Tout à l'heure, à ma demande, Marie-Lou tentait de réveiller Guillaume. Et comme il n'avait plus sa tétine à la bouche (il ne la prend quasiment plus), elle a tenté de lui remettre, avec beaucoup de délicatesse.
Elle fait souvent ça : essayer de lui donner le biberon, lui un biscuit, lui apporter un jouet (elle lui pose délicatement sur les genoux), et aussi le tirer par le pantalon pour qu'il vienne jouer.
Quand je raconte cela, on me répond :"oui, elle fait comme si c'est son bébé". Je souris poliment mais ne répond rien.
Je ne suis pas d'accord. Marie-Lou ne fait pas avec Guillaume comme avec une poupée. Elle prend simplement soin de lui. Je pense qu'elle a bien compris qu'il n'était pas comme les autres, mais c'est sa normalité à elle, vu qu'elle n'a connu que ça. Elle partage des moments "normaux" avec son frère.
Ca m'agace autant que quand j'étais enceinte et qu'on me disait qu'elle allait stimuler Guillaume. Même si c'est vrai qu'elle lui apporte des choses nouvelles, ce n'est pas un bébé médicament. Elle n'est pas arrivée parmi nous pour ça. Ni pour compenser un manque créé par le handicap de Guillaume.
Je pense souvent à plus tard. Quand elle sera ado ou jeune adulte. Bien sûr j'espère que ses rapports avec son frère seront bons et qu'elle s'occupera de lui. Mais je n'attends pas d'elle qu'elle nous remplace ou qu'elle prenne notre suite quand nous ne serons plus là. Je veux qu'elle ait sa vie, et Guillaume aussi. Et qu'elle ne se sente ni coupable ni redevable de quelque chose.
Je ne sais plus où j'ai lu les paroles de cette maman, mais ca se résumait ainsi : c'est nous qui avons un enfant handicapé, pas elle.