(Par Véronique Anger. Billet d’humeur du mardi 4 novembre 2008)
Et le meilleur, ce n’est pas d’avoir élu un homme noir à la Maison blanche. Après tout, même si sa peau est foncée, Barack est aussi blanc que noir. Non, le meilleur c’est d’avoir fait abstraction de la couleur et, plus encore, d’avoir choisi le candidat incarnant l’espoir et le changement. « Hope and change », le leitmotiv de la campagne Obama.
Au début de la campagne, je l’avoue, le candidat démocrate me semblait un peu trop people, avec sa belle gueule et ses entrées fracassantes sur les plateaux télé. Un peu trop charmeur, un peu trop beau gosse, un peu trop propre sur lui, bref un peu trop superficiel… pensais-je. Au fil des mois, j’ai vu l’image d’Obama le sexy se métamorphoser et gagner en profondeur et en charisme. J’ai vraiment ressenti un changement lors du dernier débat Obama/McCain. Son assurance séduisante, son timbre de voix grave et rassurant, quelques pointes d’humour décochées au bon moment dans un sourire ravageur et, surtout, une grande élégance et une belle intelligence. La certitude que tout est possible. Ce soir-là, le candidat démocrate croyait dur comme fer en sa victoire. Il avait une telle présence que ses partisans, mais aussi bien des indécis, l’imaginèrent avec fierté en futur président des Etats-Unis. Oui, ce soir-là, le peuple américain y a cru ; le reste du monde aussi.
Et si, aujourd’hui, les Américains ont massivement plébiscité Obama (avec un taux de participation historique) ce n’est pas parce qu’il est noir ou issu d’un milieu social atypique. En douter serait faire insulte à son intelligence et à ses qualités politiques. Ce serait aussi faire insulte au peuple américain tout entier. Le peuple a tranché pour le candidat démocrate parce que c’est lui qui incarnait le mieux le président rassembleur, le guide qui redonne l’espoir et insuffle le changement. Hope and change…
Depuis quelques mois, Barack Obama a semblé galvanisé par la conviction qu’il allait gagner. Plus que par la perspective du pouvoir (se faire élire président du pays le plus puissant du monde donne sûrement des ailes) Obama donne le sentiment d’être « habité » par sa mission. Redonner ses lettres de noblesse aux Etats-Unis d’Amérique jadis respectés par le monde entier comme le pays de la liberté et de la tolérance.
Ce sentiment que tout est possible a en effet créé des attentes immenses dans la population. Tant d’espoir et de désir de changement reposent sur les épaules d’un seul homme! Obama n’aura aucun droit à l’erreur et il faut s’attendre à ce que le monde entier braque ses projecteurs sur le nouveau président et compte les points… Le nouveau président des Etats-Unis n’est pas un enfant de coeur (beaucoup de Français pensent qu’Obama est de gauche, pourtant son programme serait perçu comme "à droite" dans l’Hexagone. Il est vrai que, dans le contexte américain, ses idées sont progressistes) c'est un politique habile et déterminé qui n'est pas arrivé au sommet par hasard. Mais il a un programme social, un projet de relance économique et il semble plus ouvert sur le monde que ses prédécesseurs. Une chose est sûre : Obama sait qu’il joue gros et que, s’il déçoit, le bon peuple qui l’a élu avec tant de passion aura tôt fait de passer de l’espoir à la fureur, de l’amour à la haine…
Cet homme, qui appartient à ma génération et non à celle des baby boomers qui monopolisent le pouvoir depuis des décennies, cet homme-là va peut-être changer le regard que le reste du monde porte aujourd’hui sur son pays et, qui sait, peut-être va-t-il aussi changer le monde ? Symbole et « ciment » d’une société métissée, Barack vient d’ouvrir une brèche. Certes, il a fallu attendre le troisième millénaire pour qu’un homme de couleur soit enfin élu président du pays le plus puissant de la planète. Un pays majoritairement blanc. ’Cause the Times they are a-changin’... chante mon troubadour préféré.
Cette victoire, historique, est un signal fort : désormais, la voie est ouverte aux femmes et aux hommes de bonne volonté, quelles que soient leur couleur, leur culture, leur religion. C’est un premier pas et, comme chacun sait, c’est toujours le premier pas qui coûte…