Éditions 10/10
157 pages
Résumé:
Massabielle, village acadien exproprié depuis peu pour permettre l'exploitation d'une mine, ne compte désormais plus qu'un habitant, Pacifique Haché, dit "le fou du village", qui refuse de quitter les lieux.
Mon commentaire:
Pacifique Haché est le fou du village de Massabielle. Un village déserté, un village fantôme. Car la compagnie Noranda Mining a offert aux villageois de nouvelles maisons à Bathurst en échange de quoi, ils quittent le village pour permettre l'installation des mines. Pacifique Haché a décidé de rester à Massabielle. Il a élu domicile dans l'église du village et en fait en quelque sorte son royaume. Chaque jour il affronte l'avocat des mines, qui vient le voir pour tenter de lui faire entendre raison. Mais Pacifique Haché, à deux pas de la folie, lui en fait voir de toutes les couleurs.
Le roman comprend 8 parties et peut être subdivisé en trois grandes sections: la première quand Pacifique vit dans l'église et nargue l'avocat; la seconde quand survient l'amour dans la vie du fou du village; et la dernière qui met l'emphase sur l'apparition de la télévision, envoyée par l'avocat. Le roman est remplit de symboles. On peut voir l'expropriation des terres de Massabielle comme une métaphore de la déportation acadienne. Le roman parle aussi du progrès. Le progrès amène les plus forts (dans ce cas-ci les compagnies minières) à écraser les plus petits, qui plient l'échine. Pacifique se révolte en quelque sorte en usant de la folie pour déstabiliser l'adversaire. Sauf que, insidieusement, l'adversaire utilisera le progrès - la télévision - pour mettre son grain de sable dans l'engrenage et faire perdre à Pacifique tous ses moyens. La télévision représente la société de consommation qui, doucement, prend toute la place au quotidien.
Le roman est intéressant si on cherche à en comprendre la symbolique, car le livre en est remplit. La première partie, celle où Pacifique Haché mène la vie dure à l'avocat, est souvent très drôle. Pacifique a de l'imagination pour ébranler l'avocat. Pacifique rencontre également à quelques reprises pendant l'histoire, des anciens de Massabielle. On remarque d'ailleurs que ces anciens fermiers du village, ceux qui ont acceptés l'expropriation, ont perdus leur identité. Ils ne sont plus bons qu'à boire à la taverne, en se faisant vivre sur le bras du gouvernement, chose dont se moque allègrement Pacifique.
Jusqu'où peut aller le progrès et jusqu'à quel point il s'insénue dans nos vies? Laissez-vous raconter Massabielle et la folie de Pacifique Haché, un roman grave et cocasse à la fois, une fable un peu loufoque sur les grandes expropriations par les riches compagnies, le pouvoir des forts sur les plus faibles.
Un extrait:
"-Massabielle, c'est une maladie terminale, comme y disent! Mais une maladie terminale, quand c'est tes docteurs qui te l'ont donnée, tout ce qui te reste pour te défendre c'est de les rendre fous, tes docteurs. Avant de rendre l'âme.
-Pis tu peux faire ça, toi, Pacifique?
-Si y m'ont donné leur maladie, j'peux ben leur donner la mienne!" p.54-55