Quelque part, entre la région inondée de Mopti, et Gao, porte du désert
Publié le 09 mai 2010 par Magalicadet
00h30.
« Hombori » crie le chauffeur.
Nous descendons
du bus. Au milieu de nulle part. Quelques rares maisons semblent abandonnées. D’énormes
masses surgissent de la désolation de la steppe : des rocs à l’allure de
ruines qui se dressent par intermittences vers la lune, pleine ce soir. Tout
est plongé dans un épais silence, nous avec. N’osant pas perturber l’ambiance
si particulière, nous n’échangeons qu’un lent regard inquisiteur, histoire de
scruter dans les yeux de l’autre une once d’espoir. Pas grand-chose. Juste de
la fatigue, le reflet de la lueur lunaire et une bonne grosse dose
d’inquiétude. Nos prunelles semblent plutôt se dire l’une à l’autre que, selon
toute vraisemblance, nous allons dormir ici, dehors, cernés par ces inquiétants
blocs de grès, tout seuls, bouh.
Nous apercevons
un faible éclairage que nos yeux, pas encore accoutumés à cette demi-obscurité,
avaient jusque là zappé. A quelques
dizaines de mètres, une lanterne, un militaire et sa mitraillette (ou son
fusil, sa kalachnikov, … je ne suis pas spécialiste). Nous lui demandons où
nous pouvons trouver un campement pour la nuit. Il nous répond, un peu
froidement, pas mal surpris, que Hombori est à 3km de là, se demandant ce qui a
bien pu conduire le chauffeur à nous lâcher ici. L’œil fourbe, il nous propose
de nous mener tour à tour au village sur sa mobylette contre quelques billets.
Matthieu refuse d’office. Trop fatiguée pour subtiliser l’arme et m’en servir
contre mon tendre partenaire, je me contente de pester intérieurement. 3 km à pieds, sur cette piste
déserte, à une heure du matin, pour rejoindre un improbable campement, entourés
d’ombres fantomatiques, 15 kilos sur le dos. Chouette. L’homme a pitié (il a
probablement perçu la décomposition de mon visage lorsque Matthieu a annoncé
tout fier qu’on se débrouillerait bien) et nous propose deux virées successives
et gratuites sur son deux-roues chinois.
Me voilà donc, avec
mon gros sac, étreignant un inconnu et son fusil, sur une moto, sans casque, au
beau milieu de la nuit, encore loin du matelas de mes rêves et de plus en plus
loin de l’homme de ma vie :)