L’ avenir énergétique français se définit à partir des ressources disponibles au niveau mondial et a partir de nos propres moyens pour les acquérir….Un lecteur pourrait alors m interpeller( fictivement) :
-« Et si j ai pas d’sous , M’sieur , qu’est ce que je fais ???? »…..
-« Tu fais comme vont DEVOIR faire les GRECS ! Tu ne roules plus et vends ta voiture !..Tu ne te chauffes plus et achète des vêtements chauds ! Tu éteins tes lampes et te couches avec les poules !...Tu restes chez toi au lieu de partir en vacances !..... » etc.
-« Arrête , arrête , M’sieur !…Pourquoi tu deviens si dur ????? »
-« Parce qu un de mes lecteurs vient de me faire comprendre qu il n en avait rien à f….. si les cuves de nos réacteurs rouillaient ….DONC SI NOTRE ELECTRICITE TOMBAIT EN QUENOUILLE !!!!Et ça , J AIME PAS !!!! »
Dans l article d’aujourd’hui, je n ai ni l intention de vous faire un cours de stratégie d’économie énergétique , ni une prévision de ce que sera notre futur en matières énergétiques , ni une prévision de ce que les futurs climats perturberont dans notre vie quotidienne etc. …. Mais simplement en réaction à ce que mon lecteur m a écrit, expliquer comment fonctionne notre réseau électrique et comment il peut s’écrouler…
Mon lecteur fictif me reprends : « Mais M’sieur , c’est du catastrophisme ! Nous n en sommes tout de meme pas là ? »
« Et bien tu te trompes !Nous partons de plus en plus vers l’électricité et comme elle peut faire partie de l énergie renouvelable les problèmes de tous ordres ( production, distribution , accidents , prix ) vont augmenter…. JE VAIS TACHER D EN FAIRE LE TOUR SOMMAIREMENT
1 °/ PRESENTATION D UN RESEAU NATIONAL
T out réseau électrique se réduit à une structure géographique de conducteurs métalliques laissant passer un flot d’électrons. Une image analogique simplifiée serait celle d un réseau hydraulique ou l eau serait produite ici ou la , circulerait dans des réseaux de canaux interconnectés à niveau régulés et disparaîtrait pour arroser ci ou la etc.…
Dans ces réseaux , l'électricité se répartit sur les lignes électriques en fonction de la localisation de la production, de la consommation et des impédances des ouvrages (lignes et transformateurs) selon les lois de Kirchhoff./Ohm ( physiciens allemands du 19ème siècle ):
Les lignes sont calculées pour transporter l’intensité supportable en régime permanent ; si l'intensité n'est plus supportable il faut la réduire rapidement sinon la ligne est en surcharge et se mettra hors service sous l'effet des dispositifs de protection.( disjoncteurs ).Si une ligne a déclenché ,du fait de la structure maillée, l'énergie s'est répartie sur les lignes restantes en fonction de leur impédance, tout en assurant la continuité de l'alimentation électrique.
Lors des surcharges, si aucune action n'est menée dans les délais suffisants, la ligne en surcharge va déclencher à son tour : l'énergie va alors se répartir à nouveau pour alimenter la consommation appelée. Avec de moins en moins de lignes électriques pour acheminer la même puissance, les surcharges sur les lignes restantes vont devenir très importantes et les délais de réaction vont être réduits d'autant.
Un enchaînement de ce type est appelé « cascade de surcharge » et est quasiment toujours impliqué dans les grands black-out rencontrés au niveau mondial. Ceci illustre qu'à partir d'une situation de réseau a priori "normale", un évènement bénin peut rapidement avoir des conséquences non maîtrisables et de grande ampleur.
La zone va finir hors tension et peut « écrouler » de proche en proche un pays entier
Les moyens de correction de surcharge sont importants :
1 : le dispatching central peut changer la topologie du réseau pour y passer d autres nœuds électriques : cela permet de répartir de manière différente l'énergie, et donc de mieux équilibrer l'intensité sur les lignes.
2 : Si la surcharge ou la surconsommation persiste d’autres solutions, plus contraignantes, peuvent être adoptées :
-augmentation rapide de production dans la zone problématique
- coupure volontaire ciblée de consommation (on parle alors de délestage) afin de conserver l'alimentation d'un maximum de clients
3 :Au niveau d’un continent , il peut exister une interconnexion des réseaux : on peut importer du courant a partir d un pays producteur excédentaire lorsque les caractéristiques du courant qu il produit rendent ceci possible.
2/ PRESENTATION DU RESEAU EUROPEEN
L'Europe, avec sa forte densité de population et son niveau élevé de développement économique et industriel, présente un réseau électrique à la fois dense et maillé. La mise en place d'interconnexions dans ces conditions, a nécessité l'adoption de règles communes de sûreté entre les exploitants des divers systèmes nationaux pour prévenir les risques d'incident de grande ampleur. Aujourd'hui, c'est l'ENTSO-E, anciennement UCTE, qui effectue cette coordination en Europe.(PHOTO)
Le développement des capacités d'interconnexion transfrontalières a permis d'accroître les potentiels d'échange . Environ 450 millions de personnes sont fournies en électricité par les réseaux des sociétés membres de l’UCTE. La consommation annuelle totale y est approximativement de 2 300 TWh.Voir photo
. Depuis le 1er janvier 2006, la capacité d'interconnexion de la France avec ses voisins européens est allouée par un mécanisme d'enchères.Là encore mon LECTEUR FICTIF trouverait à redire et se plaindrait de ce mode d approvisionnement comme source possible de pertes ou de profits ou …de spéculations ( affaire ENRON aux USA) .
La fréquence des réseaux électriques interconnectés est contrôlée. Une variation de la fréquence d’un système correspond à un écart entre consommation et production. Une surcharge du réseau due à une perte d’un générateur va provoquer une baisse de la fréquence du réseau. La perte d’une interconnexion avec un autre réseau dans une situation d’export va provoquer une augmentation de la fréquence etc.
Pour les grands réseaux électriques nationaux, il existe des systèmes automatisés permettant via des délestages, des déclenchements de lignes ou des manœuvres, d’ assurer le maintien de la fréquence dans une zone acceptable . Des réserves de puissance peuvent être mobilisées car la consommation sur l Europe se diversifie à partir de son étirement géographique
3 /QUELQUES EXEMPLES DE GRANDS BLACK-OUT ELECTRIQUES
Les systèmes électriques des grands pays européens sont conçus, construits et exploités de telle sorte que les utilisateurs du réseau ne subissent pas, dans certaines limites, les conséquences des aléas les plus courants. Il existe par exemple, une règle dite du « N-1 », en vigueur sur le réseau UCTE, qui prévoit que le réseau national doit rester viable après la perte de n’importe quelle ligne ou de n’importe quel groupe. En France, où le référentiel de la sûreté du système électrique est plus exigeant, s’ applique la règle dite « N-k », avec k>1: , c'est-à-dire qu’aucun écroulement du réseau ne doit se produire, même si 2 groupes de production s’arrêtent ….
Malgré cela , il peut survenir des situations beaucoup plus complexes résultant d’incidents multiples, très proches dans le temps voire simultanés, associés parfois à des défaillances de systèmes de protection, de régulations ou d’opérateurs. Le retour d’expérience sur les grands incidents montre qu’ils sont toujours la conséquence d’une combinaison de plusieurs aléas. Comme souvent vous en entendez parler à la radio (ou les subissez !) à la suite de neiges , froids , inondations , grands vents et tornades , tempêtes , verglas ,grands incendies , incidents sur centrales , etc. je vais vous en rappeler quelques unes des plus notoires …..
3-1 : . Le 4 novembre 2006, vers 22 heures 10, une panne de grande importance a touché le réseau de l'UCTE, privant d'électricité environ 15 millions de clients européens et la totalité du réseau européen aurait pu être perdue si la chute de fréquence s’était prolongée quelques secondes de plus….seul le délestage de fréquence métrique automatique a sauvé la situation. Or les mesures doivent être extrêmement rapides ; donc le recours à la banale surveillance et aux actions humaines ne suffit pas, et il faut s’appuyer sur des dispositifs automatiques …..que je ne vous décris pas .
3-2 : New York a été touchée par une panne d’électricité le 13 juillet 1977 qui a déclenché des pillages et des émeutes entraînant l’arrestation de 4000 personnes. Ce grand incident n’est dû qu’à un orage, dont les chocs de foudre successifs sur des lignes de transport provoquent la perte de ces lignes et de groupes de production. Faute de délestage effectué suffisamment rapidement, de nouvelles disjonctions surviennent en cascade et alors c’est l 'ensemble de New-York qui est coupé, soit environ 6 GW. Il faudra une quinzaine d'heures pour réalimenter totalement New-York. Ce n’était, bien sur ,pas le premier ….En 1965 on prétendit que le grand black-out que la ville avait subi avait accru la natalité 9 mois plus tard en « favorisant les interactions positives mutuelles » !!!
3-3 : La panne de courant nord-américaine de 2003 est une immense panne d'électricité qui a gravement touché les États et provinces du nord-est de l'Amérique du Nord le jeudi 14 août 2003, à 16h13. Il s'agit de la plus grande catastrophe énergétique de l'histoire du continent, les dommages s'élevant à environ six milliards de dollars
A CONSULTER POUR MES LECTEURS SCIENTIFIQUES : J.P. Barret, A. Cheimanoff, F. Maury, "Conditions générales de conception et d'exploitation d'un système de production et transport d'électricité: rappel sur les causes générales des incidents graves", Revue Générale de l'Électricité (RGE), tome 89, n°4, avril 1980