Las Vegas : argent, alcool, sexe… Une ville où il fait bon faire la fête lorsqu’on est riche. Destination de rêve pour passer le premier de l’an, tous les gosses Californiens ayant plus de 21 ans viennent y dépenser l’argent de leurs parents. Mais lorsqu’on est Breton, étudiant de surcroit, la nuit du 31 décembre à Sin City est loin des casinos et leurs verres à $20. Un réveillon de salopard conté par Joran Le Stradic.
Étant étudiant dans le Minnesota pour cette année scolaire, le Winter Break, ou Vacances de Noël, était l’occasion rêvée pour faire un peu de tourisme. Considérant la météo relativement fraiche du Minnesota en cette période de l’année (-20°C en moyenne), ainsi que le manque d’attraction dans cette région (plus de lacs et de champs que d’habitants), moi et mon camarade Breton (lui aussi !) Baptiste avons décidé d’essayer de trouver ce que les gens appellent l’American Dream. Destination Californie, donc, pour 18 jours de rêve et de folies. San Francisco, Los Angeles et Las Vegas (oui, Las Vegas est dans le Nevada et non la Californie, mais c’est à côté). En s’arrangeant bien sur pour être à Las Vegas le 31 décembre.
Il est 12h30, et on est à la rue avec nos sacs. On vient de rendre la chambre qu’on avait réservée pour la nuit du 30 décembre, et on n’a pas de chambre pour le 31. Ben oui, on est plutôt économe, et rien qu’un matelas pourri dans un dortoir comptant 20 lits, dans une auberge de jeunesse en périphérie de Las Vegas, un 31 décembre, ça va déjà chercher dans les 30 ou 40 dollars par personne. Alors puisque c’est le réveillon, et qu’on est Breton, on ne va pas dormir de toute façon. Il nous fallait juste un endroit pour poser nos sacs.
En tant que gens organisés, nous avions prévu le coup, et nous devions déposer nos sacs dans la chambre d’une amie de Baptiste, Serbe, qui devait par chance se trouver dans la même ville au même moment. Le problème, car évidemment il y en a un, c’est qu’elle est impossible à joindre… Son portable ne répond pas, nous n’avons aucune idée d’où elle est, aucun contact… Finalement après une demi journée de galère et d’enquête téléphonique, on apprend qu’elle a perdu son téléphone quelques jours plus tôt, on réussit à avoir des numéros de gens qui sont supposés être avec elle, on arrive à la contacter, on galère comme il faut pour traverser toute la ville et on rejoint finalement l’auberge de jeunesse où elle loge.
Il y a là cinq Serbes pour une chambre à 4 lits tellement spacieuse que nos deux sacs en remplissent la moitié. Passer la nuit là-dedans relève d’un exploit de Coréen, mais bon, ce n’est pas mon problème, seul mon sac reste là, moi je passe la nuit dehors.
Le temps de notre périple et pendant que les filles se préparent, les deux Bretons que nous sommes auront déjà dégusté presque deux litres de Budweiser (chacun, cela va de soi), repartis dans 3 canettes de 66 cL chacun. Boire ce genre de canette dans un sac un papier, c’est tout un rêve qui se réalise pour moi : faire comme les clodos ou les gangsters dans les films américains. Précision utilise pour la suite : Las Vegas semble être une ville où l’on peut boire dans la rue. Je ne sais pas ce qu’en dit la loi, toujours est-il que tout le monde le fait et ça ne pose pas de problème. Chose impensable dans le Minnesota par exemple, à moins de vouloir visiter le poste de police.
Bien, les filles sont prêtes à partir, alors on décolle. En attendant le bus, dont l’arrêt est juste à côté d’un magasin qui par chance vend de l’alcool, les assoiffés s’équipent. Personnellement, mon goût de l’expérience me pousse vers une cannette à l’apparence, certes un peu douteuse, mais affichant une température digne d’un punk à chien doublé d’une charge de guarana, taurine et autres substances pour jeune idiot en manque de tonus. Cannette de 66 cL encore une fois, il faut pas déconner non plus ! Je ne regrette pas mon choix, il y avait assez de rêve là-dedans pour une bonne partie de la nuit.
On passera donc une bonne demi-heure dans le bus pour arriver deux arrêts plus loin (équivalent à 15 minutes de marche), endroit qui s’avère être le terminus pour ce soir : plus loin, toute la rue est bloquée pour que les gens puissent y célébrer le passage à une nouvelle année.
Commence donc une longue randonnée pour descendre tout le Strip (c’est la grosse rue principale de Vegas, avec tous les plus gros casinos et hôtels) en compagnie de centaines, de milliers d’autres fêtards afin de rejoindre le gros centre. En route, rencontre avec un Bosniaque plutôt cool, et non, il n’y a eu aucun trouble avec les amis Serbes, tout le monde était content.
On avance, on rencontre plein de gens tout en sirotant, et puis, évidemment, à un moment on rencontre des Français. Ou plutôt des Françaises devrais-je dire. On papotte, et je ne sais plus comment (boisson de punk à chien pour étudiant en manque de tonus), on échange les numéros de téléphone et tout, puis on se perd dans la foule, car ça y est, on est arrivé au niveau de l’hôtel/casino Le Paris. Tour Eiffel, Arc de Triomphe, tout est là. En face, le Bellagio fait bien le fier aussi, avec sa classe à l’Italienne.
La rue est bondée, blindée, noire… Et il est déjà presque minuit, c’est fou ce que le temps passe vite. On prend tout de même le temps de déranger un animateur télé pendant son direct, puis on le laisse finir et on prend une photo avec lui. Trois minutes avant l’heure fatidique, des bruits de pétards commencent à retentir. Ce n’est que le début d’un monstrueux feu d’artifice, avec les écrans géants qui servent habituellement à diffuser des messages publicitaires qui affichent maintenant un compte à rebours. Les éclatantes fusées illuminent le ciel de cette ville de lumière, juste en face de moi. Puis je tourne la tête à gauche, et la même chose se passe plus au nord de la même avenue. Puis je la tourne à droite, et la même chose se passe plus au sud de l’avenue. La foule est en folie, tout le monde crie, applaudit, boit, etc. Cinq minutes de furie. Puis c’est fini, tout le monde se souhaite bonne année, et chacun essaie de s’enfuir de son côté, le problème étant que personne ne partage la même direction.
Je passerai donc une bonne vingtaine de minutes sans être capable de bouger un doigt et en étant pourtant déporté à un endroit totalement différent, où je trouve des inconnus avec qui trinquer, discuter et prendre des photos. Pourquoi ces clichés ? De quoi a-t-on parlé ? Personne ne le saura jamais… C’est là tout le mystère des réveillons dans la rue. Bien, c’est pas le tout, mais dans toute cette agitation, j’ai perdu tous les gens que je connaissais…
Il me faudra bien plus d’une heure d’errance, de textos et de coups de téléphone et de rencontres incongrues avant de retrouver l’ami Breton. Le temps de visiter un peu le casino le plus proche, on se retrouve à errer dans la rue aux alentours de 2h30, et là surprise, pour nous Français, hommes de la nuit : La rue est vidée de ses piétons, et envahie par une armée de balayeuses prêtes à effacer toute trace de l’orgie qui a eu lieu deux heures plus tôt.
Tels des cigales l’hiver venu, nous voilà donc bien dépourvus ! Nous qui pensions que dans une ville comme Vegas, les gens feraient la fête plus tard que dans ce bon vieux Minnesota… Ce n’est en fait pas le cas, et à 3h, tout le monde est au lit, ou en secrètes after-parties… Satanés cain-ris !
C’est alors que vient l’idée de recontacter nos Françaises, qui s’avèrent être en route vers leur chambre… Bien peu de négociations seront nécessaires pour réussir à se faire inviter. Il se trouve qu’elles sont quatre filles à dormir dans une chambre de six lits : les salopards que nous sommes auront donc une vraie chambre avec des vrais lits, du chauffage, de l’eau courante et tout et tout, un 31 décembre à Las Vegas, pour pas un centime. Et le bonus dans tout ça, c’est qu’on est dans le même hôtel que nos sacs, juste dans une chambre différente. Encore une fois, le Dieu des soulards vient de prouver son existence.