Marek Halter a beau avoir publié pas moins de dix-sept livres aux Editions Robert Laffon, c’était la tout premier livre que je lisais de lui, et c’est donc sans aprioris particuliers que je débutais « Le Kabbaliste de Prague », dont le titre et le résumé m’avaient attirée.
L’histoire se passe à la toute fin du XVIème siècle, à Prague, à travers David Gans, un jeune Juif érudit venu étudier auprès du rabbin MaHaRal, un très grand kabbaliste, réputé très sage. L’histoire commence avec une promesse, celle que se font deux amis de David, de marier leur descendance : effectivement, l’un a une fille, l’autre un garçon, mais le destin en décidera autrement. Dans une Prague décimée par la peste et les querelles religieuses, le rabbin MaHaRal devient une légende en façonnant un Golem, pour protéger son peuple…
C’est un récit à multiples étiquettes : roman historique, qui nous dépeint la Renaissance, ses découvertes et ses scientifiques (Galilée, Tycho Brahé, Bruno, autant de grands noms de la Renaissance), les querelles religieuses entre les luthériens et les catholiques, et surtout la persécution des Juifs. A grand renfort de scènes qui effrayent par leur violence, Marek Halter recrée un passé abrupt : sous nos yeux, c’est toute la réalité de l’époque qui se dessine, avec notamment les massacres gratuits des Juifs ou les ravages de la Peste. Moi qui ne connaissais rien au judaïsme, j’ai appris beaucoup, immergée comme je l’étais dans l’univers de David. Marek Halter arrive à rendre la religion intéressante même à mes yeux d’athée convaincue.
C’est également une histoire d’amour, qui est arrivée discrètement, sur la pointe des pieds, mais qui apporte beaucoup à l’histoire. Le personnage d’Eva est assurément le plus intéressant du roman : un véritable portrait de femme forte, volontaire, passionnée.
A la fin du roman, Marek Halter fait franchir à ses personnages la limite entre le roman historique et le roman fantastique avec la création du Golem, qui amène une réflexion sur l’humanité, la répétition des schémas (les Juifs esclaves de Pharaon, réitèrent le phénomène en asservissant Golem) et l’éternelle question religieuse et métaphorique, peut-on créer un homme avec des mots ?
Quant au roman en lui-même, on entre facilement dans le récit, et le livre se lit très rapidement, grâce au style fluide et agréable de l’auteur. Cependant, ce n’est pas le livre qui m’aura le plus marquée, malgré le dépaysement et la réflexion qu’il m’aura apportée. Je remercie Livraddict et les éditions Robert Laffont pour cette belle découverte.