En DVD : On l’a oublié, mais Brian De Palma est un enfant des sixties. Preuve en est ce Hi Mom, que ressort Carlotta dans une très belle copie. Tourné quatre ans avant Phantom of Paradise, le 3e film du futur réal de Scarface est un pur objet de curiosité. La preuve par trois :
1 - Conceptuel et expérimental, Hi Mom est une curiosité dans laquelle se manifeste déjà tout le talent formaliste de De Palma : caméra subjective, split screen, inserts, plans séquences, tout l’attirail de la Palma’s touch figure déjà dans ce portrait de New York à la fin des 60’s vu à travers les yeux d’un apprenti-cinéaste, un peu voyeur sur les bords, et qui revient du Vietnam. Et qui ressemble à s’y méprendre à Travis Bickle, le héros de Taxi Driver – normal, vous me direz, il est interprété par un Robert De Niro saisissant, déjà gagné par la grâce, et qui reprenait là le personnage qu’il avait incarné 3 ans plus tôt pour De Palma dans Greetings.
Un brûlot sur les relations inter-raciales
2 - Surtout, c’est un De Palma méconnu que ce DVD estampillé Carlotta nous permet de re-découvrir : un De Palma social et visionnaire. Compagnon de route de la Factory d’Andy Warhol, il y dénonce 30 ans avant les reality show le poids de la télévision dans l’espace social, les tendances voyeuristes et narcissiques qu’elle génère, et la solitude urbaine qu’elle peut créer. D’où le titre clin d’œil du film… et la dénonciation du quart d’heure de célébrité télévisuel prophétisé par Andy Warhol.
3 - Enfin, on y redécouvre un De Palma politique. On connaît son obstination à dénoncer la corruption politique (Snake Eyes) et la perte d’innocence consécutive à l’assassinat de Kennedy (Blow Out). On connaît moins son activisme politique. Qui éclate dans ce film, avec pour point d’orgue un happening Be black Baby ! tourné en noir et blanc qui voit s’affronter une troupe de comédiens noirs grimés en Blancs à des spectateurs blancs grimés en Noirs et qui a pour but de faire ressentir aux Blancs la condition de Noirs. Grinçant, drôle. Et glaçant. Qui vaut tous les brûlots de Malcolm X. Et qui rappelle les expérimentations d’un Godard période Made in USA.
Travis Bickle