"- Encore un film de Lars Von Trier?
- Oui, et alors? T'as un problème, tu veux te battre?"
Après une trilogie "sur le vif" (Breaking the Waves, Les Idiots, Dancer in the Dark), notre cher ami Lars Von Trier (Qu'on ne présente plus, encore moins ici) revient à un style beaucoup plus stylisé, une mise en scène plus "artistique" tout en gardant quelques petits détails de mise en scène qu'il gardera après cette trilogie Coeur d'Or hypra-réaliste. Dogville, c'est l'histoire d'un petit village peuplé de gens divers. Arrive une femme, Grace, qui fuit ce qu'elle appelle des gangsters et trouve refuge dans la ville. Certains appréhendent l'arrivée de la jeune femme, d'autres ont le sens de l'accueil ...
Ce film est étourdissant. Déprimant peut-être ... sans doute. Mais vraiment fascinant. Les personnages évoluent dans un non-décor (Où seuls les objets essentiels à l'intrigue apparaissent), comme sur une scène de theâtre. Un theâtre expérimental. ON retrouve dans Dogville la mise en scène baroque et atypique qui ont fait le charme de The Element of Crime ou de Europa. Mais Von Trier a depuis, fait du chemin, et à cette classiosité mise-en-scènique, il rajoute un scénario, ou plutôt un portrait à la scie sauteuse de la nature humaine.
Von Trier expose le paradoxe du jugement des autres. On peut toujours trouver des excuses aux autres, jamais à soi-même. Alors, pourquoi excuser les autres? Excuser les autres, c'est ce que fait Grace au départ, en se rendant utile jusqu'à l'excès. Les habitants lui offrent du travail superflu, devant l'envie de Grace de rendre service. Puis cette charge de travail va s'accumuler ... et les traitements infligés à Grace vont devenir humiliants. Mais au fond, en cachant Grace, ils prennent un risque énorme. Ils font de leur mieux, mais est-ce que ça suffit? Difficile de se faire une opinion sur qui a raison, qui a tort. Et la fin nous charge bien de le rappeler (Un peu comme le faisaient Taxi Driver ou Seul Contre Tous à propos de la justice personnelle). Dogville est un film à réflexion. Quand je dis étourdissant, ce n'est pas pour rien ...
Pour ce film, Von Trier s'est entouré d'un casting hallucinant. Nicole Kidman, vraiment fabuleuse dans le rôle de Grace (qui ne pourra malheureusement pas assurer son rôle dans la suite Manderlay, pour des raisons de planning) est une nouvelle actrice qui fait une performance incroyable dans un film de Von Trier (Après Emily Watson dans Breaking the Waves, Björk dans Dancer in the Dark, et avant Charlotte Gainsbourg dans Antichrist). A cette grande actrice, on rajoutera James Caan, Jean-Marc Barr, Jeremy Davies, Harriet Andersson, Lauren Bacall, Udo Kier (Qui est un habitué de LVT) ... bref, une distribution étonnant pour un film fleuve (presque trois heures, quand même!) vraiment riche, opressant mais qui donne à réfléchir sur la nature des hommes ...
18.5/20
Shauni81.