L'opéra Garnier rend un hommage d'une qualité exceptionnelle à Jérome Robbins, chorégraphe et coréalisateur de West Side Story , l'oeuvre qui l'a fait connaître du monde entier mais aussi compagnon de route des grands de la comédie musicale hollywoodienne comme Stanley Donen dont il signa les chorégraphies d'"On the Town" . Jérôme Robbins, mort il y a une dizaine d'années et qui fut le maître à danser du New York city ballet aux côté de Balanchine.Ce qui est moins connu , en revanche c'est les oeuvres mineures de ce chorégraphe de génie , ami de Bob Fosse et qui influencera plusieurs générations.
Le spectacle commence avec "En sol". Démarrage en fanfare amusée et jazzy avec le concerto pour piano et orchestre de Maurice Ravel. La sculpturale Marie-Agnès Gillot et Karl Paquette( Etoile récente)sont les solistes de ce virevoltant et gai ballet entré au répertoire du Ballet de l'Opéra dans les années soixante dix. Le pas de deux sur l'Adagio Assai est un modèle de fluidité et d'assurance. L'ensemble est primesautier, frais, précieux en période de morosité. A noter la performance d'Elena Bonnay, pianiste virtuose mais aussi ...comique !
Comme pour mêler d'emblée , l'ancien et le moderne , suit "Triade" de Benjamin Millepied, un ballet dédié au maître de Broadway par celui qui fut à 16 ans son élève et perpétue l'oeuvre avec une démarche singulière. Stéphanie Romberg, Muriel Zusperreguy , Audric Bezard et Marc Moreau donnent à cette pièce qui brouille les repères de l'amour beaucoup d'énergie et un style abstrait et contemporain souligné par la partition échevelée (pour piano et deux trombones) de Nico Mulhy ( ex -assistant de Phil Glass).
La deuxième partie s'ouvre sur "In the Night" , pièce elle aussi très représentée mais qu'on ne se lasse de voir tant elle recèle de finesse et de légèreté. "In the Night" c'est Trois Pas de deux qui ne font pas six. Avec des couples comme Stéphane Bullion /Agnès Letestu, Claire-Marie Ostia/ Benjamin Pech ou encore AurélieDupont/ Nicolas Le Riche, on multiplie les variations amoureuses à l'infini dans une atmosphère curieuse non dénuée parfois d'une ironie à la Monty Python . Enfin "The Concert" , entre Pina Bausch ou William Forsythe pour la danse, Tati , Les Marx Brothers et tant d'autres pour le burlesque ravit un public enchanté de prendre un premier fou rire à un spectacle de danse. Le charme et l'audace de cette oeuvre créée en 1956 en font un bijou d'une rare élégance et d'une fantaisie, signalée dès l'entrée par le rideau de scène de Saul Sternberg.