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Parce que Maman et Papa ont donné l’autorisation de minuit

Par Leschatserrants

Parce que Maman et Papa ont donné l’autorisation de minuit

Mes pas rapides m’ont conduit jusqu’au pont qui surplombait la gare. De la, je voyais la ville qui s’endormait, et en miniatures mes amies qui discutaient avec le vieux. Je les préférais comme ça, loin de moi, quoique encore visible. Au moins je n’avais plus à entendre leurs jérémiades.

Elles, avaient cru qu’on faisait un petit voyage alors que je ne m’imaginais même pas rentrer. Décidément, nous n’étions pas sur la même longueur d’onde. Leurs vies étaient merdiques mais la routine n’avait pas l’air de les déranger.

Comment fonctionnaient-elles ? Pourquoi ne comprenaient-elles pas les choses de la même manière que moi ?

Je reçus, d’une assez curieuse manière, une réponse, bien qu’elle ne fût pas celle que j’attendais, qui me fit prendre une décision. Un SMS, le énième de ma mère :

« Ou é tu ? Papa et moi nous nous faisons du souci, appel pour nous dire ke tu va b1 »

Ni A. ni O. n’eurent l’air surpris en me voyant revenir à la gare quelques minutes après. Je n’eus qu’une seule phrase :

« Je ne rentrerais pas chez moi »

A. haussa les épaules et O. sourit d’un air de connivence absolument insupportable.

Leur nouveau pote ne cessait de me jeter des regards anxieux : il avait l’air de me prendre pour une bombe à retardement, ce en quoi mon mutisme et ma colère lui donnaient raison. Quoi qu’il en soit, il tint parole et nous paya nos billets retours -en s’incluant dans le voyage. Par conséquent, il ne cessa de promener ses mains sur O., qui se laissait plus ou moins faire, et une ou deux fois, par mégarde évidemment, sur moi.

Dieu merci il n’était pas bavard, juste peloteur. Il s’endormit comme un ours à mi-chemin et nous le déplaçâmes le plus loin possible. A. fit apparaître comme par enchantement un marqueur et écrivit sur son front « Cochon Pervers ». O. lui mit le pantalon sur les jambes et je me contentais de lui faire les poches. Puis nous primes la fuite jusqu’au 1er wagon, 1ère classe évidemment, vide en cette heure tardive.

Une fois nos fous rires passés et notre complicité retrouvée, nous nous allongeâmes chacune sur les sièges doubles.

-C’est bien fait pour ce gars en tout cas, remarqua A. en s’étirant paresseusement.

-Tu parles, tu n’aurais rien fait si ça avait été une fille.

-Ca dépend laquelle…De toutes façons, j’en ai franchement marre des files en ce moment.

Elle s’arrêta, le regard au loin. Elle paraissait plus fragile que jamais.

O. et moi échangeâmes un regard. A. se retourna et me fixa, comme un point vague à l’horizon.

-Je suis pas comme toi, reprit-elle d’une voix brisée. Je ne suis pas sure que l’herbe est plus verte ailleurs mais…quand les parents ne veulent pas changer, ni même t’écouter, je pense que se séparer temporairement peut permettre à chacun d’avancer. Les miens sont gentils mais ils ne me prennent pas au sérieux. Ils veulent croire que c’est une passe et en attendant ils ont honte. Et cela ajouté à… Chris, c’est insupportable. Je dis pas que je suis heureuse au centre mais la vie est plus tranquille. C’est moi qui ais demandé à être internée. Les choses devenaient merdiques, j’avais l’impression d’être folle.

-Il s’est passé quoi avec Chris ? osa O. d’un air gêné.



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