Pour « devenir » président, il s’est refermé. Il a peur des fuites, restreint le cercle des participants à ses réunions, cache son agenda au maximum, préfère « déléguer ». Trois ans après son élection, Sarkozy apparaît usé, reclus, et craintif. Il n’a devant lui aucune « politique de civilisation » à défendre, aucun projet idéologique fort. Le rêve a disparu. Les cauchemars restent. Sarkozy veut changer. Il reste tel qu'il est. On ne change plus à 55 ans.
Que pourra-t-on retenir du (premier ?) mandat de Nicolas Sarkozy ? Un sentiment d'échec, une agitation qu'on a confondu avec du volontarisme, le caractère impulsif d'un Monarque sans charisme. Théoriquement, il ne reste qu'un an d'action politique, avant qu'une nouvelle séquence électorale, décisive celle-là, s'ouvre à nouveau en 2011. Théoriquement, car Sarkozy s'est déjà glissé dans la peau du candidat: déplacements à l'étranger (après la Chine, bientôt l'Inde) ou au contact des Français, le Monarque veut prendre de la hauteur. Il a d'ailleurs déjà prévenu ses proches et ses élus : l'année 2011 «on ne fera que de la politique». Les conseillers élyséens propagent dans la presse les éléments de langage du moment : Sarkozy se re-présidentialise. Il va changer.
En complément d'une prochaine mise à jour de notre abécédaire des promesses non tenues, voici les six traits permanent du caractère d'un homme qui a confondu la conquête du pouvoir avec son exercice.
Six traits permanents et immanents qui l'ont empêché, l'empêchent et l'empêcheront de devenir présidentiable, fusse-t-il élu.
Compulsif
Nicolas Sarkozy croit que son style est en cause. Ses proches tentent de le convaincre au calme. Au lendemain de l'échec aux élections régionales, on a pu assister à une séquence incroyable: les uns après les autres, des ténors de l'UMP sont allés de leurs commentaires et conseils contre le style du Monarque: qu'il se calme, qu'il devienne enfin présidentiel. Une démarche quasi-infantilisante. Pourtant, ce n'est pas le style, mais bien l'homme lui-même qui est cause. La situation institutionnelle du pays impose que le président sache maîtriser ses nerfs. Le Général de Gaulle était l'homme du 18 juin 1940. François Mitterrand était tenu par sa maladie, Jacques Chirac par sa bonhommie. Sarkozy est compulsif. La moindre attaque personnelle, surtout intime, déclenche sa rage.
C'est un trait de caractère incompatible avec la fonction présidentielle.
Incompétent
En 2007, on a confondu agitation et volontarisme, annonce avec action. Une réforme, surtout si elle d'envergure, se travaille, se prépare, se met en place sur la durée. Le programme de Nicolas Sarkozy était riche en promesses de lendemains qui chantent. La récession de 2008 n'est pas responsable des revirements sarkoyens. L'excuse est trop facile. Combien de réformes gâchées, de précipitation inutile ? Combien de couacs, de polémiques inutiles ? Sarkozy sait transformer l'or en plomb. Trop bravache, il se lâche. Il encourage le couac, la bévue, le dérapage. Incapable de patience, persuadé d'avoir toujours raison, il oublie l'objectif pour la forme et la gloriole de l'instant.
Menteur
Nicolas Sarkozy n'a pas le monopole du mensonge. Mais il a beaucoup promis. Il semble avoir oublié qu'il a été élu pour appliquer un programme ou, à défaut, d'expliquer pourquoi il a dû en changer. Il a même fait des promesses qu'il savait pertinemment qu'il ne tiendrait pas. Prenez la politique étrangère. En 2007, le candidat attaquait la repentance, mais louait les droits de l'homme. Il n'a pas fallu attendre plusieurs mois pour constater les premiers renoncements. En Afrique, Sarkozy a soigné les vieux réseaux, les anciennes amitiés, les sales compromissions. Il s'est voulu donneur de leçons contre l'Iran et les Talibans afghans, mais il assumait, schizophrène, les embrassades avec les dictateurs syrien ou libyen. Sarkozy, qui a promis plus que d'autres avant lui, s'est révélé menteur, plus que d'autres.
Flemmard
Sarkozy est un flemmard. Il s'était forgé une image d'hyper-actif, à coups d'annonces quotidiennes et de déplacements permanents. Mais la réalité est bien différente. Même lors de sa première année à la présidence, les week-ends de repos étaient systématiques, les escapades privées - souvent maquillées sous de faux prétextes de déplacements officiels sans motif - étaient légions : son union avec Carla Bruni, à la fin de l'année 2007, a réactivé cette urgence toute sarkozyenne à prendre du bon temps. Quand il n'est pas au Cap Nègre, il se repose à la Lanterne, près de Versailles. Il se moquait du "Roi Fainéant" qu'était Jacques Chirac. On devrait lui retourner le compliment.
Narcissique
Il faut une bonne dose d'estime personnelle, voire d'orgueil, pour prétendre à la magistrature suprême. Sarkozy a simplement poussé le bouchon vers des limites que nous ne connaissions pas : il ne s'en cache pas. Qu'importe le sujet ou l'occasion, le Monarque a besoin de tirer la couverture à lui, se dresser couronnes et fleurs, s'auto-congratuler en permanence. A l'étranger, la presse se gausse, s'amuse, s'agace parfois.
Cupide
On a trop vite oublié les premiers mois bling bling de la présidence sarkozyenne, les Ray Bans et la Rolex. Mais ce goût du bling bling n'est pas qu'un besoin d'apparat. Sarkozy aime l'argent, rêve d'argent, pense argent. Bref, il est cupide. Accepter des cadeaux (voyages, hébergement) ne le dérange pas. Ne pas en recevoir l'énerve. Sa commande d'un nouvel Airbus est très symptomatique u défaut : Sarkozy voulait son "gros" avion, équipé d'une baignoire (une gageure dans un appareil volant). Et qu'importe si l'aéroport présidentiel de Villacoublay, incapable d'accueillir un Airbus A380, doit être refait en conséquence.
Trois ans après son élection, Nicolas Sarkozy découvre qu'il devrait devenir président. Le logiciel est cassé. L'espoir n'est plus là. L'homme a des ressources, des moyens. Mais il ne changera pas. Compulsif, menteur, flemmard, narcissique, et cupide, il restera.
Ami sarkozyste, avais-tu voté pour cela ?
Crédit illustration FlickR CC Galerie de Môsieur J