Afrique 50 ans d’indépendance : Sarkosy et d’Obama 3/5

Publié le 30 avril 2010 par Marine8888

« On a trop dansé en Afrique, on a trop chanté et on a trop rigolé ...Pour cette commémoration il n’y aura ni défilé militaire pompeux, ni danses endiablées, mais un colloque. Un colloque auquel j’inviterais les représentants de tous les pays africains qui ont acquis leur indépendance en 1960 afin que l’on réfléchisse sur ce demi-siècle passé et les cinquante ans à venir », le Président Laurent Gbagbo de Côte d’Ivoire, le 31 janvier 2010.

Dans le cadre de ce colloque, le Dr. Djibril DIOP, chercheur associé à l’université de Montréal (Québec)  dans une conférence ayant pour titre « 50 ans d’indépendance : quelle Renaissance pour les États africains ? » a fait une analyse des discours prononcés par le président des Etats-Unis Obama et le président français Sarkosy.

Se posant la question de savoir si ces deux interventions étaient radicalement opposées, il est arrivé à la conclusion que sur le fond elles ne différeraient pas autant qu’il y parait.

Dans l’art et la manière, Obama a nettement l’avantage : père Kenya, donc dépositaire d’une partie des souffrances des peuples d’Afrique, considéré comme « un enfant du pays », ce qui n’est pas le cas d’un Nicolas Sarkozy, considéré comme « ce petit blanc impérialiste », qui ose donner des leçons. Obama a choisi le Ghana, alors que Nicolas Sarkozy, après son escale dakaroise, s’est vu obligé d’aller se prosterner devant l’indéboulonnable, Oumar Bongo Ondimba, symbole et l’incarnation d’une « Francafrique ».

Mais derrière  ces différences, les discours ont des accents similaires et Djibril Diop relève bien des similitudes dans le fond des propos tenus par les deux hommes. Trois exemples parmi d’autres :

« De plus, si chez Sarkozy, il s’agit du « paysan africain, qui, depuis des millénaires, vit avec les saisons, dont l’idéal de vie est d’être en harmonie avec la nature », et qui « ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes, et des mêmes paroles. », par contre pour Obama, il s’agit de « braves Africains » qui sont du bon côté de l’histoire, anticipant même sur l’histoire d’une renaissance, dont les Africains seront les héros incontestablement. »

Selon Sarkozy : « L’Afrique a sa part de responsabilité dans son propre malheur », alors que pour Obama : « Dans de nombreux endroits, l’espoir de la génération de mon père a cédé le pas au cynisme, souvent au désespoir. Il est facile de pointer du doigt les autres et de les blâmer pour ces problèmes ».

Ils s’adressent tous les deux à la jeunesse africaine, à qui il revient de relever les défis de demain : « La renaissance dont l’Afrique a besoin : vous seuls, jeunes d’Afrique, pouvez l’accomplir parce que vous seuls en aurez la force », selon le président français. Dans ce même ordre d’idées, Obama demande aux jeunes Africains d’assumer « la responsabilité de [leur] avenir » en évoquant dans le détail les « maux » du continent, qui vont de « la corruption policière à la rapacité des élites, de l’utilisation des enfantssoldats dans les conflits à la complaisance envers les trafiquants de drogue ».

Sa conclusion est assez implacable et rejoint les analyses faites par des universitaires et intellectuels : le regard porté sur l’Afrique reste encore celui qui prévalait du temps des colonies : un peu condescendant, un peu méprisant, un peu indulgent, paternaliste, osons le terme tant et si bien que tout ce qui viendrait d’Afrique à l’exception de la musique, est reçu le plus souvent avec un petit air de commisération systématique.

« Ces discours ne posentils pas une question fondamentale : celle du renouvellement du regard de l’Occident sur une Afrique contemporaine, dont il s’agit de saisir le mouvement sans se perdre continuellement dans des détails d’une historicité révolue pour faire face au vécu concret de la majorité des peuples du continent ? »

Eh bien non, nous ne sommes pas encore tout à fait sortis de l'image complaisante et moqueuse que véhiculait cette célèbre publicité - on parlait alors de réclame - "Y a bon Banania" avec ce regard dont on couve les enfants bien gentils mais dont on considère les capacités limitées !