Dans un peu plus d’un mois, l’équipe de France s’envolera pour la Coupe du Monde du football en Afrique du Sud. Si l’on ne connaît pas encore "la liste des 23" qui sera dévoilée à 20h le 11 mai prochain en direct sur TF1, on sait déjà que l’événement dépassera le domaine sportif.
Alors que depuis plusieurs mois l’opinion publique et de nombreux observateurs témoignent de la rupture entre les Français et le sélectionneur, les récentes mises en cause de plusieurs « Bleus» dans une affaire de proxénétisme, ont terni encore un peu plus l’image de l’équipe de France.
On rappelle souvent qu’en football il y a autant de sélectionneurs que d’amateurs. Alors à quelques semaines du coup d’envoi du plus grand événement sportif au monde, Délits d’Opinion a donné la parole à ces supporters, ces amoureux du foot. Revue de détail de ce que l’opinion publique pense de l’équipe de France et de son sélectionneur.
Un sélectionneur qui demeure très peu apprécié
Depuis sa prise de fonction en 2004, Raymond Domenech a toujours fait en sorte de protéger ses joueurs. Après les Lemaire et les Santini, « Raymond» tranche par un sens de la formule et des petites phrases qui font à chaque fois mouche. Réaffirmant chaque jour son désir de protéger ses joueurs de l’ombrage médiatique, le sélectionneur est aujourd’hui devenu la cible de toutes les critiques. Ainsi, malgré un bilan historiquement bon (2 qualifications successives pour la Coupe du monde avec déjà une finale), l’ancien entraîneur de Mulhouse, Lyon et des équipes de France Espoir concurrence sérieusement le Président de la République au niveau de sa cote de popularité.
Les différentes enquêtes d’opinion démontrent que la stratégie de communication, les choix et les résultats de l’équipe nationale ne satisfont pas les Français, nostalgiques sans doute des fastes de la "génération 98″. Les sondages réalisés depuis 2006 confirment à chaque fois le déficit de soutien des Français envers le sélectionneur. Plus grave, les Français témoignent d’un manque de confiance très marqué envers le sélectionneur malgré la qualification obtenue lors d’un certain France-Irlande. A ce titre, l’épisode de la « main d’Henry» est apparu comme le symbole de cette équipe qui ne convainc pas et qui, quand elle gagne, ne le mérite pas, comme a pu le mesurer Opinion Way dans un récent sondage.
Nous l’avions déjà évoqué dans un Flagrant délit d’opinion, l’équipe de France a manqué une belle occasion de se rabibocher avec son public. En particulier en opérant des mauvais choix de communication alors qu’une large majorité de Français estimaient qu’il était souhaitable de rejouer le match.
Une fédération qui oscille entre absence et mauvais choix
Dans ce contexte, la période qui séparait la fin des qualifications du début de la compétition a ressemblé au couloir de la mort pour l’hôte de Clairefontaine. Critiqué ouvertement par les journalistes, les observateurs, certains collègues entraîneurs et le grand public, Domenech a également dû faire face à la décision du Président de la FFF qui, le mardi 5 janvier annonça que le prochain sélectionneur serait nommé avant le début de la Coupe du Monde. Ce choix, qui a pu sembler quelque peu maladroit, témoigne bien du malaise qui empreint toute la Fédération.
La conséquence directe de cette annonce fut, et c’est ici un joli clin d’oeil de l’histoire, l’ouverture des paris sur l’identité du successeur de Domenech à la tête des Bleus. Très rapidement, tout ce que le football Français compte d’anciennes gloires, d’entraîneurs à succès ou de fortes têtes du ballon rond furent cités ça et là, contribuant ainsi à la déstabilisation d’une structure déjà bien fragile. Parmi les plus cités dans le sondage Ipsos du mois de février, on retrouvait donc Laurent Blanc (31%), Didier Deschamps (18%) et Arsène Wenger (15%) Plus grave, le lancement de la course au remplaçant, en plein championnat de France et alors que pour la première fois depuis dix ans le football français présentait deux représentants en quart de finale de la prestigieuse Ligue des Champions, est venu troubler le bon déroulement du football hexagonal et de son championnat.
Une équipe et des joueurs pris pour cible, sur et en-dehors du terrain
Dernier étage de la fusée à se désolidariser alors qu’il avait tenu jusque là : l’équipe de France elle-même et les joueurs qui la composent. Les révélations de Zahia, escort girl de profession sur ses « rapports sexuels tarifés» ont achevé de ternir l’image d’un foot français qui semble se perdre chaque jour un peu plus.
Dix ans après la France « Black Blanc Beur» , la génération 2010 devait permettre de chahuter quelque peu le pessimisme ambiant qui s’est progressivement implanté et consolidé en France. C’est l’inverse qui s’est produit. En six mois, la France vient de voir ses deux portes drapeaux traînés dans la boue médiatique et portés à la «Une» des médias du monde entier. Après Henry décrit comme un tricheur, voici Ribery mais aussi Benzema et Govou dénoncés dans une affaire de proxénétisme mettant en cause une jeune fille mineure. Ces accusations sont d’autant plus problématiques qu’elles mettent en cause le chouchou des Français et surtout des sportifs, comme TNS Sofres l’avait évoqué il y a tout juste un an.
Pourtant, ces révélations ne semblent pas avoir d’effets trop négatifs sur les Français, qui sont toujours une large majorité (67%) à vouloir que R. Domenech sélectionne ces joueurs pour le Mondial, comme l’indique l’enquête publiée par Ipsos et diffusée dans France Soir. On notera que les femmes sont moins indulgentes que les hommes : 28% souhaitent des sanctions, contre 21% des hommes… Solidarité masculine ?
Quatre ans après s’être vu intégré à l’équipe nationale juste avant la Coupe du Monde, F. Ribery semble toujours fortement soutenu par le grand public. Cette relative « tolérance» de la part de l’opinion publique fait écho aux propos de Jean-Daniel Levy parus dans une récente interview sur notre site consacrée à la vie privée des personnages publics. Comme le directeur du département Opinion de l’institut CSA le soulignait, les Français se moquent des moeurs sexuelles d’un président ou d’un joueur de football à condition qu’il accomplisse les réformes dans un cas et qu’il marque des buts dans un autre.
Une rupture qui renforce le pessimisme des Français
Alors qu’en 2006, un Français sur deux affirmait que le bon parcours des Bleus avait eu un impact positif sur leur moral, le contexte 2010 indique que le pessimisme est de mise bien avant la compétition. En effet, selon une enquête Ipsos réalisée au début du mois d’avril, un Français sur deux estime que l’équipe de France sera éliminée rapidement.
Dans moins de 50 jours, l’ère Domenech se clôturera et avec elle une période pour le moins complexe de l’histoire de l’équipe de France de football. S’il serait injuste et malhonnête d’accuser l’ancien joueur de Lyon de tout les torts du football français, sa gestion de l’équipe de France a souvent été décriée sans que de réels changements soient apportés en interne. Placés dans un groupe largement à leur portée, les Bleus ont l’occasion de sortir la tête haute et de refermer ce chapitre sur une bonne note et de faire mentir les sondages, une fois n’est pas coutume !