S’il est une chose que je sais – et que j’accepte -, c’est que les événements ne se dérouleront pas comme prévu. J’y suis habitué. D’autant plus que ça fait partie de la beauté des voyages. Apprendre à ne pas pouvoir tout contrôler. Apprendre à improviser ou réagir positivement en cas de pépins. C’est souvent lors de ces moments que l’on se découvre. C’est du moins mon cas! Et ces moments, souvent, ont une place de choix dans mes souvenirs.
Un exemple, question de ne pas m’égarer dans un texte trop long. Dimanche 23 avril. Je quitte Mont-Saint-Pierre, où j’étais hébergé par le père de mon ami d’enfance, maire jusqu’à tout récemment de cette petite municipalité de 250 âmes. Je dois me rendre à Gaspé, pour la suite de mon périple, en faisant un détour par Murdochville. J’espère y rencontrer l’un des frères Atkins, co-fondateur des saumons fûmés du même nom. Pour la petite histoire, les deux frères sont originaires de Granby, en Estrie. En vacances en Gaspésie, ils ont à ce point aimé la région qu’ils s’y sont installés à demeure. Ils ont ouvert leur commerce qui, aujourd’hui, voit l’Europe, les États-Unis et l’Asie reluquer ses produits. Une bien belle histoire, comparativement aux fermetures d’usines ou de mines qui font régulièrement les manchettes.
C’est Ginette, qui est derrière le comptoir les fins de semaine, qui m’a expliqué tout cela. On a parlé 1h30, le samedi après-midi. À son sujet, j’y reviendrai dans un message ultérieur. Une autre très belle histoire. Positive comme je les aime. Bref, Ginette me parle du plus jeune des frères, qui passe ses samedis et dimanches à Murdochville. Paraît qu’il ski.
Malgré l’état de la route (la 198 si je ne m’abuse), j’ai bien hâte de découvrir cette ville dont j’ai entendu parler en raison de la fermeture de la mine qui avait soulevé un débat lancinant: fermer ou non la ville?
J’avoue que Murdochville, c’est déprimant. En titi. Un gros quadrilatère avec peu de rues. La mine et sa grosse bâtisse qui ne tourne plus sont au fond. La ville y ressemble: sans vie. Faut dire qu’on est dimanche… Seule activité palpable, les quelque 10 skieurs présents pour les derniers jours d’opération de la saison. Mais bon, ce n’est pas parce que moi je trouve Murdochville déprimant qu’il doit en être ainsi pour tout le monde. Encore moins pour ceux qui y habitent.
Je voulais prendre en photo la ville. Montrer sa réalité. Du coup, je me souviens que j’ai complètement oublié d’apporter les piles rechargeables de l’appareil photo… Ma première bourde. Moi qui travaillais auparavant avec un vieux Nikon comme arme de guerre, me voilà ancré dans mon époque numérique. La prochaine fois, mon appareil à film va voyager avec moi. Une bonne chose d’apprise.
Je déniche le seul endroit du coin ouvert et susceptible de vendre des piles. Pas de portefeuille. Diable, je l’ai oublié chez mes hôtes. Qui sont partis en même temps que moi. Pour Rimouski, à 3 heures de route. Pas d’argent, pas assez d’essence pour aller les y rejoindre reprendre la clé, des amis qui m’attendent à Gaspé… La déprime de la ville m’atteint. Et mon cellulaire est hors réseau.
Je retourne au commerce des frères Atkins. Ginette m’accueille! « Je suis bien contente de te voir. » Et moi donc! « Dis, j’aurais pas oublié mon portefeuille ici par hasard » que je lui demande, sans espoir, sachant trop bien que je l’avais avec moi la veille quand je l’ai quittée. Je lui explique ma situation, entre les consommateurs qui débarquent. Du coup, elle me refile 40$. Au cas où j’en ai besoin pour l’essence. Une bien belle générosité. Faut dire que la veille, je lui avais remis un exemplaire du magazine. Elle a adoré, son conjoint également. Au point où – elle me l’a annoncé à ce moment – ils vont abonner leurs enfants respectifs. Comme quoi ça donne des avantages, travailler pour un magazine du coeur!!!