La liste est trop longue pour pouvoir tous les citer. 65. Ils sont, selon Reporters sans Frontières, 65 journalistes iraniens actuellement derrière les barreaux. Sans compter la centaine de reporters qui ont du prendre la route de l'exil depuis l'élection controversée de Mahmoud Ahmadinejad, le 12 juin dernier.
En cette journée mondiale de la liberté de la presse, c'est le nom d'Emadeddin Baghi, 48 ans, qui me vient spontanément à l'esprit. Incarcéré en décembre dernier, ce fervent défenseur des droits de l'homme - tristement habitué à la prison d'Evin, pour y avoir plusieurs fois séjourné - paye le prix, comme tant d'autres, de son franc parler.
Aux yeux des autorités iraniennes Emaddedin Baghi (à qui nous avions consacré un article dans Le Figaro, il y a quelques années) cumule les « crimes ». Il est le fondateur de l'association de défense des droits des journalistes. Il est l'auteur d'un livre censuré, « Le droit à la vie » - qui dénonce la peine de mort -. Il est l'ex-rédacteur-en-chef du journal Jomhouhriat, interdit en 2003. Pire. Lors des dernières élections, il a soutenu ouvertement un des deux candidats réformistes, Mehdi Karoubi, devenu, depuis, un des chefs de file de la contestation. Enfin, le régime lui reproche d'avoir réalisé, il y a deux ans, une interview avec feu l'ayatollah Hossein Ali Montazeri, diffusée après la mort de ce grand clerc dissident....
Dans une lettre qui a récemment fait le tour de l'Internet, à l'occasion de son anniversaire - passé dans sa cellule -, sa fille, Maryam, pousse un cri du cœur. "Ton pêché est d'avoir invoqué la tolérance et la patience, la paix et l'amitié, le respect de la générosité humaine, le droit à la vie", écrit-elle.
En 2005, Emadeddin Baghi avait été distingué, par la France, avec le Prix des droits de l'Homme. En 2009, il a reçu le Prix Martin Ennals. Mais à chaque reprise, les autorités l'ont empêché de voyager pour recueillir ses lauriers.