- Voilà on y est.
On était planté tous les deux avec Robert au rayon jeux vidéo de la Fnac, devant les stocks de Guitar Hero III. Les immenses boites s’empilaient devant nous. Versions Wii, PS3, PS2, X-Box… Elles y étaient toutes ! Ce Robert là n’est pas celui que les fidèles lecteurs de ce blog connaissent déjà. Non, lui c’est un Robert d’une autre trempe. Il est PDG d’Activision. Il s’appelle Robert Kotick.
- A l’heure de la dématérialisation du support vous faites fort dans l’occupation d’espace, ai-je dis à Robert en guise d’entrée en matière.
Il a esquissé un petit sourire.
- Eric, on m’a dit que tu as toujours rêvé d’être une star de la guitare.
- Ouais, j’ai toujours rêvé de jouer comme Jimi Hendrix. Quand j’étais ado c’était mon héros.
- Ben ça tombe mal, celui-là, je crois qu’on l’a pas ! Hendrix tu dis… Attends je consulte mon PDA… Non à la lettre H on a Heart. C’est tout. Désolé Eric.
Alors j’ai fait une crise terrible. J’ai crié comme une bête. Je me suis mis à baver. Je me suis roulé par terre devant lui ! J’entendais les vendeurs qui expliquaient à l’oreille de leurs clients : c’est le créateur de l’oncle Ernest et d’In Memoriam. Il a pété un cable !
Robert a eu alors un réflexe salvateur. Il a appelé discrètement son directeur financier. Une heure plus tard tout était arrangé. Il m’a expliqué le montage.
- C’est assez simple. Hendrix est chez MCA. MCA est un label Universal. Dès la semaine prochaine nous allons proposer un rapprochement avec Vivendi Games. L'opération doit encore être approuvée par nos actionnaires et répondre aux diverses réglementations américaines et européennes sur la concurrence mais ça devrait coller. Vivendi Games, dont les actions seront converties en 295,3 millions d'actions nouvelles Activision, sera tout d'abord fusionné avec une filiale à 100% d’Activision. Vivendi se portera acquéreur dans le même temps de 62,9 millions d'actions nouvelles Activision au prix de 27,5 $ l'action (+ 31% par rapport au cours moyen récent), pour un total de 1,7 milliards de dollars en cash. L'opération achevée, Vivendi détiendra environ 52 % de la nouvelle structure. Activision Blizzard lancera ensuite une offre publique d'achat portant à hauteur de 4 milliards de dollars en numéraire sur un maximum de 146,5 millions d'actions, à 27,5 $ l'unité. Vivendi pourra acquérir des actions émises à hauteur de 700 millions de dollars maximum. Si l'offre publique d'achat est totalement souscrite, Vivendi sera présent à hauteur de 68 % environ du capital de la nouvelle structure. Voilà c’est finalement assez simple.
J’étais sur le cul. J’avais rien compris mais je me suis dit que ce mec était un génie et qu’il valait sans doute mieux l’affronter à Mario Kart qu’à Monopoly Tycoon.
- Peu importe. Ce qui compte pour toi c’est que Hendrix sera dans Guitar Hero IV. Bon mais évidemment on te le met en exclu qu’à la condition que tu signes ton prochain jeu chez nous. C’est OK ?
C’est à ce moment là que je me suis réveillé.
Au fait, pour ceux qui ne sont pas au courant, on a appris ce week end que Vivendi rachetait Activision. Comme on dit, ce rapprochement là a du sens. Les licences de l’un, le savoir faire on-line de l’autre. La maîtrise des consoles pour l’un. Une longue tradition du PC pour l’autre. C’est vrai que ça a de la gueule : les premiers commentaires lus ce matin dans la presse sont forcément unanimes. Le premier éditeur indépendant de jeux vidéo dans le monde est désormais français ! Cocorico ! C’est toujours pareil quand une société française rachète une américaine on trouve ça génial. Quand c’est l’inverse on dit que la diversité culturelle est en danger. Pour l’instant, ça ne change pas grand chose pour nous. Demain on part comme prévu à la Game connexion de Lyon pour tenter de vendre nos prochains jeux. Dans quelques mois, français ou pas, ce qui est certain, c’est qu’on aura un client potentiel en moins. Et ça, pour la diversité, je ne sais pas encore si c’est une excellente nouvelle.
PS : merci à Florian Viel de jeuxactu