Au retour du marché, une dame aux cheveux gris et à l'air dynamique m'a tendu un tract concernant le problème des retraites et intitulé "Imposons le partage des richesses !". Etant d'accord pour le partage je me suis plongé dans sa lecture après avoir rangé mes légumes. Ce document m'invitait à signer sur le web une pétition de soutien à l'appel national : "Faire entendre les exigences citoyennes sur les retraites" afin de défendre et développer la mise en œuvre d'une vraie solidarité sociale entre les jeunes et les anciens, les hommes et les femmes, les riches et les pauvres. Jusque là, j'adhère sans réserve. Voyons maintenant l'analyse et les moyens proposés par ce collectif généreux qui regroupe alternatifs, écologistes, syndicats de fonctionnaires et gauche de la gauche. Pour faire court, on nous explique que le gouvernement tente sans l'avouer de détruire le système de répartition, de mettre en place une réforme visant à faire baisser le montant des pensions et que sa principale motivation est de donner des garanties de réduction des déficits aux marchés financiers. La solution proposée serait logiquement de récupérer 1 ou 2 points de PIB sur les revenus financiers pour rééquilibrer les comptes. Un genre de remake sympathique de Robin des Bois avec Noël Mamère à la place de Russel Crowe et Cécile Duflot à celle de Cate Blanchett. On pourrait ainsi sauver le système en évitant de "condamner à la pauvreté la plupart des retraités" et de "remettre en cause le calcul sur les six derniers mois d'activité du secteur public". Mieux encore, ce serait le moyen de "réduire les inégalités". Mais je m'interroge ; si l'objectif est de mettre en œuvre plus de solidarité et de réduire le nombre de retraités pauvres, pourquoi ne pas parler de mettre à contribution les retraités riches ? Je parle de mes collègues qui ont eu une vie entière de salaire de cadre du privé ou du public pour constituer leur patrimoine et préparer leurs vieux jours, et qui vont continuer de prélever jusqu'à la mort une moyenne de 70 % de leur dernier salaire sur les ressources collectives afin de payer leurs voyages au bout du monde et leurs cures de thalasso. Pendant ce temps, un demi-million de vieux rament avec 700 € par mois. Pourquoi ceux qui prétendent militer pour le partage des richesses ne commencent-ils pas par affirmer leur volonté de partager la leur ? Question naïve peut-être, mais je ne signerai pas leur pétition.