C'est dimanche, et alors que l'odeur des tartines grillées flotte encore dans l'atmosphère rafraîchie par une pluie nocturne, je me suis penché sur mon petit clavier pour pondre un billet. Et ce n'est pas facile tous les jours…
En effet, les sujets se suivent et se ressemblent. Si l'Histoire ne repasse pas les plats, il lui arrive parfois de s'arrêter longuement sur certains événements dont on connaît pourtant déjà l'issue.
Il en va ainsi de la crise grecque (j'y reviendrai demain – stay tuned) dont on sait pertinemment qu'elle se terminera par une violente baisse du pouvoir d'achat des citoyens helléniques ; la mollesse et la désorganisation des chefs d'états et de gouvernements actuels ne fait qu'allonger une sauce déjà goûtée.
Autre notule d'actualité avec le 1er mai, occasion pour les quelques poignées de syndicalistes encore sur le marché du bobard politique de montrer leurs petits muscles dans des manifestations aussi colorées qu'inutiles et dont le nombre de participants, plus faible d'années en années, donne une idée assez exacte de la représentativité des lobbys collectivistes.
On pourrait gloser à loisir sur la mobilisation franchement flasque qu'ils ont déclenché sachant que, pourtant, le thème des retraites est cher au coeur des Français. Mais la presse s'en charge bien, qui part dans des analyses finaudes et profondes, marronniers habituels en ce début de mois pour journalistes en mal d'inspiration.
Or, là encore, on sait très bien ce qui va se passer : dans un premier temps, chaque proposition, permettant de ménager une vague porte de sortie à l'inextricable problème de la retraite par répartition en France, se verra obtenir une fin de non recevoir violente par ces syndicats – sur la musique de “c'est un skâândââle !” – jusqu'au moment où on attendra le Point G (comme Grèce) et qu'il n'y aura plus une thune pour les retraités. L'étape suivante, outre les pleurs et les gémissements, sera le naturel repli sur soi avec une surenchère d'interventionnisme étatique. Ensuite, toutes les options restent ouvertes, avec, entre autres, l'effondrement de la 5ème République.
Tout ceci ressemble en fait de plus en plus à un réveil pénible d'un lendemain de cuite mémorable.
Et puis tiens, je suis tombé sur quelques articles parlant de la Politique Agricole Commune (PAC), où l'on apprend ainsi que la France a récupéré 11 milliards d'euros, répartis sur 400.000 bénéficiaires (exploitants agricoles, associations caritatives, entreprises agroalimentaires, particuliers, etc…).
Comme de juste et comme d'habitude, on observe qu'une minorité de firmes et d'exploitations touche la majorité des aides, confirmant en cela l'adage méconnu mais parfaitement exact qui caractérise le socialisme : un maximum de pauvres paye pour un minimum de riches.
Heureusement, nos élites constatant – toujours avec un peu d'étonnement naïf – cette règle d'airain, ont décidé de réformer la PAC histoire de mettre un peu d'ordre là-dedans. Evidemment, on pourra objecter que ce n'est pas la première fois que cette PAC est réformée et que, pourtant, chaque tentative n'aura finalement pas changé des masses dans l'observation initiale.
En outre, ce qui est vrai pour la PAC l'est à peu près pour toutes les distributions massives de pognon prélevé dans la poche des autres : c'est toujours une minorité d'individus ou de sociétés qui, connaissant bien les rouages et usant souvent de stratégies élaborées, pratiquent habilement le monde politique à leur avantage et transforment rapidement le drain monétaire en cathéter à subvention directement en intraveineuse pour eux.
Le nombre ahurissant d'expériences tentées et aboutissant toujours au même résultat n'empêche pourtant pas les thuriféraires de l'action étatique de répéter encore qu'avec une bonne réforme, ceci devrait pouvoir se corriger.
Si l'on ajoute les effets de bords catastrophiques (voire, soyons clairs, mortels) que la PAC provoque dans les pays en voie de développement, on comprendra que l'ensemble même de cette pratique doit cesser.
Mis à part quelques protectionnistes empoussiérés dans un passé chimérique et calcifiés dans des réflexions économiques bancales et niaises, on ne peut en effet plus souhaiter conserver les prix des biens agricoles artificiellement élevés, et empêcher ainsi les denrées moins chères des paysans pauvres d'être importées à bon prix pour le consommateur local européen.
C'est pourtant tout l'intérêt de la PAC qui coûte cher à la ponction, cher à la production, et cher pour le reste du monde.
En effet, prélever 11 milliards, ce n'est pas indolore du tout pour qui paye [et je ne parle que du montant français ici - la PAC totale européenne, c'est 112 milliards, hein] ; seuls ceux qui prélèvent ou qui profitent peuvent prétendre le contraire. De plus, la redistribution de ces sommes n'est pas gratuite (à commencer, bêtement, par le salaire des fonctionnaires de Bruxelles).
L'introduction de ces subsides permet de conserver, vaille que vaille et surtout coûte que coûte, des productions coûteuses en local au lieu d'inciter naturellement la reconversion de certains pans de l'économie européenne vers des productions à plus forte valeur ajoutée.
Enfin, et c'est à mon avis ce qu'il y a de plus grave, cette PAC pose ouvertement un prix sur la tête des paysans les plus pauvres en estimant qu'une industrie agroalimentaire sauvée par subsides en Europe vaut mieux que la vie de plusieurs dizaines ou centaines de paysans africains, asiatiques ou sud-américains qui ne pourront vendre leurs production chez nous (à cause des taxes à l'import ou de la concurrence artificielle des productions européennes).
Mais en attendant, tant la presse que les politiques se concentrent sur, finalement, les méthodes pour rendre cette PAC, qui est, de façon douce et pernicieuse, devenue une véritable arme de destruction massive, plus efficace.
On ne pourra s'empêcher d'avoir des sueurs froides en imaginant ce que “plus efficace” peut vouloir dire, tant l'efficacité obtenue jusqu'à présent aura provoqué de problèmes.