L’UDF est morte, vive le MoDem. En un week-end, François Bayrou a fait le grand chelem : après avoir enterré l'UDF vendredi et fondé le MoDem samedi, il a en effet été élu à la tête du nouveau parti par 96,82% des 3 933 adhérents ayant participé au vote (un score à peine inférieur à celui de Jean-Marie Le Pen lors du dernier congrès du FN... c’est dire le niveau de démocratie interne du MoDem).
Sans doute grisé par un tel résultat, le député des Pyrénées-Atlantiques s’est laissé aller à affirmer que le MoDem, qu’il qualifie de "seul parti nouveau de la vie politique française" est "un mouvement de résistance à l'ordre mondial, au modèle qui essaie de s'emparer aujourd'hui de la mondialisation". La résistance la mondialisation c’est bien, mais pour ratisser large en vue de 2012 mieux vaut s’en prendre à Nicolas Sarkozy. C’est pourquoi François Bayrou assure que "nouvelle frontière ne se situe plus entre la droite et la gauche", mais "entre une attitude d'alignement et de résistance" au président de la République. Puis se prenant probablement pour Laurent Fabius nouvelle formule, il s’est lancé dans un plaidoyer en faveur de l’écologie en proposant "un autre projet de développement pour la planète, qui ne s'arrête pas à la croissance économique" pour conclure que "l'économie doit servir l'homme et non pas l'inverse". Il fallait au moins cela pour séduire Corinne Lepage et Jean-Luc Bennahmias présents dans la salle.
Mais le MoDem a beau revendiquer "entre 50 000 et 60 000 adhérents", dont la moitié venant des fichiers de feue l’UDF, il ne peut compter que sur trois députés en comptant son président (dans de telles conditions on comprend mieux pourquoi il ne juge pas opportun de s’appliquer à lui-même le non-cumul des mandats pourtant inscrit à son programme lors de la dernière présidentielle…). Si du côté des sénateurs ex-UDF, "27 sur 30" se sont affiliés au MoDem selon leur chef de file Michel Mercier, ce dernier souhaite cependant garder le sigle UDF pour le groupe au Sénat au motif que "certains sénateurs se sont affiliés au MoDem par enthousiasme, d'autres parce qu'ils n'avaient nulle part où aller"… pas de doute ça c’est de l’adhésion aux idées.
Bien entendu Hervé Morin, le chef de file de Nouveau centre s’est empressé de tacler son ex-idole en lâchant que "la démarche de François Bayrou, c'est une démarche qui consiste seulement à faire en sorte de servir son destin personnel", avant d’ajouter avec une mauvaise foi qui ferrait presque sourire : "il a réussi l'exploit de transformer un parti politique qui avait plus de parlementaires que le RPR en 1988 en un parti qui n'en a plus aujourd'hui que deux". Et de conclure que le MoDem lui rappelle le "radeau de la Méduse", symbole d'une "dérive personnelle totale". Jamais avare d’un bon (et souvent d’un mauvais) mot, André Santini, lui aussi passé au NC contre un sous-maroquin enfonce le clou en demandant un "Grenelle du centre", avant de fustiger la création d’"un parti sans ligne politique, sans élus, sans vision, sans cohérence interne".
Les attaques des ex-UDF ralliés à Nicolas Sarkozy auraient peut-être pu porter un minimum si le Nouveau centre était un parti irréprochable. Mais à en juger par leurs magouilles pathétiques de ces dernières semaines pour récupérer du financement public auquel le NC n’a pas droit du fait de ses résultats aux législatives, c’est loin d’être le cas. Au point que l’on peut se demander s’il vaut mieux être "un parti sans élus" ou bien sans adhérents et sans amour propre ???