Fut un temps où les jeunes stars de l'écurie Disney avaient, malgré leur jeune âge, quelque chose de charismatique - même pour les plus de 15 ans. Je n'étais déjà plus dans la cible mais je me rappelle par exemple encore très bien de Shia LaBeouf dans l'excellente série LA GUERRE DES STEVENS. Et surtout, je me rappelle très bien de Lindsay Lohan dans les plutôt agréables films A NOUS QUATRE et FREAKY FRIDAY. Même Hilary Duff, héroïne de LIZZIE MAGUIRE, avait un petit quelque chose d'assez inoubliable. Et d'ailleurs, vous saviez que Kurt Russell avait été un héros Disney célèbre dans les années 60 ! Entre les tâches de rousseur et le charme instantané de Lindsay ou les frisettes et la nonchalance de Shia, ils avaient ce petit truc, déjà très jeunes, qui fait les stars.
Charismatiques. Inoubliables. Des adjectifs qu'il va être difficile d'attribuer à leurs petits frères et soeurs. Vous les connaissez sûrement. Je cite : les Jonas Brothers, Miley Cyrus, Demi Lovato ou Selena Gomez. Outre le fait qu'ils ont tous la même tête d'Américain ahuris, les faisant ressembler à des clones au service du divertissement mondialisé, ils portent tous ces anneaux/colliers de pureté, comme des moutons au service de la bigoterie mondialisée. Et quand il était plutôt agréablement régressif de regarder des séries comme LIZZIE MAGUIRE et LA GUERRE DES STEVENS, je ne vous dis pas le calvaire que représente une session des SORCIERS DE WAVERLY PALACE ou de HANNAH MONTANA. C'est carrément débilisant !
Mais ces chères têtes brunes (et pures) ont un avantage sur leurs aînés - du moins dans la théorie. Ils ne devraient pas aller se bourrer la gueule au Chateau Marmont et faire des photos cochonnes dans des magazines branchés, une fois la majorité acquise. En gros, ils ne devraient pas faire comme Lindsay Lohan.
Lindsay Lohan. La honte de la maison de Mickey et de Minnie. La fille qui avait tout et qui a tout mis à la poubelle à grand coup de frasques orgiaques dans les clubs de Los Angeles. La "party girl" moquée pour ses aventures lesbiano-opportunistes. La starlette qui se fait virer des tournages et sermonner par Jane Fonda. Mais aussi l'icône trash qu'on adore détester par voie de presse interposée.
Je l'avoue. Il y a encore quelques mois, je détestais Lindsay Lohan pour ce qu'elle représentait. Je lui en voulais profondément d'avoir jeté une brillante carrière par la fenêtre à cause d'un goût prononcé pour la fête. J'étais très énervé de ce comportement de petite fille riche trop conne pour se rendre compte de la chance qu'elle avait. Comprenez-moi bien. Il y a un film que j'aime profondément - comme si je l'avais fait. Ce film, c'est MEAN GIRLS. Et si le script de Tina Fey est la principale raison de mon amour pour ce film, la prestation de Lindsay joue également beaucoup. Alors me dire que tout ça, c'était du vent, ça me faisait mal au coeur.
Et puis j'ai compris...
Mannequin puis actrice, Lindsay travaille depuis qu'elle est en âge d'avoir des souvenirs. Sa mère ressemble plus à une "meilleure copine" qu'à une mère. Son père, acteur raté, a fait trois ans de prison pour délit d'initiés (plus un an pour avoir violé sa probation !), a agressé son beau-frère, a été condamné pour conduite en état d'ivresse, est devenu un "Born-Again Christian" et est fiancé à une journaliste de la presse people ! Entre autre chose car tout cela, c'est sans compter les provocations ultra-médiatiques envers sa fille. La dernière en date : avoir appelé les flics un soir où Lindsay et sa petite soeur passaient une soirée ensemble car il avait, soi-disant, peur de l'influence néfaste de Lindsay. Oui, il semble bien que papa Lohan soit un cas vraiment désespéré de "gros enculé", plus intéressé par l'argent et la gloire qu'il peut tirer de la célébrité de sa fille que par son bien-être. Ce genre de type pervers et malsain qu'on aimerait voir enfermer dans la même cellule de prison qu'un néo-nazi bodybuildé. Mais si vous êtes avides lecteurs/lectrices de tabloïd, vous savez déjà tout ça...
Ce serait bien sûr faire de la psychologie à deux balles de dire que tous ces paramètres ont largement conditionnés Lindsay à commettre tous les excès dont on l'accuse aujourd'hui et qui ont ruiné sa carrière professionnelle. Mais quand même ! Le nombre de jeunes starlettes à s'être retrouvées dans la même situation sont légion. Elles pourraient avoir un groupe Facebook et ne pas avoir à rougir du nombre de membres face à celui des alcooliques pas anonymes ("Il faut boire avec modération, mais putain c’est qui ce modération ?") Certes, ce n'est pas une excuse mais ça remet les choses en perspective. Voyez Drew Barrymore, passée, elle aussi, par cette phase, écrivant dans son autobiographie "Little Girl Lost" : "Grandir... élevée par une mère célibataire, toujours absente à cause de son travail, j''étais pétris par l'insécurité, craignant sans cesse que les gens ne m'aiment pas. Je ne comprenais pas comment il était possible de m'aimer. Mon père me déteste. Ma mère ne m'aime que pour l'argent que je lui rapporte. J'étais persuadé de n'être rien d'autre qu'un morceau de chair sans valeur.(...) Sans le travail qui me permettait de booster mon égo, j'ai commencé à avoir des problèmes avec l'alcool et la drogue en essayant de fuir tout ce que je pouvais. J'étais la party girl en fuite. Droguée, j'avais le sentiment que tout allait bien. Le problème, c'était que j'avais besoin d'être tout le temps droguée."
Ça ne vous rappelle rien. Lindsay se comporte finalement comme n'importe quelle fille de 23 ans (et oui, c'est son âge !) sans repères affectifs. Et quand elle pète un câble sur Twitter après la descente de dizaines de flics chez elle, elle réagit finalement comme n'importe quelle fille face à la connerie et l'indifférence de son père : en colère, exaspérée, triste et déconcertée. Mais la différence avec n'importe quelle fille, c'est que Lindsay, elle, est suivie par plus de 560 000 personnes sur Twitter.
D'autant qu'il n'y a pas que son père qui soit en cause. Jour et nuit, sept jours sur sept, elle est suivie, harcelée, traquée par des dizaines de papaparazzi. Je conviens qu'elle a sûrement, un temps, cherché cela, qu'elle est en grande partie responsable. Mais comment vivre de cette façon ? Comment essayer d'envisager de se (re)construire et de retrouver une vie à peu près normale quand on est la cible privilégiée de loups qui guettent à votre porte ? Elle a sûrement beaucoup de choses à se reprocher mais je ne suis pas sûr qu'elle ait mérité ce genre de couverture. A vrai dire, personne ne mérite ce genre de couverture ! Parce que, désormais, le jeu préféré des tabloïds, ce n'est plus seulement d'avoir les meilleurs photos pour se moquer gentiment, c'est d'enfoncer et d'humilier violemment. Le moindre projet "sérieux" qu'elle annonce est moqué, discrédité. Et pas seulement par les tabloïds. Un nouveau film comme actrice ? La blogosphère savoure le bide à venir. Un documentaire en Inde ? La presse cinéma rigole. Une ligne de vêtement pour Ungaro ? La presse mode glousse.
C'est un cercle vicieux, chaque souffrance affective entraînant une frasque médiatique qui la décrédibilise un peu plus aux yeux du public et de la profession provoquant inévitablement de nouvelles souffrances.
Et maintenant que j'ai dit tout ça, j'aimerais que ça change. J'aimerais que la Lindsay Lohan qui a démontré un extraordinaire talent dans MEAN GIRLS, dans PRAIRIE HOME COMPANION ou dans BOBBY reviennent. Et cette fois, pour de bon ! Comme Robert Downey Jr, j'aimerais qu'elle se serve de toute cette souffrance, de cette vie vécue à 100 à l'heure pour devenir une encore meilleure actrice. Elle a 23 ans. Elle a la vie devant elle. Toutes ces "expériences" ne doivent pas servir à rien.
Il est clair que tous ces excès se sont inscrits une bonne fois pour toute sur son visage. Elle a 23 ans mais elle fait plus. Beaucoup plus. Mais ce nouveau visage a, il me semble, quelque chose de très ciné-génique. C'est ce que je me dis en voyant la bande-annonce de MACHETE. Je vois dans ce nouveau visage celui d'une survivante. Elle aura peut-être désormais du mal à jouer les héroïnes romantiques dans des comédies hollywoodiennes, comme elle le fit autrefois. Mais elle pourra jouer toutes les autres héroïnes. Celles des films d'action. Celles des drames. Bref, elle pourra jouer les héroïnes qui comptent. On a récemment annoncé qu'elle pourrait incarner Linda Lovelace dans un biopic qui serait consacré à cette icône du film porno 70's GORGES PROFONDES reconvertie en militante anti-pornographie. Je dis OUI ! A condition que le film soit un minimum réussi, c'est typiquement le genre de rôle qui pourrait refaire d'elle une actrice respectée.
Une actrice respectée. C'est exactement ainsi que j'ai envie de voir Lindsay Lohan, à l'avenir...