L'implantation d'éoliennes, surtout dans les régions ou territoires directement concernés, ne fait pas l'unanimité. C'est devenu une banalité que de le reconnaître !
Les arguments "pour" et les arguments "contre" sont développés à un rythme soutenu, nourrissant une polémique dont on est vraisemblablement loin de connaître l'épilogue. Les experts, les associations et les points de vue spontanés s'expriment au gré des projets de création de champs d'éoliennes, que ce soit dans notre verte campagne ou en pleine mer.
Il y aurait sans doute lieu de s'en étonner, mais en définitive, pourquoi pas ? L’Académie des Beaux-Arts, dont l’une des missions est de veiller à la conservation et au développement harmonieux de notre patrimoine, a en effet décidé d’émettre un avis sur le sujet, au terme d'un débat qui s’est déroulé pendant plusieurs mois et a permis de connaître l’avis des défenseurs des éoliennes, mais aussi de leurs détracteurs. Membres de l’Académie des Beaux-Arts et de l’Académie de Médecine, président du Syndidat des énergies renouvelables, président de la ligue Urbaine et Rurale, directeur des Énergies nouvelles au ministère de l’Économie… l'Académie a recueilli et confronté les réflexions des principaux acteurs du débat autour du développement de l’éolien industriel.
Un rapport regroupe les avis de ces différentes personnalités. De ces débats, il ressort qu’il serait impératif de prononcer un moratoire sur ce sujet, qui pourrait donner le temps de formuler des exigences précises et définitives avant de permettre toute nouvelle implantation d’ensembles industriels de ce type.
Les conclusions de ce rapport sont ainsi formulées :
1) Les éoliennes, machines de 150 mètres de haut, sont en contradiction avec la tradition française qui a toujours consisté jusqu'à présent à harmoniser l’architecture, même insolite, avec le paysage en respectant son échelle. La confrontation de telles installations, que les promoteurs envisagent d’installer aujourd’hui de manière massive, avec les sites remarquables et les paysages de qualité qui ont valu à la France le titre de première destination touristique mondiale, est difficilement acceptable.
2) Les éoliennes ne participent pas à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre : en effet, aucune production n’est aussi variable et aussi imprédictible que l’éolien industriel et son développement ne peut qu’induire une augmentation d’émission de gaz à effet de serre, par la nécessité d’installer des groupes de substitution qui fonctionnent à partir du gaz.
3) Les éoliennes engendrent d’autres nuisances : un bruit variable et difficilement supportable pour le proche environnement, des risques d’accidents, ruptures de pales, détachement de blocs de glace…
4) Les éoliennes, depuis le décret du 8 juin 2001, renforcé par l’arrêté du 10 juillet 2006, qui garantit, pour une durée de 15 ans, l’obligation faite à EDF d’acheter le courant éolien à un tarif très largement supérieur au prix coûtant, sont devenues un produit financier (avant de devenir éventuellement une bulle spéculative). D’où la forte pression exercée sur les commissions appelées à donner leur avis et même sur les préfets.
L’Académie des Beaux-Arts estime que la seule façon de protéger les paysages français serait d’annuler ce décret de 2001 et l’arrêté de 2006.
Dans tous les cas de figure, elle attire l’attention de la puissance publique sur sa responsabilité face à l’implantation d’éoliennes et lui propose de considérer l’implantation d’éoliennes comme une installation industrielle, et de la traiter comme telle.
L’Académie des Beaux-Arts recommande également aux pouvoirs publics de faire précéder chaque démarche administrative concernant l’implantation d’éoliennes d’une consultation démocratique des populations concernées, dont l’ampleur devra être définie, chaque fois, au cas par cas.
Crédit photo : Chris Vick