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J'étais dans le stationnement du Caribbean au moment où bagay la s'est manifesté. 12 janvier, 16h53. Quatre ou cinq fois par semaine, j'allais dans cette épicerie. Avec plusieurs caissières, les gars qui coupaient les fromages, les autres qui donnaient les bouteilles d'eau, on se saluaient. La plupart des épiceries sont gérées par des arabes, des libanais principalement, le Caribbean ne faisait pas exception. Je voyais les trois gérants de l'épicerie à tous les jours, on n'en était venus à discuter de la disponibilité de certains produits, de la chaleur étouffante, … Quand le building est tombé devant moi, j'avais la certitude qu'ils étaient restés sous un bloc de béton. Aujourd'hui, j'ai rencontré le plus vieux d'entre-eux. J'étais content de le voir, mon créole bégayait. Une cicatrice de six pouce sur le bras gauche, il a passé les trois derniers mois à Miami pour chirurgie et réadaptation. Son comparse le plus jeune est toutefois resté sous les décombres. L'autre est vivant. C'était le troisième témoignage 'vivant' que j'entends du Caribbean depuis trois semaines. Juste à côté de moi au resto, une femme raconte à son amie qu'elle a passé une longue partie de la nuit à ramper dans le système de ventilation pour enfin se retrouver à l'air libre. J'ai été incapable de lui parler. Une autre qui me raconte que Dieu a poussé au sol sa grand-mère de 86 ans au sol, entre deux caisses. On l'a sortie vivante et poussiérée des décombres vers 2h00 du matin. Ces gens me touchent, j'ai été si près d'eux, et en même temps si loin de leur calvaire.