Le sauvetage de la Grèce est une erreur qui n'épargnera pas l'Euro

Publié le 02 mai 2010 par Francisrichard @francisrichard

L'Union européenne et le FMI devraient accorder des prêts à hauteur de 110 milliards d'euros à la Grèce, pour lui éviter la faillite, dont 45 milliards accordés en 2010 et le solde les années suivantes. Du moins est-ce ce dont auraient convenu les ministres des finances de l'Union européenne aujourd'hui.

Ce sauvetage de la Grèce est une erreur à plusieurs titres :

- Ce sont les pays les mieux portants qui vont se porter au secours des plus mauvais élèves de l'économie, comme lorsque sont mis sous perfusion les canards boiteux avec l'argent prélevé par l'Etat sur les entreprises bien portantes. Ce qui a pour résultat dans un cas comme dans l'autre d'affaiblir les mieux portants, qui se porteront donc plus mal. Les pays fourmis souffriront inévitablement des pays cigales. Les prêteurs des pays fourmis considéreront assez rapidement que les risques qu'ils représentent pour eux ont par là-même augmenté, avec les conséquences prévisibles en matière de taux et de montants qu'ils devront dès lors leur consentir.

- Le sauvetage de la Grèce sera immanquablement suivi du sauvetage d'autres pays comme le Portugal et l'Espagne, puis l'Italie, enfin la France, bref tous les pays qui se sont trop endettés et qui accumulent déficits sur déficits depuis des années. Pourquoi ? Parce que le sauvetage de la Grèce crée un précédent. Désormais les autres pays fortement endettés seront fondés à exiger un sauvetage de la part des pays moins endettés après qu'un premier sauvetage aura été accordé à la Grèce, en mettant en avant une solidarité morale, qui en fait n'est pas morale du tout, puisqu'elle a pour conséquence d'encourager les mauvais élèves. 

- Le sauvetage de la Grèce aurait été obtenu en échange de contreparties de sa part. Le gouvernement grec se serait engagé à réduire son déficit de 14% du PIB aujourd'hui à moins de 3% du PIB en 2014 et à faire des économies de 30 milliards d'euros sur trois ans ici [d'où provient la photo ci-dessus]. Ce qui veut dire que pendant toutes ces années la Grèce augmentera encore sa dette et que les économies promises seront largement insuffisantes à redresser la situation financière du pays. Au fond le sauvetage accordé lui évitera seulement la cessation de paiements aujourd'hui, mais pas la faillite demain. 

- Le sauvetage de la Grèce ne l'incitera donc pas à changer fondamentalement son comportement économique. La Grèce a aujourd'hui un Etat hypertrophié, coûteux et complètement inefficace. L'économie grecque souffre de réglementations, de passe-droits et de rentes de situation. Il lui faudrait libérer son économie, ce qui passe par une remise en cause des réglementations, une baisse drastique des dépenses publiques et une baisse parallèle des impôts, de telle manière toutefois que l'Etat redevienne bénéficiaire pour diminuer rapidement la dette.

Il vaudrait donc mieux que la Grèce fasse faillite et soit obligée de se réformer elle-même. Evidemment cela passerait par des diminutions de salaires des fonctionnaires plus importantes que celles annoncées, mais surtout par une diminution considérable de leur nombre et par une libération de l'économie telle qu'évoquée ci-dessus. L'économie grecque en pâtirait à court terme - et ce serait certainement douloureux - , mais c'est inévitable. Les autres pays qui se trouvent juste derrière sur la liste des mauvais élèves seraient bien inspirés de se réformer avant d'être contraints de le faire à chaud, comme la Grèce.

Quant à l'Euro, il ne sera de toute façon pas épargné. En effet les pays les mieux portants vont pâtir de sa faiblesse, les pays les moins bien portants de sa relative appréciation en regard de leur situation économique. Plutôt que de rassurer le sauvetage de la Grèce prouvera que l'Union européenne est prête à privilégier ses plus mauvaises économies au détriment des moins mauvaises et qu'en conséquence l'Euro n'est pas une monnaie d'avenir.

Francis Richard

Nous en sommes au

652e jour de privation de liberté pour Max Göldi, le dernier otage suisse en Libye