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Lecture fondanienne de la guerre des falafels entre sahiounistes et freihaouistes
C'est là, un peu plus haut dans la rue Damas qui coupe Beyrouth en deux, derrière la carcasse de l'autobus de 3aïn el Remmaneh sur la photo, que se trouve la boutique de falafels de la famille Sahioun. Les meilleurs falafels du monde - bien du monde ! - : craquants à coeur, parfaitement égouttés comme il se doit et enroulés dans le pain avec tomate, radis, persil et sauce sésame de main d'expert (il est possible de demander une pincée de piment pour ceux qui aiment). Plus à l'intérieur, de l'autre côté de la ligne de démarcation, sur la colline d'Achrafieh, il y a la boutique de la famille Freiha. Ses falafels ne sont pas mauvais mais ils restent bien en deça de ceux de Sahioun : craquants jusqu'à en être cramés en croûte et pas assez cuits à l'intérieur, dégorgeants d'huile et pas toujours bien enserrés dans le sandwich. Parallèlement au conflit qui oppose les partisans de l'une et de l'autre famille est apparu il y a quelques temps un sous-conflit entre frères Sahioun qui a abouti à la scission de l'héritage paternel en deux boutiques l'une à côté de l'autre.
Moralité : mieux vaut se battre à coup de falafels, parce que dans cet affrontement les stocks de munitions ne sont constitués que de fèves et pois-chiches qui n'ont jamais tué et ne tuerons jamais personne et que la victoire y est assurée par la seule dextérité.