Le terrain extérieur est l’ami des présidents en délicatesse avec leurs affaires intérieures. Nicolas Sarkozy n’a pas failli à la règle. Le Chef de l’Etat et l’UE ça ressemble un peu à la relation entre la pile à bœuf et les bovidés eux-mêmes. Le côté sanglier du président français a au moins le mérite de tirer ses homologues de leurs discussions byzantines.
L’ancien ministre de l’Intérieur se plaît dans l’urgence et c’est là qu’il y excelle. De là à en faire le médecin de famille il y a un pas qui n’est pas encore franchi. L’occasion était tout de même trop belle pour tenter un OPA sur une Europe en panne de leadership et de leader. L’UE pour Sarkozy c’est l’estrade qui lui permet de se mettre à la hauteur de Barack Obama et de lui parler d’égal à égal en se positionnant comme le seul interlocuteur européen en capacité de faire bouger le grand corps malade de l’UE.
Vite dépêché, un sondage Viavoice-Libération a témoigné que l’opinion publique était réceptive à l’action du président dans la crise de l’euro (38% d’opinions positives, contre 35% en avril). Attention, comme l’écrit Libération, “ce n’est pas un retour en grâce, mais c’est la fin de la dégringolade“.
Ce n’est pas parce qu’on raconte de belles histoires, qu’on va forcément les croire. Appelé à la rescousse, Le Figaro tente après le storytelling de début de mandat l’expérience su storywriting. Des articles à faire pleurer les personnes âgées dans les chaumières. Un paragraphe à lui seul donne le ton : “Ces jours-ci, entre deux rounds de négociations, le président lit “Les Liaisons dangereuses”, le roman de Choderlos de Laclos, où le lecteur apprend comment les mots peuvent ou séduire… ou tuer. Le reste du temps il se plonge dans le cyclone des Bourses et l’urgence des plans d’économies, en s’efforçant de ne pas apparaître comme celui qui fait tout. Même s’il le pense. Discrétion, profil bas, retenue : ces trois objectifs ont été les maîtres mots de la communication du chef de l’État ces derniers jours, même quand il voulait crier à pleins poumons qu’il était lui, et lui seul, encore une fois, le sauveur de l’Europe. «En Grèce, on m’appelle “le sauveur”, cela me change de ce qu’on dit en France», glissait-il récemment à son entourage”.
“Fais pas le malin ” a-t-on envie de lancer à l’intéressé. Une hirondelle ne fait pas le printemps. Le terrain intérieur est tellement miné que la marge de manœuvre est très réduite. D’autant que l’austérité qui se profile sera facturée au prix fort à un Chef de l’Etat qui n’a eu de cesse de bricoler l’installation électrique de l’Elysée pour en enlever, un par un, tous les fusibles.
Légitimement inquiets , les syndicats et au-delà les français subodorent que la rigueur décrétée sur tout le continent offre un alibi opportun à l’Elysée pour faire avaler la pilule des retraites et d’une austérité généralisée.
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