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L'art et la culture

Publié le 04 décembre 2007 par Scheiro
L'art et la culture deviennent de plus en plus des produits comme les autres, et les stratégies de marketing commencent à égaler celles du commerce. Le monde de l'art, par exemple, se manifeste aujourd'hui comme festival permanent avec, à tous les moments, des biennales partout sur le globe. En même temps, le rôle de l'artiste change rapidement en celui d'un amuseur.
Pourtant, il y a conscience générale de la qualité de l'art et de la culture, en tant qu'expression d'expériences, de sentiments et de manières de pensée individuelles et collectives, ainsi que de leur capacité à former une mémoire commune. Cela se voit en particulier quand une nation, une ville ou une communauté s'en servent pour se construire une identité.
A une telle construction d'identité culturelle au niveau local ou national, l'industrie du tourisme est fortement favorable. Elle la pousse même jusqu'à un cliché aisément reconnu par les masses : le cliché d'un monde paradisiaque. Par conséquent, la mémoire collective est aplatie, l'expérience personnelle nivelée, et les développements culturels et artistiques privés de leurs acuités et ambiguïtés.
Anna Tilroe
Couramment, l'intellectuel de l'intellecture est incapable par définition d'être "athée" par rapport à ce substitut de religion que les missionnaires de la danse, du théâtre et de l'animation en général appellent culture et qu'ils considèrent comme un sacré incritiquable. Mais la faiblesse de la culture est de ne plus avoir aucun rapport avec le Mal, donc d'être étrangère aussi à l'art, qui a toujours entretenu une connivence plus ou moins obscure avec celui-ci : on se souvient encore des douloureux examens de conscience de quelques autres intermittents d'un autre spectacle, au lendemain du 21 avril 2002, lorsqu'ils ne comprenaient littéralement pas pourquoi les populations, dont ils étaient venus évangéliser les friches, avaient si mal voté. Tout ce qui n'a plus aucun rapport avec le Mal se ressemble dans l'insignifiance : au lieu d'incarner l'hétérodoxie, l'insolence, le négatif, l'intellectuel de l'intellecture incarne le Bien, au même titre que les bedeaux de la culture, au même titre que les intermittents de l' intermitture, les permanents de l'altruisme et tous les autres combattants de l'Armée de libération du dadaïsme d'Etat. Comment pourrait-il encore intéresser qui que ce soit puisqu'il n'a même pas le courage d'être l'Adversaire, la Perdition, le Diable, au milieu de l'immense, du lamentable et invivable camp de boy-scouts « citoyens » qu'est devenue la société ?
Philippe Muray
C'est une ritournelle, mais la baisse du lectorat et notablement la catégorie des grands lecteurs est une réalité. Des secteurs autrefois dominants comme les sciences humaines ou les beaux-arts sont dans une crise grave. Le premier subit les conséquences d'un enseignement universitaire en difficulté permanente depuis vingt ans, le second endure des effets qu'on dirait paradoxaux : flux de grandes expositions prêtes à consommer, séjours touristiques de plus en plus sophistiqués, sans besoin d'approfondir des connaissances artistiques acquises sur le terrain des visites guidées.
Le temps des humanités est donc loin. Mais nos librairies ont su s'engager sur d'autres terrains, sur la littérature en particulier, dans la production pour la jeunesse... et, parce qu'elles ont une conscience haute de leurs missions, elles refusent de baisser les bras devant la mévente de l'histoire, de la sociologie ou de la philosophie.
Christian Thorel, Jean-Marie Sevestre et Matthieu de Montchalin
Il faut l’admettre : aujourd’hui la pensée française est en période de basses eaux. Certes, la France réussit encore à bien exporter ses idées, comme elle le fait pour ses vins, sa haute couture et sa cuisine. La «french theory» (Foucault, Bourdieu, Jacques Derrida, Roland Baudrillard, Jean-François Lyotard, Gilles Deleuze, Bruno Latour…) a fait fureur dans certaines universités américaines durant les années 1990. Ces auteurs ont été traduits au Japon, en Corée, dans les pays de l’Est, en Amérique latine. Mais force est de constater que la machine à produire des penseurs est aujourd’hui en panne. Les raisons sont multiples et ne concernent pas que la France.[...]
Le centre de gravité de la pensée a aussi changé. Il y a une certaine américanisation de la pensée, comme en témoigne la découverte par la France des philosophes (John Rawls, Michael Walzer, Daniel Dennet, Richard Rorty) et des nouvelles psychologies (cognitive, évolutionniste) qui nous viennent d’Amérique. Même les intellectuels attitrés de la pensée critique et de l’altermondialisation sont aujourd’hui américains, qu’ils se nomment Suzan Strange, Joseph Stiglitz ou Noam Chomsky.
Jean-François Dortier

Celui qui se tue pour échapper à sa gloire


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