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Publié le 15 décembre 2006 par Raymond Viger

Les médias en Gaspésie sont-ils en crise?

Bien qu’indépendants les uns des autres, plusieurs événements récents justifient la question. La modernisation de l’État du gouvernement Charest rend toujours l’avenir des bureaux régionaux de Télé-Québec incertain. Depuis l’automne dernier, la radio de Radio-Canada ne possède plus de correspondant dans la Baie-des-Chaleurs et l’annonce d’une restructuration prochaine fait planer un doute sur la présence de cette radio d’État en territoire gaspésien.

Depuis l’été dernier, la page du journal Le Soleil destinée à l’Est-du-Québec et à la Côte-Nord est parfois absente ou son contenu est considérablement réduit. La radio communautaire de la Baie-des-Chaleurs, Cieu-FM, a récemment supprimé deux postes dont un d’animation qui accordait une place importante aux organismes du milieu.

Finalement, l’impression et la conception graphique du Magazine Gaspésie, autrefois sous la responsabilité d’entreprises régionales, ont été confiées pour cinq ans à la multinationale Quebecor, engagée dans la campagne de financement du Musée de la Gaspésie. Si la tendance se maintient, que restera-t-il des médias nationaux et régionaux en Gaspésie dans quelques années?

L’information en région, un besoin essentiel

La présence de médias nationaux ou provinciaux dans les régions est indispensable pour la population régionale, mais aussi pour le reste du Québec. Un territoire vaste aux réalités économiques, sociales et culturelles variées a besoin d’outils de communication pour assurer la cohésion sociale de sa population. C’est par la connaissance des particularités, des difficultés et des bons coups de chacun que l’on s’enrichit des expériences des autres et que l’on évite de tomber dans des stéréotypes réducteurs.

Il est par contre important que l’information dans les médias nationaux soit couverte par des journalistes présents en région et non par ceux des réseaux souvent concentrés dans les grands centres. Même si la couverture à distance assure une certaine impartialité, elle souffre souvent d’un manque de mise en contexte et d’une sélection des faits qui ne rejoint pas toujours le public de la région. En effet, à distance, les médias nationaux optent souvent pour des informations sensationnelles et négatives. La fermeture de l’usine Gaspésia trouve plus facilement écho à la une des grands quotidiens que le solde migratoire positif des 25-34 ans. Peut-on exiger d’un média privé, comme Le Soleil, qu’il assume les coûts associés à la couverture régionale de l’information? Oui, cela fait partie du mandat dont il se targue: être le quotidien de l’Est du Québec.

Briser l’isolement d’une région

Si les médias nationaux permettent un échange entre régions, les médias régionaux assurent la cohésion sociale au sein de la région. En Gaspésie, l’étalement linéaire de la population le long du littoral rend les contacts directs difficiles. Les médias régionaux garantissent un échange entre les communautés et participent au développement d’une identité régionale.

L’antenne régionale de Radio-Canada est un excellent outil pour ça! Cette radio doit donc rectifier la situation actuelle en répartissant équitablement sur le territoire gaspésien des journalistes aujourd’hui concentrés à Matane. L’ampleur du territoire nécessite la présence permanente de correspondants locaux qui connaissent les dossiers et les acteurs qui animent leur milieu de vie. Ces modifications sont nécessaires au respect du mandat de cette société d’État: «rendre compte de la diversité régionale, tant au plan national qu’au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions».

Un débat de société

Les médias régionaux jouent aussi un rôle précieux dans le développement. En diffusant les décisions et débats politiques et économiques, ils permettent à la population de connaître, de comprendre, de s’approprier les enjeux et de participer au développement régional.

Trop souvent habitués à servir l’information telle qu’on la leur a livrée, les médias régionaux doivent davantage analyser l’actualité régionale (sans «partisanerie»), discuter les enjeux économiques, sociaux et culturels, notamment par la création d’émissions d’affaires publiques, et surtout offrir une tribune à la population.

La Gaspésie manque aujourd’hui cruellement de médias régionaux qui proposent des éditoriaux, des tribunes libres et des débats d’idées. Les médias communautaires doivent aussi participer à ce brassage d’idées en accordant une place aux organismes sociaux, environnementaux et culturels. Certains médias communautaires ont tendance à perdre de vue leur mandat initial et à se rapprocher des médias commerciaux.


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