Un immeuble de bureaux de la City ou de Wall Street. Une immense salle où s’alignent des écrans d’ordinateurs dans une atmosphère conditionnée. Devant chaque écran, un homme d’une trentaine d’années, chemise blanche et cravate, lunettes cerclées, observe le défilé continu des chiffres. Soudain, l’un d’entre eux presse quelques touches de son clavier … et il y a trois morts à Athènes. Certes, c’est un raccourci quelque peu subjectif, direz-vous. Pourtant, les traders des fonds spéculatifs et des organismes financiers et bancaires ont spéculé à la baisse les bonds de rachat de la dette grecque sans aucun état d’âme. Comme les marchés financiers ne fonctionnent pas selon la loi de l’offre et de la demande, mais selon des prévisions auto-réalisatrices, la spéculation à la baisse a effectivement entraîné la baisse des bonds de rachats grecs. Immédiatement, les taux d’intérêt des prêts bancaires à la Grèce se sont envolés et atteints des niveaux mettant ce petit pays dans l’impossibilité de rembourser ne serait-ce que les intérêts de sa dette. Obligée de réduire de façon dramatique ses dépenses pour éviter d’être en cessation de paiement, la Grèce a mis en œuvre un drastique plan de rigueur touchant brutalement les salaires, la redistribution sociale, les retraites, les investissements, les impôts, etc… Sous le choc, le peuple grec s’est révolté … et il y eut trois morts. C’était donc bien un raccourci, mais parfaitement objectif. Voilà presque trois mois que la situation se dégrade et que les responsables européens passent leur temps en discussions stériles et en atermoiements. Pendant ce temps perdu, la spéculation mondiale s’en ait donné à cœur joie ! Les européens expliquent que l’on prête de l’argent à la Grèce, mais il faut que cet argent rapporte ! On aide, mais on punit ! Les marchés rigolent !! et en profitent. Décidément, l’Europe manque de dirigeants d’envergure. Qui a entendu le « président » de l’Europe depuis que nous sommes dans la plus grave crise que l’Europe ait connue ? Lorsque l’Allemagne garde les yeux fixés sur les élections plutôt que sur le risque d’éclatement de l’Europe, on peut douter de l’avenir de celle-ci. D’ailleurs, A.Merkel a perdu sur tous les tableaux : non seulement ses hésitations et ses interventions intempestives n’ont pas arrêté la spéculation, mais elle a également perdu les élections et sa majorité gouvernementale. W. Churchill disait déjà, en son temps : « Vous aviez le choix entre la guerre ou la honte. Vous avez choisi la honte et vous aurez la guerre ! ». Mac Arthur disait également: « Ce qui distingue une défaite d’une victoire ? Deux mots : trop tard ». Où est la solidarité européenne lorsque A.Merkel dit « il faut punir les Grecs » ? On peut légitimement se demander si les Allemands sont sincèrement européens. Les résultats des élections partielles allemandes en Rhénanie semblent démontrer que la réponse est négative, la majorité des Allemands étant hostiles à toute aide à la Grèce. La croissance repart dans le monde entier … sauf en Europe. Les marchés s’en vont logiquement ailleurs ! Ils quittent une Europe vieillissante, sans réaction, sans volonté et endettée au-delà du raisonnable. Rien de plus normal ! Les marchés financiers sont des prédateurs immoraux, mais qui ne sont pas idiots : ils constatent et jouent sur l’incapacité des dirigeants européens à mettre en œuvre une politique commune, cohérente, compréhensible et qui se confinent dans des discours rodomonts. Jamais l’Europe n’a été plongée dans une telle crise. Nous avons au moins 10 ans de souffrances et de privations devant nous avec une déflation sévère. La pauvreté nous guette. L’Europe est déjà coupée en 2 : la zone Euro et les autres qui, aujourd’hui, insistent sur leur choix de ne pas en faire partie. Quelle vision ont donc les dirigeants européens lorsque leur seul moteur est la réaction des marchés financiers ? Tout, dans cette crise, montre que les égoïsmes nationaux sont majoritairement à l’œuvre dans les règles de fonctionnement de l’Europe. La Commission européenne se cantonne dans une technocratie tatillonne et le « président de l’Europe » est parfaitement inaudible. L’Europe est en perpétuel déficit, c’est-à-dire en dysfonctionnement économique, depuis plusieurs décennies et vieillissante. A-t-elle encore un avenir ? On peut en douter. Jamais l’Europe n’a été plongée dans une telle crise. Nous avons au moins 10 ans de souffrances et de privations devant nous avec une déflation sévère. La pauvreté nous guette.