Un entrepreneur en bâtiment a contesté, en vain, devant les juridictions islandaises la contribution légalement obligatoire qu’il doit verser à un organisme privé, la “Fédération des Industries Islandaises “, alors qu’il n’en est pas - et ne souhaite pas en être - membre et ne bénéficie donc pas de droits équivalents à ceux disposant de cette dernière qualité.
La Cour européenne des droits de l’homme choisit ici de concentrer son examen sur le terrain de l’article 11 (Liberté de réunion et d’association), à la lueur cependant des articles 9 et 10 (Liberté de pensée, de conscience et de religion ; Liberté d’expression - § 28), la protection offerte par le premier rejoignant les objectifs des seconds (§ 46).
Dans ce cadre, la Cour reconnaît le caractère inédit de cette affaire où il ne s’agit pas en tant que tel d’une atteinte au droit négatif d’association - i.e. droit de ne pas adhérer à une association ou un syndicat. Elle estime cependant la situation comparable dès lors que, même si l’intéressé n’est pas formellement membre de la Fédération, sa contribution financière au bénéfice spécifique (§ 49) de cette dernière constitue “un important aspect en commun” avec une telle adhésion, d’autant que les membres peuvent eux déduire fiscalement leur contribution (§ 48). Plus encore, le lien avec les articles 9 et 10 est mis en valeur car ladite organisation plaide en faveur de positions politiques, dont l’adhésion de l’Islande à l’Union Européenne, “fondamentalement contraires aux […] opinions politiques et intérêts” du requérant (§ 51).
A l’aide des travaux du Comité européen des droits sociaux et d’un comité de l’Organisation Internationale du Travail (§ 53 - V. § 22-25), la Cour juge donc que cette taxe constitue une ingérence au sein de la liberté d’association garantie à l’article 11.1 (§ 54), ingérence jugée ensuite contraire aux exigences du paragraphe second de ce dernier article. En effet, malgré la “large marge d’appréciation“ reconnue aux États “dans le domaine de la liberté syndicale, au regard du caractère sensible des questions sociales et politiques” (§ 74) et l’acceptation de la stratégie de l’Islande consistant, dans un souci d’efficacité, à confier à une seule organisation le soin de promouvoir l’industrie islandaise (§ 77), la conventionalité de la contribution litigieuse achoppe sur l’encadrement de l’usage des fonds. on seulement la juridiction européenne relève que les missions de la Fédération et ses devoirs au regard des fonds collectés sont insuffisamment précisés par la législation nationale (§ 78) mais elle pointe aussi “le manque de transparence et de responsabilité, vis-à-vis des non-membres [de la fédération tels que le requérant], dans l’usage des revenus issus de l’« Industrie Charge »” (§ 82 : « There was also a lack of transparency and accountability, vis-à-vis non-members such as the applicant, as to the use of the revenues from the Industry Charge »).
En résumé, si les juges européens admettent le principe et la finalité d’une telle taxe obligatoire, les conditions de sa mise en œuvre constituent une violation de l’article 11 (§ 83).