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Sorti vendredi dernier, Quiéns es ?, est un petit bijou, une fiction autour d'un personnage de légende, Billy the Kid. En moins de cent pages, Sébastien Doubinsky fait revivre l'un des plus célèbres hors-la-loi de l'Ouest américain dans un roman admirablement construit en forme de quête sur l'identité. Claro et Bartleby ont chroniqué ce livre. D'Aarhus au Danemark, où il réside et enseigne, Sébastien Doubinsky a pris le temps de répondre à nos petites questions et nous l'en remercions.
Que ferez-vous lorsque plus personne ne lira de livres ? Je pense (et j'espère) que je serai mort depuis longtemps. Sinon, je crois qu'il y aura toujours des lecteurs. L'homme ne peut pas se passer d'images mentales, d'émotions détachées de toute représentation visuelle. Le support visuel n'est pas suffisant, il est beaucoup trop limité – paradoxalement, trop précis. L'imagination a besoin de flou pour se sentir à l'aise et véritablement fonctionner. Il y aura donc toujours quelque chose à lire. Tout ce que j'espère, c'est que ce ne sera pas le même livre pour tout le monde. Le premier souvenir (ou émotion) littéraire ? L'Odyssée et L'Énéide, en collection pour enfants. Offerts par ma grande tante, quand j'avais 9 ans. Cela m'a donné simultanément le goût du voyage, du merveilleux et de la violence. Que lisez-vous en ce moment ? En ce moment, je lis plusieurs choses, comme toujours : Zanesville de Kris Saknussemm, Nunquam de Durrell, Everland de Paul Witcover, De pareils tigres de Jean-Marie Dallet, Les Fleurs du mal, de qui vous savez. Quels sont les auteurs que vous avez honte de n'avoir pas lu ? Malcolm Lowry, Thomas Mann (La Montagne magique), tous les classiques Chinois, Japonais, Égyptiens, Syriens, Nigérians, Brésiliens, etc…. Suggérez-moi la lecture d'un livre dont je n'ai probablement jamais entendu parler. Tunc et Nunquam, de Lawrence Durrell. Une réécriture de La Nouvelle Ève absolument étonnante et radicale. Le livre que vous avez lu et que vous auriez aimé écrire. L'heure de l'étoile, de Clarice Lispector. Et aussi Tristessa, de Jack Kerouac. Quel est le plus mauvais livre que vous ayez lu ? La symphonie pastorale, de Gide. Une guimauve protestante. Quel est le livre qui vous semble avoir été le mieux adapté au cinéma ? Orange Mécanique, de Burgess, par Kubrick. Ecrivez-vous à la machine, avec un ordinateur ou à la main ? Ordinateur, la plupart du temps. Mais beaucoup de carnets à moitié remplis, aussi. Ecrivez-vous dans le silence ou en musique ? En musique. Toujours. Et toujours très, très fort. Il me faut un mur de son pour soutenir mon inspiration… Qui est votre premier lecteur ? Moi-même. Puis une poignée d'amis que j'exploite honteusement. Quelle est votre passion cachée ? Je ne cache rien. Je suis fier de toutes mes passions. Qu'est-ce que vous n'avez jamais osé faire et que vous aimeriez faire ? Mourir ? Sébastien Doubinsky, Quién es ? Editions Joëlle Losfeld. 10.50 euros.