Posté par Rémi Begouen le 12 mai 2010
Lucio doit avoir au minimum dans les 85 ans, je pense. Et encore toute sa tête. Rescapé de la Guerre d’Espagne, il devint à Paris le meilleur de tous les faussaires qui aidèrent la Résistance : faux papiers, tickets de rationnement, laissez-passer,…voir fausse monnaie. Pour des Juifs ou des Résistants. Je crois qu’il a même continué son ‘art’, après la Libération, pour des révolutionnaires tiers-mondistes et des anarchistes espagnols. Cela en bricoleur de génie, en labo-photo et imprimerie artisanales clandestines… Il est aujourd’hui toujours actif, non plus en tant que faussaire (il a négligé d’y faire fortune !) mais en tant que ‘père’ (surtout pas ‘maître’!) du surnommé Federico. Celui-ci doit avoir, je présume, autour de 60 ans. Autre variante de l’anarchisme, lui s’est spécialisé dans le rôle de ‘Robin des Bois’, braqueur de riches pour distribuer aux pauvres. Une façon radicale de lutter pour la justice sociale, dans son pays sous tutelle franquiste. Il est aujourd’hui libre, à Paris également. Merci ‘là-bas si j’y suis’ de nous emmener, avec ces hommes intrépides, dans un ‘là-bas’ de justice à venir !
REDISTRIBUER. Rêvons un peu, imaginons beaucoup, à la lumière des si cruelles expériences du XX°Siècle et des 10 années de ce siècle, aussi sinistre, pour le moment. Cela ne peut plus durer. ‘L’insurrection qui vient’ n’est pas seulement un pamphlet anonyme, mais une réalité. Il faudra bien que la Révolution Sociale revienne… plus solidement que celles qui ont eu lieu. Les Révolutions politiques, avec prise du pouvoir étatique, se sont toutes terminées en fiasco. En Contre-Révolution ou pourrissement par corruption. L’exemple le plus chaleureux qui reste est celui de Cuba, avec ses mesures radicales de redistribution des terres et des revenus, et ses vastes programmes sociaux, pour le logement, la santé, l’école, le transport, la culture… Ceci dans le contexte d’un encerclement par les États-Unis (embargo après les échecs d’intervention militaire), qui a forcé Cuba, non seulement à se surarmer, par rapport à ses capacités, mais surtout à ‘s’aligner’ sur l’URSS de l’époque. Fatal engrenage…
Bien d’autres expériences révolutionnaires existent. Celles qui survivent peut-être le mieux ne visent pas à ‘conquérir le pouvoir’. C’est le cas au Chiapas mexicain, où la justice sociale n’est pas un mot… dans une région reculée, devenue autonome… Est-ce ‘l’exemple à suivre’ ? Sans doute, mais avec beaucoup de souplesse, selon les circonstances locales. Prenons le cas de ‘la Commune de Tarnac’, minuscule îlot de justice sociale libertaire, perdu au fin fond de la France-profonde. Le pouvoir central y a vu une menace terroriste, rien que ça ! Qu’il se soit ridiculisé (pas assez !) dans cette ignoble affaire, comme dans d’autres (répressions de grèves dures comme à Continental, ou des campagnes anti-OGM, etc.) est une chose secondaire : l’essentiel reste la force démentielle de cet État et de tous les autres, notamment ceux de l’Europe, vieux bastion historique du Capitalisme, devenant frileux face à ses concurrents… qui furent ses proies à piller, des siècles : source essentielle du Capital.
‘Les pauvres y a assez chez nous’ me disait un brave douanier suisse, qui exigeait que j’aie au minimum 10 Francs Suisses pour passer la frontière à Annemasse (J’en avais 7 ou 8 !). Bref j’étais du Tiers-monde… comme le sont les migrants de Calais ou les Roms d’Europe centrale… Et si l’avenir révolutionnaire passait par eux, désormais, via les actuelles luttes des sans-papiers, par exemple ? Hà, mais, ma bonne dame, vous avez raison : ces gens là n’ont pas notre culture, ne s’habillent pas comme nous, et ils mangent notre pain et prennent nos emplois ! Fin de l’aparté, revenons à nos moutons. Nous ne sommes pas un troupeau bêlant pour un Panurge dictateur. Fini, les Mussolini, Hitler, Franco, Pinochet, Videla et autres colonels grecs… Enfin, il y en a toujours (Birmanie, Corée du Nord, Philippine, Iran…) mais la contagion est moindre, sinon les corrompus au pouvoir. Et les corrupteurs banquiers et spéculateurs : dictature du fric. Contre lui, Lucio fut faussaire génial et Federico génial Robin des Bois. Il y a aussi d’autres aventurier(e)s qui tentent de… se passer du fric, tout simplement,avec ou sans utopie : réseau Sel et autres systèmes de troc, basés sur nos complémentarités et nos solidarités. Et plus largement, réseaux d’échanges gratuits, ne serait-ce que d’idées et d’informations, comme ‘La Toile’ que j’utilise ce jour. Pour rappel, il existe depuis longtemps des mouvements coopératifs et mutualistes. On sait que, malgré leurs mérites, ces systèmes sont fragiles car utilisant le fric : en cas de succès, ils sont ‘phagocytés’ par le capitalisme, tel Le Crédit Agricole, ex-Mutuelle devenue l’une des pires banques classiques !
REDISTRIBUTION, donc. Pas seulement du pouvoir d’achat, si scandaleusement mal réparti entre 90% de pauvres (des ‘sans rien’ aux ‘classes moyennes’) et 10% de riches (dont 0,1% de gros milliardaires fous). Mais redistribution du pouvoir… local. ‘Simplicité volontaire’ dit en substance Paul Ariès, non seulement personnelle, ‘chacun chez soi’, mais ‘chez le voisin’, si affinité… à chercher ; et par réseaux patients de multiples initiatives créatrices, belles et solidaires, rien que cela. L’hédonisme en vue, contre la brutalité des rapports sociaux, rien que cela. Je rêve ? Oui, mais…avec toi ! Et je vois à l’horizon quelques buts à atteindre :
-‘Allocation de vie’ à chacun, de sa naissance à sa mort. La même pour tous, avec ajustements selon les besoins par âge. Et bien entendu gratuité des soins, du logement, de l’eau, du gaz, de l’électricité, des transports en public, de l’éducation, de la culture…
-‘Rétribution du travail’ – dans le sens large, celui de toute activité sociale utile - égale à ‘l’allocation de vie’ : Soit un ‘éventail des revenus’ de 1 à 2(au lieu de 1 à 100.000).
-Effervescence de la vie sociale, ‘révolution culturelle’ par le bas, où apprendre à se passer du fric… et accessoirement du Loto, de l’armée, du nationalisme, de la religion, etc.
Bon, j’arrête là : Je sais bien que le gros problème de l’organisme (aujourd’hui l’État) chargé d’organiser cette société post-capitaliste n’est pas résolu ! Et ne le sera jamais, si nous n’essayons pas, chacun ici et là, de commencer à pratiquer l’utopie… en laboratoire d’amitiés ! Salut, Lucio, Federico et autres anars ou ACHARNISTES !