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Le remaniement pour les nuls

Publié le 23 mars 2010 par Journalautredefinition

Le remaniement pour les nulsA tout prendre, le « mini-remaniement » mis en place par l’Elysée contient un véritable enseignement : Nicolas Sarkozy entend rester le seul patron de la majorité et fera tout pour éliminer la concurrence avant 2012.

A défaut d’être républicaine, la réaction du chef de l’Etat au dernier tremblement de terre électoral a été très professionnelle. On pourrait presque la donner en exemple dans les écoles, pour illustrer le Chapitre : « Kit de survie du Président après des élections de mi-mandat catastrophiques ».

Règle n°1 : sacrifier un ou deux boucs-émissaires. Xavier Darcos remplit aujourd’hui ce rôle, victime de son score en Aquitaine. C’est la loi du genre. L’arène électorale ne serait plus une arène si elle se passait de mises à mort symboliques.

Il faut aussi, dans un remaniement, donner l’impression d’une inflexion politique. C’est la règle n°2 : changer l’orientation (pour montrer que l’on a entendu l’électeur), mais conserver le cap (pour ne pas perdre la face). Remanier sans se renier, en quelque sorte, et sans bouleverser ses habitudes – car même les gouvernants tiennent à leur routine. A ce jeu subtil de rupture dans la continuité, l’ouverture à gauche est évidemment toute désignée pour être sacrifiée. Dans un mouvement de contrition vis-à-vis de son électorat, la droite devrait désormais revenir à ses fondamentaux. C’est d’autant plus inéluctable qu’il sera de plus en plus difficile de débaucher au parti socialiste : une personnalité comme Martin Hirsch ne songeait de toutes façons qu’à se refaire une virginité pour participer au retour de la gauche en 2012.

Règle n°3 (la plus importante) : rester maître dans son camp. Pour le chef battu, il faut à tout prix éviter l’émergence d’une alternative crédible au sein de la majorité. Là encore, la démarche est très sarkozyenne : à défaut de pouvoir éliminer les rivaux potentiels, on tentera de les asphyxier, en débauchant leurs lieutenants, François Baroin pour Alain Juppé et Georges Tron pour Dominique de Villepin. Pour la même raison, et malgré un score moyen en Haute-Normandie, on gardera Bruno Le Maire (ce n’est pas le moment de le rejeter dans les bras de Dominique de Villepin). Et bien sûr, dans la même logique d’étouffement de la concurrence, on conservera le Premier ministre : il vaut mieux l’user sur la réforme des retraites que de le voir partir au moment où sa cote de popularité est encore – relativement – intacte.

Qu’on se s’y trompe pas : le premier objet du Gouvernement qui se met en place n’est pas de gouverner la France pendant les deux années à venir. Il est de ligoter les ambitions autour de la personne du Président de la République. On gouvernera peu : d’ailleurs, Nicolas Sarkozy annonce déjà une pause. Mais on s’observera beaucoup, comme dans un peloton où il faut empêcher un sprinter de se détacher.

Quel est, au fond, le sens de cette « petite ouverture » ? Il n’est pas sûr qu’elle soit exactement à la hauteur des enjeux du pays. Il n’est pas sûr, non plus, qu’elle suffise à sauver Nicolas Sarkozy : comme pour l’ouverture à gauche, les « prises » sont rarement des personnalités de poids et, quand un bateau coule, y faire monter davantage de transfuges ne sert qu’à accélérer l’engloutissement. Il est probable aussi que la élus de droite dans leur ensemble paieront lourdement cet autisme électoral et cette stratégie de bunkerisation autour du président.

Nicolas Sarkozy prêt à se retirer en 2012 ? N’y croyons pas un instant. S’il y a une leçon à tirer de ce remaniement, c’est que le Président de la République est resté le même : politique jusqu’au bout des ongles, tendu vers 2012, se sachant maître du jeu, décidé plus que jamais à mettre toute sa confiance dans la machine à donner des postes et des maroquins, cette prodigieuse planche à billets qui permet d’acheter les soutiens en les payant avec la fausse monnaie de leur ambition.

V. Naon  

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D'après un sondage réalisé les 24 et 25 mars par Harris Interactive pour RTL, 66% des Français se déclarent "insatisfaits" du remaniement ministériel ; celui-ci ne recueille l'approbation que de 31 % des personnes interrogées.


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