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Marques et Web : le texte revient en force

Publié le 04 mai 2010 par Combuzz

Bovary logoEntretien avec le conseiller éditorial/rédacteur Bovary, réalisé le 04/05/2010 à Paris.

Combuzz : Parlez-nous de votre métier. En quoi consiste-t-il exactement ?

  

Bovary : Je suis conseiller éditorial et rédacteur. Cette activité englobe trois types de prestations articulées autour du discours de marque: la rédaction proprement dite, la conception et le conseil.

Je produis principalement du contenu rédactionnel qui peut se décliner sur des formats papier avec les catalogues, les brochures, la presse d’entreprise, les leaflets et sur le web avec les sites Internet, les blogs et les newsletters. Je rédige également beaucoup d’éditos de présidents d’entreprise, de communiqués et de dossiers de presse.

Par ailleurs, je travaille pour des formats plus publicitaires en tant que concepteur/rédacteur sur des signatures de marque, des accroches, des bodys, des publicommuniqués, des scripts radios, des voix-off. En somme, tout ce qui nécessite des mots et de la formulation dans la communication. Cela peut aller du simple mot pour nommer un nouveau produit jusqu’au livre entier pour raconter l’histoire d’une marque et présenter ses activités.

Enfin, je conseille les marques sur leur politique éditoriale, c’est-à-dire, comment orienter leur discours sur le plan du lexique, de la formulation et la ligne éditoriale en général.

Combuzz : Qui sont vos clients ?

Bovary: Ce sont principalement des agences de communication pour lesquelles je suis prestataire : des agences de web, de relations presses, d’édition, de marketing, d’événementiel et de pub traditionnelle. J’ai eu l’occasion de travailler sur des budgets très variés tels que Orangina, Schweppes, le Club Med, Crédit Agricole, le Figaro, Paramount, Atlantic, Bouygues Telecom, LG, Securitas, Speedy, etc.

Combuzz : Comment se porte le texte aujourd’hui ?

Bovary : Ce que je peux vous dire c’est qu’il est de retour. Il a pendant longtemps été le parent pauvre de la pub au profit de l’image. Le texte était presque réduit à sa plus simple expression, le slogan. L’arrivée d’Internet a replacé le contenu écrit en bonne place dans les stratégies de communication, d’abord pour une simple question technique, celle du référencement naturel, et puis parce que les internautes émettent leur propre contenu avec le web 2.0. Les marques sont donc obligées d’occuper le terrain. Enfin, la crise amène plus de scepticisme par rapport aux supports traditionnels comme la télévision ou la radio. Les marques se doivent d’expliquer et d’intéresser le consommateur au-delà du matraquage d’icônes ou de messages éphémères. Le texte demeure donc un excellent moyen de créer de la relation, à condition d’avoir quelque chose à dire évidemment.

Combuzz : Quelles sont les différences entre les contenus rédactionnels online et offline ?  

Bovary : Internet permet d’annihiler les contraintes de temps et d’espace. Il n’y a pas de production lourde comme un tirage dans l’édition. Sitôt écrit, le texte peut se retrouver en ligne et accessible à des milliers de lecteurs. Il y a très peu de restrictions au niveau du format. Si une marque souhaite publier une centaine de pages par mois, elle le peut sans que cela n’engendre un gros investissement financier car l’espace est quasiment gratuit et illimité. Par ailleurs, le web 2.0 permet de cibler de manière très précise son public d’adapter son message, de sortir du discours généraliste, contrairement à une affiche dans le métro devant laquelle passent des individus aux profils indéterminés. L’écriture online doit aussi intégrer des critères techniques, comme la récurrence de mots-clés pour le référencement, les liens et un découpage plus dynamique du texte.

Combuzz : Quelles sont les évolutions futures du rédactionnel ?

Bovary : J’aurais tendance à penser que face à la masse croissante des contenus, les marques vont devoir ajouter la qualité à la quantité et se singulariser avec leurs propres codes rédactionnels, au même titre qu’elles soignent leurs codes en termes d’iconographie et de charte graphique. Pour le moment, les marques n’osent pas prendre de risque au niveau de la rédaction. Elles sont toujours dans la crainte de ne pas être comprises, c’est pourquoi elles sont obsédées par la concision et la simplicité, si bien que les discours de marques se sont progressivement réduits à quelques mots qui reviennent sans cesse : « nouveau », « gratuit », « bénéficiez de », « faites-vous plaisir »… C’est très ennuyeux et cela finit par devenir creux et transparent. J’ai la conviction que les marques pourraient souvent interpeller le public avec force en osant utiliser des mots plus choisis, voire un style littéraire dans certains cas où l’exercice de style serait au cœur du concept. Il n’y a qu’à voir les commentaires des internautes sur les blogs ou les forums, pour constater que le niveau d’expression est plus soutenu que l’on peut imaginer. On trouve finalement très peu de langage SMS. Les fautes d’orthographe et de syntaxe sont même parfois sanctionnées par des publics très jeunes. En d’autres termes, la qualité d’expression met en valeur le texte et celui qui le lit. Il ne faut pas oublier que la lecture d’un texte ne doit pas seulement avoir un caractère informatif, elle doit être divertissante. Si personne ne discute le fait qu’une belle photo fait vendre, un beau texte doit pouvoir faire de même.

Combuzz : Comment souhaiteriez-vous évoluer vous-même ?

Bovary : Dans la direction que je viens de décrire. Je souhaite rédiger de plus en plus pour des marques qui ont des choses à dire et qui osent mettre les mots qu’il faut. C’est pour cela que j’aime travailler sur des marques patrimoniales et l’univers du luxe en général. Il y a une histoire à raconter, un savoir-faire à mettre en valeur, une passion à faire partager, en somme une certaine élégance à traduire. Les ambitions rédactionnelles sont plus hautes et donc plus stimulantes pour moi. Très récemment, j’ai eu l’occasion d’écrire des poèmes pour une grande marque de luxe souhaitant mettre sa collection en perspective avec un univers épique et onirique. Cela change et relève d’un véritable défi aussi agréable pour le lecteur que le rédacteur. À l’occasion, j’aimerais bien écrire pour la communication des musées, de grands vins ou de grands restaurants.

Combuzz : Que pensez-vous de ces programmes capables de rédiger des articles automatiquement ?  Peuvent-ils à terme menacer votre profession? (lire l’article)

Bovary : Je ne crois pas, pas dans l’immédiat en tout cas. Si l’outil s’améliore, il est possible que cela donne une matière de base à retravailler comme les traducteurs en ligne. Mais, je n’imagine pas que la machine puisse intégrer des critères émotionnels. Cela ne pourrait contribuer qu’à la platitude de la rédaction dont nous parlions précédemment. Le texte marque historiquement l’origine de la civilisation. Si le texte s’appauvrit ou meurt, que devrions-nous en conclure pour notre civilisation ?

 

Retrouvez Bovary sur http://www.bovary-paris.fr/index.htm

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