Phast vient de la vieille école. Celles des racines du Hip-Hop. Dans ses chansons, Phast aborde ses histoires, celles de ses proches. La réalité de la rue, le système carcéral, la pédophilie, le piratage, les femmes qui utilisent les enfants pour en faire baver aux hommes.
«Oui j’ai des thèmes durs. Mais faut séparer le gangster rap de ma musique que je qualifie de hardcore rap. Ma musique sera jamais peace. Je suis capable de faire une toune romantique. Mais mon passé ne me permet pas de faire un beat trop joyeux. J’ai des tracks qui parlent de la rue. Le monde est rendu fou. Les jeunes se promènent avec des couteaux. Mon frère a perdu un de ses chums et sa blonde, enceinte, dans un driveby.» À l’écouter, son authenticité saute aux yeux. Son énergie, ses propos, ressemblent en tous points à sa musique.
Le Hip-Hop doit-il passer par des histoires aussi dures? L’artiste ne le pense pas. «Je refuse de dire que ça prend des textes négatifs pour être écouté. Malheureusement, les jeunes s’identifient à ça. Ça me dérange.»
Son album a un côté négatif. Il l’admet d’emblée. «C’est mes histoires. Ce que j’avais à cracher en 3 ans. Y’a moyen de dire à quelqu’un que tu veux y accrocher le portrait sans parler de gun, de le tuer. Il y a une différence dans la mentalité, dans le message.» Phast est intense. Ses mots sortent sans hésitation, comme une rafale de mitraillette.
Sa réalité n’est pas rose. Celle de la rue. Qu’il est loin d’être seul à vivre. «Avoir une arme dans 5 ans, ça va être nécessaire. Le monde est rendu fou. Mon message, c’est que c’est pas nécessaire d’être violent, mais c’est nécessaire de montrer que tu te laisseras pas marcher sur les pieds.»
Une enfance difficile
«J’ai pas eu une belle vie. Ma mère était seule. Pas d’argent. Elle était sur l’assistance sociale. Mon père était absent, il ne m’a rien donné… C’est pour ça que je me suis battu pour obtenir ce que je voulais. Je suis conscient que j’aurais pu être mieux. Mais je sais aussi que j’aurais pu être pas mal pire. C’est ce qui me tient. Ce qui fait que je vais m’en sortir.»
Plus jeune, Phast passe un peu de temps derrière les barreaux. Jamais pour des crimes reliés à des armes ou la drogue, précise-t-il. Puis, il écope 8 mois pour 9600$ de contraventions impayées. «Ma mère m’a donné de bonnes valeurs. Mais elle peut pas tout faire. Je faisais mes petites passes ben safe. Je venais d’avoir ma fille. Un mois et demi de fait. Je me pogne un job. Je ne fais plus de conneries. Ç’a allait bien.»
La vie allait le rattraper. La mère de sa fille porte plainte pour violence conjugale. Phast retourne alors purger le reste de sa sentence pour ses contraventions. Acquitté, dit-il, il garde un goût amer des libertés conditionnelles: il est retourné en prison en raison d’une plainte non fondée… «La mère de ma fille m’a dit: si tu me laisses pour une autre fille, je vais vous tuer tous les deux. Je l’ai quittée. Moi, j’ai payé pour les caves qui battent leurs femmes…»
De cette mésaventure, il écrit ses premières chansons. Pour la première fois, il rap. Sur cette fille, sur le système carcéral. «Ma musique va me mener sur le droit chemin. Y’a une histoire sur chacune de mes tracks. Fallait que je sorte ça parce que la musique c’est fait pour s’exprimer. C’est sûr que je vendrai pas comme Corneille…» avoue-t-il, le sourire en coin.
Il ne peut changer son passé, ses petites combines. «C’est un choix que j’ai fait. C’est un mauvais choix. J’ai les nerfs finis à cause de ça. Je suis tanné de vivre avec la haine. J’aimerais ça, changer de vibe.» De l’espoir s’en vient: le 22 février, Phast lance son premier album.
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