Pédagogie et individualisme

Publié le 05 mai 2010 par Perceval

Meirieu évoque le malaise provoqué par « l’Ecart entre l’idéal et le quotidien. », augmenté par l’accumulation de taches ( par exemple : lire toutes les instructions ministérielles et académiques, participer aux « semaine du … », rencontrer les collègues, évaluer les compétences, remplir le tableau…. les bulletins, le cahier de texte, voir les parents… ) qui font que certains professeurs se demandent : « mais, que fait l’administration ! »

A mon avis, cette coupure entre les enseignants et « l’administration », n’est pas saine… Je ne serais pas opposé, – à ce que le chef d’établissement garde quelques heures de cours… (L’éducation civique … au moins) et – à ce que sa place de ‘ premier pédagogue de l’établissement ‘ soit renforcé par une reconnaissance de ses compétences en pédagogie (aujourd’hui contestées, au bénéfice exclusif de l’IPR )…

Il est nécessaire de s’engager contre l’exercice solitaire de la profession d’enseignant. Contre la vision méprisable de ce qui est lié à l’intendance. Contre le repli de chacun sur sa propre ‘ conscience professionnelle ‘. Ne récusons pas les exigences du collectif…
Meirieu appelle cet état d’esprit « le syndrome de Lucky Luke ».
« Ainsi, les professeurs sont-ils passés d’une conception modérée et réaliste – « Je trouve l’essentiel de mes satisfactions dans ma relation d’enseignement à mes élèves… Mais je concède volontiers que je suis redevable de toute une série de tâches indispensables au fonctionnement et au progrès de l’institution. » – à une conception radicale, qui fait une étrange synthèse entre les valeurs de la République et le libertarisme le plus débridé : « L’administration m’impose une multitude de tâches qui m’interdisent de professer ! Or, je ne suis redevable qu’à la République de la qualité de mon enseignement… Pour le reste, je fais ce que je veux. Et ce ne sont pas les petits chefs que délègue l’administration centrale qui vont pouvoir me dicter ce que je dois faire ! » On en est même arrivé à ce paradoxe extraordinaire : les professeurs sont, en même temps, des anti-libéraux farouches sur le plan idéologique et des libéraux absolus sur le plan de leur comportement. Ce « miracle » est possible grâce à une simple équation : « L’État est libéral et impose, par la caporalisation qu’il met en place, un fonctionnement libéral de l’École… auquel il n’est possible de résister qu’en agissant individuellement – c’est-à-dire de façon libérale – au nom des principes intangibles – mais que je me donne le droit d’interpréter librement, en dehors du contrôle de toute institution – de la République ! »

Cet excès, bien loin d’être partagé par tous les enseignants…, réduit le ‘ pédagogique ‘ à la portion congrue, trop peu valorisé par notre système.
La conséquence, c’est que ce fameux ‘ projet d’établissement ‘ n’est que formel, technocratique… et d’aucune utilité… Cet état de fait, donne même l’impression que le résultat administratif est bien plus valorisé que ‘ « la transmission des connaissance ».
Pour le chef d’établissement, le ressenti est similaire : le rectorat ou l’inspection académique, n’aurait que faire de l’essentiel de notre mission : « la transmission des connaissance », mais resterait crispé sur les procédures et les dossiers…
Dans l’établissement, nous devrions avoir toutes les clés, pour axer nos « Conseils pédagogiques ‘ sur l’interdisciplinarité et le suivi des élèves.

«  Ne plus se poser la question : « Qu’est-ce que je vais leur dire ? », mais : « Qu’est-ce que je vais leur demander de faire ? ». Et sans, bien sûr, renoncer au cours magistral quand c’est nécessaire, mais en s’interrogeant, là encore : « Comment mes élèves peuvent-ils en profiter au mieux ? Quels conseils pour soutenir leur écoute ? Quels exercices pour vérifier leur appropriation en continu ? » […] ( ÉDUCATION et Devenir ) Pourquoi ne pourrions-nous pas échanger et décider collectivement de notre pratique ? Si cela était, réellement possible, alors : oui, le ‘ Projet d’établissement’ aurait un sens …