Cela me ramène à une conversation que j’avais eu avec un psychiatre il y a une dizaine d’années. Il mentionnait que 95% des difficultés qu’on rencontre peuvent être réglées par le milieu environnant. 5% des crises doivent être suivies par un spécialiste. Je suis obligé de me questionner sur cette réalité. Est-ce que le réseau naturel qui entoure un citoyen s’est effrité au point où nous en venons à se référer trop vite à des spécialistes? En ayant perdu notre capacité d’aidant naturel, est-ce que nous nous déresponsabilisons et embourbons ces spécialistes?
Il y a plus de dix ans, on avait mis en place des groupes de pairs aidants dans certaines écoles. Des jeunes pour aider des jeunes. Une façon d’augmenter le dépistage des jeunes en crise, mais aussi pour avoir des aidants naturels qui pouvaient débuter une intervention et une présence minimale aux jeunes en détresse. Avons-nous perdu les outils que nous avions mis en place à l’époque?
Quand un jeune est en détresse, il ne peut y avoir que ce jeune et un spécialiste. Il doit y avoir un milieu de vie qui entoure le jeune. L’intervention doit être globale. C’est une responsabilité commune. Il y a une famille, des amis, des professeurs… Tous ensemble nous pouvons intervenir et soutenir le jeune qui est temporairement fragilisé.
Quand j’ai eu à intervenir auprès des Inuits dans le Grand Nord pendant les épédémies de suicide, je n’ai pas eu accès à des spécialistes. Il a fallu se débrouiller avec ce que l’on avait. C’est-à-dire une communauté qui pouvait développer des moyens pour soutenir leurs membres. Des aidants naturels qui, avec leur compassion et leur empathie pouvaient assurer une présence et une aide.
C’est vrai que les spécialistes sont parfois utiles. Mais pour un milieu de vie sain, c’est la dernière chose que nous avons besoin. Il faut premièrement intervenir sur le milieu pour qu’il se prenne en main. Des aidants naturels, des gens qui sont prêts à écouter et aider un proche, il y en a beaucoup dans chaque communauté. Ce sont les premières personnes à mobiliser.
Arrêtons d’attendre des budgets d’un gouvernement qui ne cesse de se désengager de nos communautés. Arrêtons d’attendre les spécialistes comme s’ils n’étaient que la seule solution à nos problèmes. Apprenons à vivre en communauté et à être solidaire les uns les autres.
Ressources:
Pour le Québec: 1-866-APPELLE (277-3553). Site Internet. Les CLSC peuvent aussi vous aider.
La France: Infosuicide 01 45 39 40 00. SOS Suicide: 0 825 120 364 SOS Amitié: 0 820 066 056
La Belgique: Centre de prévention du suicide 0800 32 123.
La Suisse: Stop Suicide