. Elle a un comportement de bisannuelle. Elle ne fleurit que rarement la première année. J'ai passé un temps infini à suivre sa progression. Elle demande beaucoup d'attention et a besoin qu'on s'occupe d'elle, qu'on la bichonne. La deuxième année, madame fleurit, puis disparaît… Pour la pérenniser, il faut bien l'entourer, lui couper les fleurs fanées, la montée à graine l'épuise et peut provoquer sa mort. Une sensible à caractère mélancolique. Ce n'est qu'à ce prix que vous pouvez espérer avoir dans votre jardin une plante majestueuse que le visiteur célèbre avec des interjections parfois très surprenantes.
Je balade la folle nonchalance de ce long week-end ascensionnel sur la toile. Je passe d'un déficit au suivant avec la conviction que le surréalisme s'est insinué dans la vie politique sans crier gare.
Tiens donc ! Voilà de quoi faire bondir protectionnistes et conservateurs : le Conseil d'État juge dans un avis consultatif qu'une interdiction totale du voile intégral dans l'espace public ne reposerait sur “aucun fondement juridique incontestable”. Mais le gouvernement qui consulte sans consulter devrait passer outre et présenter son projet de loi tel quel mercredi prochain. Ouf ! Nous échappons de justesse à l'ire insurrectionnelle du chef de l'état.
Dans son souci de condamner « les pratiques radicales attentatoires à la dignité et à l'égalité entre les hommes et les femmes », comme le voile intégral, j'ose espérer que, dans un même élan égalitaire le gouvernement impose aux entreprises du pays le devoir de payer aux femmes le même salaire qu'à l'homme pour un travail équivalent. Mais ce serait folie que de penser que le gouvernement se soucie de ce genre d'injustice.
L'apéro géant de Nantes organisé par des internautes via Facebook s'est soldé par la mort accidentelle d'un homme de 21 ans après une chute. Cela provoque des remous dans les préfectures et dans les rédactions. Le ban et l'arrière-ban de la bienpensance est ému et crie son inquiétude, voire son indignation. Dans le Soir 3 de jeudi 13 mai, présenté par Carole Gaessler, la larmoyance ouvrait les vannes à un tsunami de lamentations. Pour l'occasion, elle avait invité un toubib qu'on a sans doute trouvé à l'intérieur d'une pochette surprise. Ce morticole n'est pas allé avec le dos de la cuillère. Amateur de lectures orthodoxes, formé à l'école de la férule et de l'horrifique, il n'a pas arrêté de dénoncer le fléau d'une jeunesse dépravée, baignant dans l'alcool, comme d'autres baignent dans l'océan, fustigeant le manque d'organisation, l'absence de responsables et l'accoutumance inéluctable à ce que la France a de plus pernicieux, la bibine. La faute à l'internet et aux internautes, tout ça étant bien sûr sous-entendu. A l'écouter, la jeunesse de France est perdue ! Plus inquiétant : à aucun moment, cette éminence n'a évoqué pour l'expliquer le malaise de la société, la crise politique et culturelle, ni, plus prosaïquement, l'esprit festif de la manifestation. Non, sa préoccupation se lisait ailleurs. A aucun moment n'a été soulignée sur le plateau l'ambiance bon enfant qui y régnait. Ni le fait que toutes les générations de jeunes depuis l'aube des temps ont cherché à s'épanouir et à faire la fête, en toute simplicité. A aucun moment non plus, en journaliste compétente et ancienne jeune, Carole Gaessler n'a posé ou effleuré la moindre question pouvant expliquer de manière professionnelle le phénomène de ces manifestations.
Akoibon ? Une journaliste de propagande ne se soucie pas de déontologie, elle dit ce qu'on lui dicte.